Question de M. HÉRISSON Pierre (Haute-Savoie - UC) publiée le 17/10/2001

M. Pierre Hérisson appelle l'attention de M. le ministre de l'intérieur sur les problèmes d'insécurité rencontrés dans les lieux publics et notamment les transports urbains. La sécurité est devenue l'une des priorités de notre pays et nous devons, membres du Gouvernement et Parlement, tout faire pour assurer la tranquillité de nos concitoyens. Elle se décline par des mesures concrètes en matière de police de proximité, à travers des moyens humains, matériels ou judiciaires. Les transports publics urbains ne font pas exception à la règle. Ils sont trop souvent le lieu d'actes de délinquance, d'incivilités, de destructions, de vols et d'agressions physiques. Pour pallier ce phénomène, de plus en plus de compagnies de transports publics sollicitent des autorisations et des financements pour organiser une plus grande sécurité sur leurs réseaux urbains. Des financements des collectivités locales sont également mobilisés à cette fin. L'usage de la caméra dans les bus, souvent en appui de la présence d'agents d'ambiance, constitue un outil de prévention de la délinquance qui devrait permettre des suites judiciaires. Force est de constater que, d'une région à l'autre, à l'appréciation des acteurs de la répression judiciaire, l'usage de la caméra peut ou non être un outil pertinent. En effet, certains officiers de police judiciaire, bien que reconnaissant l'aide précieuse des caméras dans la recherche et l'identification de coupables de faits délictueux, répondent aux victimes des agressions que le support vidéo ne peut leur servir pour justifier une interpellation, quand bien même les faits seraient hautement probants. Les compagnies de transport, les collectivités locales, la population et a fortiori les victimes ne comprennent pas cette situation. Aussi, il lui demande de bien vouloir lui apporter toute précision quant à l'utilisation judiciaire exacte des caméras de surveillance dans les transports publics ainsi que sur la valeur juridique précise d'un tel outil de prévention pour la recherche et l'arrestation des coupables.

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Transmise au ministère : Justice


