Question de M. BÉCOT Michel (Deux-Sèvres - UC) publiée le 10/01/2002

M. Michel Bécot attire l'attention de M. le ministre délégué à la santé sur les propositions exprimées par l'association France Adot, en matière de prélèvements d'organes, de tissus, de cellules et de produits du corps humain. Les représentants de cette association estiment urgent de procéder au réexamen des lois bioéthiques adoptées en 1994, pour une durée de cinq ans et qui auraient dû être révisées en 1999. Ils proposent que le principe d'un réexamen tous les cinq ans soit pérennisé. Par ailleurs, ils proposent un élargissement des catégories de donneurs vivants, à l'intérieur du cadre familial et à toute personne ayant une relation étroite et stable avec le receveur. Il pourrait être envisagé d'accorder un véritable statut du donneur vivant. Ils rappellent la nécessité d'un consentement explicite et éclairé pour tous les prélèvements pratiqués sur les donneurs vivants sur le modèle des donneurs de moelle osseuse mineurs. Ils souhaitent qu'intervienne une harmonisation de la législation concernant toutes les formes de prélèvement pour les tissus, les cellules, les produits du corps humain mais aussi les déchets opératoires. Ils demandent que l'exigence de traçabilité s'applique à tous les prélèvements de tissus afin d'enrayer toute tentative de commercialisation. Ils s'étonnent que seulement 2 000 morts encéphaliques soient recensés alors que Mme le ministre de l'emploi et de la solidarité citait le 22 juin 2000, le chiffre de 10 000 morts de ce type. Ils se déclarent réservés face au Registre national des refus (RNR), souhaitant que tous les Français prennent, de leur vivant, position par rapport au don d'organes. Le RNR permet de garantir à toute personne opposée au prélèvement, le respect de sa décision mais n'assure pas cette garantie à ceux et celles qui souhaitent exprimer leur accord en faveur du don. La carte de donneur d'organes n'est qu'un élément de discussion avec la famille. Le RNR ne permet pas d'exprimer une acceptation partielle du don. Ils demandent donc qu'un aménagement du RNR soit envisagé et que les modalités d'inscription sur ce registre soient sécurisées. Il lui demande de bien vouloir lui préciser les suites qu'il entend réserver à ces propositions.

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Réponse du ministère : Santé publiée le 28/03/2002

Le projet de loi de bioéthique réserve d'ores et déjà une suite favorable à la plupart des propositions de l'association France ADOT en matière de prélèvement d'organes. Pour ce qui a trait aux prélèvements effectués sur personnes vivantes, le projet de loi prévoit l'extension du champ des donneurs vivants à toute personne ayant avec le receveur une relation étroite et stable de nature à respecter les principes éthiques de gratuité et de liberté du consentement ; il supprime la condition d'urgence régissant le don entre conjoints. Parallèlement, il aménage un dispositif garantissant les principes éthiques et concourant à la protection des donneurs. D'autre part, il dispose qu'outre l'expression du consentement devant le président du tribunal de grande instance, le prélèvement sur les donneurs non-apparentés - ou même sur les donneurs apparentés si le magistrat l'estime préférable - doit être autorisé par des comités ad hoc. D'autre part, il prévoit la mise en place d'un répertoire des donneurs d'organes prélevés afin d'évaluer exactement les conséquences de ces prélèvements. Le projet de loi accroît les garanties encadrant les prélèvements de tissus et de cellules sur les donneurs vivants en faisant du consentement écrit l'exigence minimale et en prévoyant que, selon le degré d'importance du prélèvement tissulaire ou cellulaire en termes de conséquences possibles sur la santé du donneur, tout ou partie des exigences requises pour le consentement au don d'organes peuvent être requises. Le projet aménage également un droit d'opposition des personnes opérées à l'utilisation thérapeutique des résidus opératoires. La traçabilité de tous ces éléments, quelles que soient leurs conditions de prélèvement, est déjà effective, conformément aux différents textes réglementaires en vigueur, pris en application de la loi bioéthique. En ce qui concerne les prélèvements sur les personnes décédées, dont l'augmentation suppose notamment l'amélioration du recensement des personnes en état de mort encéphalique, le Gouvernement a élaboré un " plan greffe ", présenté en juin 2000. Ce plan comporte diverses mesures visant à pallier le manque de greffons, notamment en renforçant les moyens consacrés aux prélèvements d'organes dans les établissements de santé. La mesure principale concerne la création de postes de coordonnateurs de prélèvements, médecins et infirmiers, dont l'implantation au sein des établissements de santé a pour but de développer le recensement des donneurs potentiels et le prélèvement des organes et des tissus sur donneur décédé. Les créations de postes prévues sont au nombre de 130, répartie sur trois ans. Elles devraient contribuer à atteindre les objectifs fixés qui sont de porter le nombre des greffes d'organes de 15 à 20 prélèvements par million d'habitants et d'être autosuffisant dans le domaine des greffes de tissus. Pour ce qui a trait aux réserves exprimées par l'association France ADOT sur le registre national des refus de prélèvements (RNR), il convient de rappeler qu'il a été conçu par le législateur comme une contrepartie au régime actuel du consentement présumé - et non du consentement exprès - déterminé par la loi bioéthique du 29 juillet 1994. Soucieux de garantir la liberté individuelle face à ce principe général fondé sur la solidarité, le législateur a souhaité mettre à la disposition des citoyens un moyen fiable pour exprimer une éventuelle opposition à de tels prélèvements en créant le Registre national des refus de prélèvement. La mise en place de ce registre peut donc avoir un impact favorable sur le don en renforçant la confiance dans l'organisation du prélèvement. En effet, l'obligation de consultation du RNR avant tout prélèvement s'impose pour tous les établissements de santé et concourt à la transparence de cette activité. La carte de donneur peut également constituer une indication précieuse sur la volonté du décédé, mais subordonner le prélèvement au port d'une telle carte reviendrait à instaurer un régime de consentement exprès contraire à la loi précitée. Il n'en demeure pas moins qu'un tel document peut être utilisé notamment si une personne souhaite exprimer une acceptation du prélèvement limitée à certains éléments de son corps, dont elle peut également, bien entendu, informer ses proches.

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