Question de M. PEYRAT Jacques (Alpes-Maritimes - RPR) publiée le 24/01/2002

M. Jacques Peyrat appelle l'attention de M. le ministre des affaires étrangères sur l'insoutenable et l'intolérable situation dont sont victimes les femmes et les fillettes dans la région du nord du Liberia et souhaite lui relayer l'indignation d'Amnesty international face aux actes de violence commis à l'encontre de ces civils. En effet, alors que cette région connaît un climat de guerre intense, des exactions systématiques et flagrantes sont subies par les femmes et les fillettes, violées et torturées. Beaucoup d'entre elles sont détenues, frappées et menacées de représailles en cas de dépôt de plaintes, après avoir été chassées de chez elles et alors qu'elles tentaient de fuir les zones de combats, soupçonnées de soutenir les dissidents qui appartiendraient au Liberians United for Reconciliation and Democraty. Les nombreux témoignages font malheuresement craindre que ces violences sexuelles et physiques seraient utilisées à la fois par les soldats, les hauts responsables de l'armée mais aussi par les forces d'opposition, comme arme de guerre afin de semer la terreur dans la population civile. Il est regrettable que de tels actes puissent encore se perpétrer en toute impunité alors que de nombreux textes condamnent ces agissements, dont notamment l'article 3 des conventions de Genève de 1949 selon lequel le viol commis dans le cadre d'un conflit armé constitue un crime de guerre et même un crime contre l'humanité lorsqu'il est commis dans le cadre d'une attaque systématique ou généralisée contre la population civile, ou encore l'article 21 de la constitution libérienne qui dispose qu'aucune personne inculpée, arrêtée, assigné à résidence ou placée en détention ne doit faire l'objet d'aucune torture ni d'aucun traitement inhumain. Il invite donc le Gouvernement à intervenir auprès des autorités libériennes afin que ce pays respecte l'article 37 de la Convention internationale des droits de l'enfant qui protège les enfants de la torture et des traitements cruels, inhumains et dégradants, ainsi que la charte africaine des droits de l'homme et des peuples et la convention sur l'élimination de toutes les formes de discriminations à l'égard des femmes. Il souhaiterait également que le Gouvernement constate la responsabilité des forces de sécurité libériennes dans les exactions perpétrées contre les civils.

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Réponse du ministère : Affaires étrangères publiée le 07/03/2002

La France suit avec la plus grande attention l'évolution de la situation dans le nord du Liberia, où s'affrontent des forces gouvernementales et des factions rebelles. Elle est vivement préoccupée par les informations faisant état de violations des droits des populations civiles dans cette région, en particulier à l'encontre des femmes et des jeunes filles. Le Gouvernement français est intervenu auprès des autorités de Monrovia, à l'occasion de contacts bilatéraux, pour marquer sa préoccupation. La France a nommé récemment un attaché humanitaire en résidence à Monrovia. Ce dernier, chargé d'assurer la fonction essentielle de suivi de la situation humanitaire, pourra constituer un interlocuteur utile pour les ONG françaises sur place et relayer leurs préoccupations et leurs besoins éventuels. La France est sensible aux efforts de la société civile pour lutter contre ces violences et suit notamment avec attention l'initiative des femmes de la région du fleuve Mano en faveur du rétablissement de la paix. La France, avec ses partenaires de l'Union européenne, a notamment engagé, à Bruxelles le 9 novembre, et à Monrovia le 6 décembre, des consultations avec le Liberia au titre des articles 96 et 97 de l'accord de Cotonou. Il s'agit de rappeler l'attachement de l'Union européenne au respect des droits et des libertés publiques qui constituent des éléments essentiels de l'accord de Cotonou et de réévaluer les termes de la coopération communautaire. De façon générale, l'Union européenne milite en faveur de l'élimination de toutes les formes de violence à l'égard des femmes et des jeunes filles, en particulier dans le cadre de la commission des droits de l'homme et la commission de la condition de la femme. Ces deux instances ont adopté l'une et l'autre des résolutions sur la lutte contre ces atteintes à leurs droits fondamentaux. Enfin, s'il est du ressort de la justice de désigner les responsabilités, le Gouvernement français rappelle, dans toutes les instances internationales, les obligations des parties au conflit au regard du droit international humanitaire, notamment la quatrième convention de Genève de 1949 sur la protection des civils en cas de conflit, auquel le Liberia est partie. Il appelle tous les Etats à ratifier le statut de Rome - qui assimile le viol et d'autres violences sexuelles à des crimes de guerre et, dans certaines circonstances, à des crimes contre l'humanité . L'entrée en vigueur rapide de la Cour pénale internationale devrait mettre fin au sentiment d'impunité qui prévaut encore malheureusement dans les situations de conflit armé.

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