Question de M. JOLY Bernard (Haute-Saône - RDSE) publiée le 16/10/2002

M. Bernard Joly attire l'attention de M. le ministre de l'intérieur, de la sécurité intérieure et des libertés locales sur les conséquences qui pourraient résulter de la réorganisation des forces de police, de gendarmerie et de gendarmerie mobile relativement au maintien du commissariat de police de la commune de Lure, sous-préfecture de la Haute-Saône. Afin de donner aux forces de sécurité intérieure les moyens nécessaires pour lutter plus efficacement contre la délinquance, il est prévu une réforme bâtie sur un état des lieux et une procédure de concertation dont les préfets ont été chargés au cours de l'été. Le calendrier annoncé prévoyait les arbitrages pour fin octobre. L'unité luronne, outre les activités classiques relatives à la sécurité et à la proximité, assume celle de brigade de recherches mais assure aussi un nombre important de missions pour le tribunal d'instance et de grande instance. La moitié des faits traités est directement liée au fonctionnement de cette juridiction. Après le repli de la présence de l'Etat dont les compensations n'ont pas été au niveau des engagements annoncés ces dernières années, la population de cette cité haut-saônoise comme les fonctionnaires de police s'interrogent sur l'avenir de l'un des plus petits commissariats de France dont la suppression induirait à plus ou moins longue échéance, vraisemblablement, celle du tribunal et de la sous-préfecture. Il lui demande de bien vouloir lui préciser quelle approche a été faite de la situation évoquée et en conséquence quelle décision en a résulté.

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Réponse du Ministère délégué aux libertés locales publiée le 23/10/2002

