Question de M. DÉSIRÉ Rodolphe (Martinique - RDSE-R) publiée le 04/07/2002

M. Rodolphe Désiré attire l'attention de M. le ministre de l'économie, des finances et de l'industrie sur l'épineux problème des taux d'intérêts bancaires pratiqués dans les départements d'outre-mer. Comme chacun sait, le système bancaire est censé apporter aux entreprises un appui essentiel pour couvrir leurs besoins de financement. Le dynamisme et la compétitivité d'un pays se mesurent à la capacité qu'ont ses entreprises de bénéficier de ressources importantes et à des taux incitatifs, leur seul auto-financement ne pouvant suffire. Or on assiste à un mouvement inverse dans la mesure où le financement des entreprises se fait de plus en plus difficilement, les frais financiers, beaucoup plus importants dans les départements d'outre-mer qu'en métropole, étant en constante augmentation. A titre d'exemple, dans le cadre d'un découvert en compte courant, la banque facture, à titre d'intérêts, 2 à 5 points de plus que le taux de base bancaire. D'ailleurs, ce taux est lui-même supérieur à celui pratiqué en métropole puisqu'au 1er avril 2000 il s'élevait dans les DOM à 9,25 % alors que sur le continent il oscillait entre 5 et 6,30 %. Ajoutées aux difficultés d'accès au crédit, ces pratiques témoignent d'un dysfonctionnement du système bancaire local qui grève toute initiative des acteurs économiques, déjà démobilisés par l'absence d'un dispositif performant d'incitation fiscale à l'investissement. Compte tenu du fait que les banques martiniquaises sont financées au même taux par la Banque Centrale Européenne que les banques métropolitaines, la question est donc de savoir comment se justifie ce différentiel de taux. Pour chaque opération de financement (crédit d'exploitation courante, crédit de trésorerie, crédit d'investissement, crédit-bail, concours en fonds propres, crédit aux particuliers...) il s'agit de déterminer si les différentiels de taux s'expliquent davantage par les risques de crédit, les refinancements la politique de distribution des crédits, les comportements financiers des agents économiques et/ou la politique monétaire... En outre, il aimerait connaître le rôle de l'IEDOM (institut d'émission des départements d'outre-mer), de l'AFD (agence française de développement) ou d'autres institutions en la matière depuis la mise en place de la BCE (banque centrale européenne) et de l'Euro. Face à la gravité et à la persistance de la situation, il souhaiterait savoir quels engagements le gouvernement compte prendre pour résoudre le problème du financement des entreprises qui hypothèque lourdement les perspectives de développement durable des DOM, dont les spécificités et les handicaps structurels ont pourtant été reconnus au niveau européen.

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Réponse du Ministre de l'économie, des finances et de l'industrie publiée le 23/01/2003

La loi du 13 décembre 2000 d'orientation pour l'outre-mer prévoit la transmission au Parlement d'un rapport annuel sur la fixation des taux bancaires dans les départements d'outre-mer et sur les raisons de leur écart par rapport aux taux pratiqués en métropole. Le rapport, élaboré par l'Institut d'émission des départements d'outre-mer (IEDOM), pour l'année 2001 ainsi que les analyses publiées par cet institut confirment l'existence effective d'un surcoût du crédit dans les départements d'outre-mer qui concerne essentiellement les trois départements français d'Amérique et mettent en évidence une même cause : la persistance d'un niveau de risques moyens supérieur à celui de la métropole contraint les banques à provisionner davantage. Le coût de la ressource étant comparable entre les départements d'outre-mer et la métropole, les différentiels de taux ne sont pas liés à la politique monétaire ou aux modes de refinancement. Ils s'expliquent principalement par les risques de crédit et les coûts de gestion des établissements bancaires reflétés dans les marges appliquées par ces derniers. La part des créances douteuses dans les départements français d'Amérique dépasse ainsi 16,5 %, alors qu'elle est proche de 13 % en métropole (mais de 7,26 % à la Réunion). Par ailleurs, les écarts de taux de sortie du crédit entre les départements d'outre-mer et la métropole qui s'étaient atténués jusqu'en juillet 2001 se creusent en début 2002, la Martinique et la Guyane étant particulièrement touchées par ce phénomène (respectivement + 2,20 et + 3,24 points). S'agissant du rôle de l'IEDOM en la matière, le mécanisme du réescompte était l'outil majeur de son intervention en faveur du développement économique et social. Or ce mécanisme ne figure plus parmi les instruments à sa disposition depuis le 31 décembre 1999, compte tenu de l'intégration de l'IEDOM dans le système européen de banques centrales. L'IEDOM continue cependant à assurer vis-à-vis des entreprises un rôle d'information sur les contextes économiques et financiers des départements d'outre-mer et est en charge de la cotation des entreprises qui conditionne leur accès au crédit. Quant aux filiales de l'Agence française de développement, les sociétés départementales de crédit, celles-ci proposent des prêts aux entreprises (trésorerie, moyen et long terme) et assurent ainsi le financement des petites entreprises qui constituent l'essentiel du tissu économique et qui sont à l'origine de nombreuses créations d'emplois outre-mer. Ces filiales complètent ainsi l'offre bancaire en répondant à des besoins non pris en compte par le marché. Elles gèrent les fonds régionaux de participation dotés par l'Etat et dont l'objectif est de remédier à l'insuffisance chronique en fonds propres des petites entreprises d'outre-mer. L'Agence française de développement assure également des missions d'ingénierie financière et d'appui aux entreprises par la mise en place des structures de financement de capital-risque (projet Alyzé). Enfin, elle représente également la Banque de développement des petites et moyennes entreprises/le Crédit d'équipement aux petites et moyennes entreprises et gère, conjointement avec la SOFARIS, le fonds DOM, fonds de garantie des crédits bancaires aux entreprises. Enfin, pour ce qui est des projets du Gouvernement, des mesures seront prises afin de soutenir les économies des départements d'outre-mer et d'améliorer le financement des entreprises. Un nouveau dispositif de soutien fiscal à l'investissement sera en particulier inscrit dans le projet de loi programme pour l'outre-mer présenté par le Gouvernement au début de cette année.

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