Question de Mme BIDARD-REYDET Danielle (Seine-Saint-Denis - CRC) publiée le 08/02/2002

Question posée en séance publique le 07/02/2002

Mme Danielle Bidard-Reydet. Monsieur le président, monsieur le Premier ministre, mesdames, messieurs les ministres, mes chers collègues, ma question s'adresse à M. le ministre des affaires étrangères et porte sur le Proche-Orient.
Chaque jour, le nombre des morts et des blessés s'accroît. Les violences se multiplient, le dialogue est rompu et la confiance mutuelle, détruite. Les Palestiniens, notamment les enfants, en sont les principales victimes les Israéliens ne sont pas épargnés.
Ariel Sharon, dont le programme électoral était la paix, la sécurité et la prospérité, est en échec sur tous ses objectifs. En représailles à des attentats contestables, il intensifie la répression. Loin de travailler au succès d'une solution politique comme celle qui a été élaborée à Oslo, il nourrit les ressentiments par la destruction massive de maisons palestiniennes, le blocage des territoires palestiniens et la poursuite de la colonisation.
Ariel Sharon vient d'approuver un plan isolant Jérusalem du reste de la Cisjordanie par des ouvrages défensifs sur un périmètre de cinquante-quatre kilomètres, renforcés par deux murailles de dix kilomètres. En y intégrant les colonies juives, le gouvernement israélien veut instituer un « grand Jérusalem » et affirmer son caractère israélien, contrairement au droit international et à toutes les résolutions des Nations unies. Loin d'établir la sécurité, ce dispositif ne ferait que susciter de nouveaux actes de désespoir.
Aujourd'hui même, le Premier ministre israélien se rend à Washington pour obtenir l'aide du président Bush afin d'isoler encore davantage Yasser Arafat et de faire porter sur lui seul la responsabilité de la situation actuelle. En le confinant à Ramallah, il l'empêche d'assumer toutes ses responsabilités. On peut même craindre pour la vie du dirigeant palestinien.
Cependant, des lueurs d'espoir apparaissent. En Israël, la popularité d'Ariel Sharon s'effrite. Les forces de paix, jusqu'alors très isolées, se renforcent. Des soldats israéliens, en nombre croissant, refusent d'aller occuper des territoires palestiniens. Avraham Burg, président de la Knesset, a rencontré, à Paris, le président du conseil législatif palestinien. Malgré l'interdit d'Ariel Sharon, il souhaite poursuivre le dialogue et se rendre à Ramallah. Shimon Peres décide, lui aussi, de rencontrer les Palestiniens.
Dans ce contexte, l'Europe semble vouloir mieux faire entendre sa voix. Elle confirme la légitimité de Yasser Arafat en évaluant à près de 14 millions d'euros les destructions d'établissements publics palestiniens qu'elle avait financés et elle envisage d'en adresser un bilan comptable aux Israéliens.
Face à la position américaine, l'Europe doit être à l'initiative pour faire aboutir la solution politique.
Nous apprécions la position et les propositions des autorités françaises.
M. le président. Venez-en à la question, je vous prie.
M. Alain Gournac. Ce n'est pas une question, c'est une déclaration !
Mme Danielle Bidard-Reydet. C'est pourquoi je vous demande, monsieur le ministre,...
M. Alain Gournac. La voilà, la question !
Mme Danielle Bidard-Reydet. ... d'intervenir auprès de l'Union européenne pour qu'elle contribue à conforter la légitimité de l'Autorité palestinienne, pour qu'elle obtienne, dans les plus brefs délais, l'envoi d'une force internationale de paix, sous l'égide de l'ONU, afin de protéger toutes les populations civiles, et pour qu'elle soutienne l'idée d'une conférence internationale réunissant tous les intéressés.

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Réponse du ministère : Affaires étrangères publiée le 08/02/2002

Réponse apportée en séance publique le 07/02/2002

M. Hubert Védrine, ministre des affaires étrangères. Madame la sénatrice, chacun, ici, connaît la situation au Proche-Orient. La France s'exprime souvent à ce sujet, de même que les quinze Etats membres de l'Union européenne.
Nous sommes tous profondément attachés à la sécurité d'Israël, mais nous pensons que la politique poursuivie à l'heure actuelle, qui est de pure répression, ne peut pas conduire à cette sécurité, et encore moins à une solution politique.
Nous l'avons dit, à Quinze, à plusieurs reprises, au niveau des ministres, des chefs d'Etat et de gouvernement : cette politique nous semble conduire à une impasse stratégique. Nous répétons donc constamment qu'il faudrait, tout en combattant le terrorisme, ce qui est légitime, rouvrir une négociation pour trouver une solution politique devant conduire, chacun le sait, à un Etat palestinien viable, pacifique et démocratique.
Il y a manifestement une différence d'approche, en ce moment, entre ce que souhaitent les Quinze de l'Union européenne et la politique actuellement conduite par l'Etat d'Israël ainsi que par les Etats-Unis, qui ont trop soutenu, à notre avis, cet aspect purement répressif de la politique israélienne.
Nous multiplions les initiatives. A ce titre, la France vient de mettre sur la table deux idées : le soutien au plan Peres-Abou Ala de reconnaissance de l'Etat palestinien précoce et la tenue d'élection. D'autres idées sont mises en circulation : conférences, plan Marshall, etc. L'essentiel serait de sortir de cette impasse.
Au moment où le Premier ministre israélien se rend à Washington, je voudrais exprimer ici l'espoir que le président Bush utilise l'immense autorité et l'immense influence des Etats-Unis pour trouver une solution politique.
Encore une fois, nous trouvons légitime et normal que les Etats-Unis appuient de tout leur poids la demande de sécurité du peuple israélien, nous sommes tous d'accord sur ce point. Nous restons cependant convaincus que, pour assurer la sécurité, il faut une vraie solution politique de fond, une solution durable. Si les Etats-Unis voulaient conforter les efforts actuels de l'Union européenne, cela pourrait amorcer un changement dans cette situation qui, pour l'instant, ne cesse de se dégrader.
Il faut accepter également de reprendre la négociation, de parler avec l'Autorité palestinienne, c'est-à-dire avec Yasser Arafat, à qui l'on doit redonner les moyens de jouer un rôle politique.

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