Réponse apportée en séance publique le 22/10/2002

M. Bernard Joly. Toute réforme, aussi fondée soit-elle, entraîne des interrogations quant aux conséquences de ses applications. Il en est ainsi s'agissant du commissariat de police de la commune de Lure, sous-préfecture de la Haute-Saône.
En s'adressant aux préfets, en juillet dernier, M. le ministre de l'intérieur, de la sécurité intérieure et des libertés locales a exposé la nécessaire réorganisation des forces de police, de gendarmerie et de gendarmerie mobile, visant à optimiser le potentiel d'action de celles-ci. Le message du premier tour de l'élection présidentielle a été entendu : la sécurité est bien la première des libertés, elle conditionne l'exercice des droits de l'homme.
Le premier texte soumis au Parlement avant l'été a permis de définir les mesures d'orientation et de programmation pour la sécurité intérieure. Un second texte nous sera proposé afin de mettre en place de nouvelles dispositions juridiques qui permettront de donner aux forces de sécurité intérieure les moyens de lutter plus efficacement contre la délinquance.
M. le ministre a indiqué que la réforme serait menée à partir de propositions émanant de la base et non pas bâtie selon des schémas imposés par les administrations centrales. Les préfets devaient recevoir au mois d'août les documents nécessaires pour dresser un état des lieux et engager la concertation. La centralisation des observations était prévue pour la mi-octobre, les arbitrages devant être rendus à la fin du même mois, après un travail conduit avec les directions générales de la police et de la gendarmerie.
Malgré cette transparence et cette démarche pragmatique, des inquiétudes se font jour et s'expriment. Elles se fondent sur des informations, vérifiées ou non, qui, néanmoins, s'accréditent au fil des jours. On rapporte ainsi que la tendance serait à la fermeture des petits postes, or le commissariat de Lure est l'un des plus petits de France.
Ce site a un effectif de quarante-cinq personnes ; sa modestie même le rend indispensable par son implication dans l'accomplissement des diverses missions qui lui sont confiées. Aux activités classiques relatives à la sécurité et à la proximité s'articulent celles de brigade de recherches et, enfin, d'administration pour le ministère public. Ce dernier aspect n'est pas le moindre, puisque, sur environ 700 faits traités par an, plus de la moitié sont directement liés au fonctionnement du tribunal d'instance et de grande instance de la commune. Pour apprécier le volume de l'ensemble des tâches confiées par la justice au commissariat, il convient de préciser que ce sont trois postes à plein temps qui y sont affectés en permanence.
Ce que redoutent les fonctionnaires de police, mais aussi la population, c'est « l'effet de dominos », où la chute de l'un entraîne celle de tous les autres : suppression du commissariat, puis du tribunal, puis de la sous-préfecture... Le souvenir du repli de la présence, notamment militaire, de l'Etat reste vif dans les esprits, et les compensations n'ont pas été au niveau des engagements pris.
Aussi, monsieur le ministre, ma question est-elle simple : quel est l'avenir du commissariat de police de Lure ?
M. le président. La parole est à M. le ministre délégué.
M. Patrick Devedjian, ministre délégué aux libertés locales. Monsieur Joly, la gendarmerie et la police sont désormais soumises à la même autorité, celle du ministre de l'intérieur, de la sécurité intérieure et des libertés locales. Cela conduit à un redéploiement affectant les zones de compétence respectives de la police et de la gendarmerie nationale.
M. Raymond Courrière. A des suppressions !
M. Patrick Devedjian, ministre délégué. En fait, la répartition actuelle date de 1941 et n'est plus adaptée, à l'évidence, à la situation que nous connaissons aujourd'hui. C'est la raison pour laquelle le redéploiement est nécessaire. Cependant, notre action, à la différence de celle que nos prédécesseurs avaient engagée,...
M. Raymond Courrière. Et la loi de M. Juppé ?
M. Patrick Devedjian, ministre délégué. ... s'accompagne d'une augmentation des effectifs (rires sur les travées socialistes),...
M. René-Pierre Signé. Pas dans les zones rurales !
M. Patrick Devedjian, ministre délégué. ... et non d'une diminution de ceux-ci.
Le but, monsieur le sénateur, c'est non pas de faire des économies de personnel, mais d'être plus cohérents et plus efficaces. La loi d'orientation et de programmation pour la sécurité intérieure, la LOPSI, prévoit, d'ici à 2007, 7 000 gendarmes et 6 500 policiers supplémentaires. Leur répartition doit s'effectuer de manière cohérente : quand on sait que le réseau radio de la gendarmerie et celui de la police ne peuvent pas communiquer entre eux (exclamations sur les travées du RPR), on mesure qu'il reste quand même quelques progrès à faire sur le plan de la cohérence de nos personnels de sécurité ! C'est précisément l'objectif du Gouvernement.
S'agissant des situations locales, il a été demandé aux préfets, par une circulaire en date du 25 septembre - vous avez parlé du mois d'août, monsieur Joly, mais nous avons pris un peu de retard - de les analyser et de les prendre en compte. Les choses seront déterminées au cas par cas sur le terrain et non pas depuis Paris. Il leur a été demandé également d'adresser leurs réponses pour le 15 novembre. Le délai n'est pas encore expiré, et les préfets continuent donc leurs travaux, notamment en matière de concertation.
Par conséquent, je peux vous assurer, monsieur Joly, qu'aucune décision n'a été prise à ce jour à Paris ni dans aucune région de France, parce que les informations qui ont été demandées aux préfets ne nous sont pas encore parvenues. S'agissant, en particulier, du commissariat de Lure, une décision ne sera arrêtée qu'au vu de la concertation et de l'analyse qui auront été menées localement, monsieur le sénateur.
M. Réné-Pierre Signé. Il n'a pas l'air convaincu ! (Sourires.)
M. le président. La parole est à M. Bernard Joly.
M. Bernard Joly. Je vous remercie, monsieur le ministre, des assurances que vous venez de me donner : pour l'heure, aucune décision n'est donc prise.
Je crois avoir compris que vous hésitiez entre accroître les effectifs de la gendarmerie et augmenter ceux de la police : ma foi, dans un cas comme dans l'autre, nous serons satisfaits !

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