Réponse du ministère : Patrimoine publiée le 07/11/2001

Réponse apportée en séance publique le 06/11/2001

M. Pierre Hérisson. Monsieur le secrétaire d'Etat, je souhaite appeler l'attention de M. le ministre de l'intérieur sur les problèmes d'insécurité rencontrés dans les lieux publics, notamment dans les transports urbains de voyageurs.
Comme chacun le sait, la sécurité est devenue l'une des priorités politiques de notre pays et nous devons - membres du Gouvernement, parlementaires et élus locaux - tout mettre en oeuvre pour l'assurer.
Cette volonté doit se traduire par des mesures concrètes en matière de police de proximité, en mobilisant des moyens humains, matériels et judiciaires et en faisant appel aux nouvelles technologies.
Les transports publics urbains sont trop souvent le lieu d'actes de délinquance, d'incivilité, de destructions, de vols et d'agressions physiques. Pour pallier ce phénomène, de plus en plus de compagnies de transport public de voyageurs sollicitent des autorisations et des financements, qui émanent souvent des collectivités locales, pour organiser une plus grande sécurité sur leurs réseaux urbains.
Dans les bus, l'usage des caméras et la présence d'agents d'ambiance constituent un outil de prévention de la délinquance. Mais qu'en est-il des suites judiciaires, concrètes et efficaces ?
Force est de constater que, d'une région à l'autre, les appréciations des acteurs de la répression judiciaire sur l'usage des caméras varient. Certains officiers de police judiciaire, même s'ils reconnaissent que les caméras apportent une aide précieuse dans la recherche et l'identification de coupables de faits délictueux, répondent aux victimes des agressions que le support vidéo ne peut leur servir pour justifier une interpellation, quand bien même les faits seraient hautement probants.
Les compagnies de transport, les collectivités locales, la population et a fortiori les victimes ne comprennent pas cette situation. Surtout, elles se demandent pourquoi on ne peut pas utiliser ce moyen.
Je demande donc au Gouvernement de bien vouloir m'apporter toutes précisions quant aux conséquences judiciaires exactes de l'utilisation des caméras de surveillance dans les transports publics, ainsi que sur la valeur juridique précise de cet outil de prévention pour la recherche et l'arrestation des coupables, jurisprudence comprise.
M. le président. La parole est à M. le secrétaire d'Etat.
M. Michel Duffour, secrétaire d'Etat au patrimoine et à la décentralisation culturelle. Monsieur le sénateur, je vous prie d'accepter les excuses de Mme la garde des sceaux, qui ne pouvait être présente ce matin et qui m'a donc chargé de vous faire part de sa réponse.
Vous appelez l'attention du Gouvernement sur l'utilisation qui peut être faite, au niveau judiciaire, des enregistrements vidéo obtenus par les caméras de surveillance, notamment celles qui sont implantées dans les véhicules de transport publics.
Les conditions d'utilisation de la vidéosurveillance ont été réglementées par la loi d'orientation et de programmation relative à la sécurité du 21 janvier 1995.
Cette loi prévoit que l'installation de systèmes de vidéosurveillance peut être mise en oeuvre aux fins d'assurer la protection des bâtiments et installations publics et de leurs abords, la sauvegarde des installations utiles à la défense nationale, la régulation du trafic routier, la constatation des infractions aux règles de la circulation ou la prévention des atteintes à la sécurité des personnes et des biens dans des lieux particulièrement exposés à des risques d'agression ou de vol. Sur ce dernier point, les moyens de transports publics peuvent être valablement équipés.
Le public doit être informé de manière claire et permanente de l'existence du système de vidéosurveillance et de l'autorité ou de la personne responsable.
L'installation d'un tel système est subordonnée à une autorisation du représentant de l'Etat dans le département et du préfet de police à Paris, donnée, sauf en matière de défense nationale, après avis d'une commission départementale présidée par un magistrat du siège ou un magistrat honoraire.
L'autorisation préfectorale prescrit toutes les précautions utiles, en particulier quant à la qualité des personnes chargées de l'exploitation du système de vidéosurveillance ou visionnant les images.
Les enregistrements sont détruits dans un délai maximal fixé par l'autorisation, sauf appréhension dans le cadre d'une enquête judiciaire.
Ainsi, la loi précitée a pris en compte l'utilisation des enregistrements vidéo dans une enquête de police judiciaire. Ces éléments matériels sont effectivement de nature à constituer un élément de preuve dans des enquêtes conduites sous l'autorité des parquets, visant, par exemple, des violences ou des vols commis dans un transport public de voyageurs.
Le droit pénal ne hiérarchise pas la valeur des modes de preuve. La valeur juridique d'un enregistrement effectué dans ces conditions et sa valeur probante sont les mêmes que celles de tous les autres modes de preuves.
Au même titre qu'un témoignage ou un examen technique, la vidéo peut être le support d'une enquête judiciaire qui s'attachera à conforter, par d'autres éléments, les constatations de l'enregistrement réalisé.
Vous n'ignorez pas l'importance que Mme Lebranchu attache à ce que l'action publique menée par les parquets vise à réprimer les formes actuelles de violences urbaines. A cet égard, plusieurs circulaires ont rappelé aux magistrats du parquet les moyens à mettre en oeuvre pour lutter contre ces phénomènes, notamment celles du 23 décembre 1998, relative aux gestions des crises urbaines, et du 15 décembre 1999, concernant les réponses judiciaires aux actes de violences urbaines.
En particulier, la dernière circulaire précitée insistait sur l'intérêt d'utiliser les moyens modernes d'enquête, notamment les clichés photographiques et la vidéo.
M. Pierre Hérisson. Je demande la parole.
M. le président. La parole est à M. Hérisson.
M. Pierre Hérisson. Monsieur le secrétaire d'Etat, je vous remercie des précisions que vous avez apportées concernant, en particulier, les circulaires publiées, mais vous connaissez le système : nous votons la loi et, ensuite, viennent les décrets, qui, comme leur nom l'indique, sont d'application, puis les circulaires.
Je ne sais pas si celles du 15 décembre 1999, que vous avez citée, peut faire l'objet de lectures différentes de la part des élus locaux, en particulier des maires, officiers de police judiciaire, sur le territoire de leur commune, mais tel est, en tout cas, le sentiment qu'éprouvent ceux d'une juridiction du nord du département dont notre collègue Jean-Claude Carle et moi sommes élus, la Haute-Savoie.
Ou la circulaire n'est pas arrivée jusqu'à eux, ce qui est possible, ou elle peut être interprétée d'une façon qui ne leur permet pas d'utiliser, avec l'efficacité que vous avez bien voulu vous-même souligner, les nouvelles technologies, plus particulièrement les moyens vidéos - c'est-à-dire l'image en général, qu'elle soit sous la forme de photographies ou de films - permettant de reconnaître et, surtout, de confondre un suspect à tout moment, dans une enquête judiciaire, dès lors que toutes les précautions ont été prises s'agissant de l'autorité chargée d'assurer l'exploitation des réseaux et de la fiabilité de la conservation de l'image, et dès lors que l'installation de tels systèmes est bien subordonnée à une autorisation, comme vous l'avez précisé.
Aujourd'hui, nous sommes à nouveau confrontés à des difficultés malheureusement trop connues dans notre pays, liées à l'interprétation des circulaires et à la lenteur de leur application. Cela est préjudiciable à l'image de la police, de la gendarmerie et de la justice en matière d'efficacité dans le domaine de la sécurité, mais, surtout, cela conduit à l'inefficacité dans le domaine des sanctions !

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