Question de M. PIRAS Bernard (Drôme - SOC) publiée le 10/10/2002

M. Bernard Piras attire l'attention de M. le ministre des affaires étrangères sur la situation de Mme Amina Lawal, ressortissante nigérienne, condamnée par le tribunal de la charia à Bakori à la peine de mort par lapidation pour avoir eu un enfant hors mariage, peine confirmée par la cour d'appel de Funtua le 19 août 2002. Pour des raisons humaines et de morale, une telle décision est bien évidemment inacceptable, et notre pays, patrie des droits de l'homme, doit intervenir pour faire part au Nigeria de l'indignation internationale que suscite une telle décision. Une intervention est d'autant plus justifiée que, pour les raisons suivantes, un espoir demeure : Mme Safiya Husseini Tungar, initialement condamnée pour les mêmes motifs, a été acquittée le 25 mars dernier ; les voies de recours en faveur de Mme Lawal ne sont pas épuisées ; le ministre de la justice du Nigeria a déclaré inconstitutionnelle l'application de la charia en matière pénale. Il lui demande de lui indiquer les initiatives que le gouvernement français a déjà prises ou entend prendre afin que les droits fondamentaux de l'homme soient sauvegardés.

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Réponse du Ministère des affaires étrangères publiée le 19/12/2002

Mme Amina Lawal, reconnue coupable d'adultère, a été condamnée à mort par lapidation dans l'Etat de Katsina, en application de la loi coranique instaurée dans cet Etat fédéré. Sa sentence a été confirmée le 19 août par la cour islamique de Funtua (Etat de Katsina). Pour sa défense, Mme Lawal reçoit une assistance légale d'une équipe d'avocats honorablement connue. Le président Obasanjo s'est prononcé publiquement contre l'application de peines inhumaines telles que la lapidation. Selon les informations fournies à l'ambassade de France au Nigeria, les procédures d'appel ne sont pas épuisées. Au lendemain de la confirmation de la sentence par la cour islamique de Funtua, les avocats de Mme Lawal ont déposé un nouveau recours. Ils peuvent encore saisir la cour fédérale de Kaduna, chargée de l'application du code pénal dans le nord du pays, puis, le cas échéant, la cour fédérale suprême, responsable de l'application du code criminel de la fédération et qui fonde ses jugements sur les grands préceptes internationaux reconnus en matière de droits de l'homme. Le gouverneur de l'Etat de Sokoto peut user du droit de grâce dont il dispose, après épuisement des procédures judiciaires. La France reste pleinement mobilisée sur le cas de Mme Lawal. Par la voix du porte-parole du ministère des affaires étrangères, le Gouvernement a appelé, le 20 août dernier, les autorités nigérianes à la clémence. La France a également exprimé, à cette occasion, le souhait que cette affaire connaisse le même heureux dénouement que celle de Mme Husseini Tungar, autre jeune femme initialement condamnée pour les mêmes motifs, en faveur de laquelle la France et ses partenaires de l'Union européenne s'étaient aussi mobilisés. Le ministre a également fait part de sa préoccupation au Président Obasanjo lors d'un entretien en marge de la 57e assemblée générale des Nations unies, le 13 septembre dernier. Par déclaration de la présidence européenne, le 21 août, l'Union européenne a fait état de sa profonde préoccupation et souhaité que Mme Lawal puisse exercer tous les recours disponibles au niveau fédéral. Le cas particulier de Mme Lawal a également inspiré une déclaration au niveau ministériel lors du conseil de l'Union européenne, le 30 septembre, appelant avec force les gouvernements concernés à l'abolition de la peine de mort et à l'arrêt immédiat de la lapidation ou de toute autre forme de châtiment cruel et inhumain.

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