Question de M. BIWER Claude (Meuse - UC) publiée le 28/11/2002

M. Claude Biwer demande à M. le ministre de l'économie, des finances et de l'industrie de bien vouloir préciser la suite que le Gouvernement envisage de réserver à l'une des recommandations formulées par le conseil des impôts dans son rapport pour l'année 2002 remis au Président de la République visant, dans l'attente d'un passage à terme à la retenue à la source pour la perception de l'impôt sur le revenu, à " supprimer à court terme le décalage d'un an entre la perception des revenus et leur imposition ", ce qui permettrait l'établissement de l'impôt sur le revenu sur les revenus de l'année en cours et non, comme c'est le cas à l'heure actuelle, sur ceux de l'année précédente.

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Réponse du Ministère délégué au commerce extérieur publiée le 05/02/2003

Réponse apportée en séance publique le 04/02/2003

M. le président. La parole est à M. Claude Biwer, auteur de la question n° 111, adressée à M. le ministre de l'économie, des finances et de l'industrie.
M. Claude Biwer. Monsieur le président, monsieur le ministre, mes chers collègues, alors que certaines voix de l'ancienne majorité s'étaient prononcées vigoureusement en faveur de l'instauration de la retenue à la source pour le paiement de l'impôt sur le revenu, l'actuel gouvernement a cru devoir, au contraire, renoncer provisoirement à l'application d'une telle réforme. Mais, parmi les arguments avancés, certains ne résistent pas à un examen sérieux, et encore moins à des comparaisons internationales.
« Les Français, dans leur majorité, ne sont pas favorables à l'introduction de la retenue à la source » : les résultats de l'enquête réalisée sur ce sujet, à la demande du conseil des impôts, nous apprennent, il est vrai, que 51 % de nos compatriotes déclarent préférer le système actuel du paiement par tiers provisionnels. Or, d'après la même étude, 54 % d'entre eux ont d'ores et déjà adhéré à la mensualisation !
Cette contradiction s'explique par le fait que, en réalité, les Français ne sont pas informés des avantages ou des inconvénients que présente la retenue à la source. Ainsi, 55 % d'entre eux croient que l'impôt demeurerait calculé sur les revenus de l'année précédente, ce qui est bien évidemment erroné.
D'après cette étude, « la retenue à la source pose des problèmes techniques et entraînera de nouvelles charges pour les banques et les entreprises. » C'est sans doute vrai, mais la plupart de nos voisins européens ont adopté - et pour certains depuis fort longtemps - la retenue à la source et, non seulement les problèmes techniques ont été surmontés, mais il n'a pas été porté à notre connaissance que leurs banques ou leurs entreprises aient périclité !
Dernier argument, certes non officiellement évoqué : « l'hostilité des syndicats de personnels du ministère de l'économie et des finances » : c'est, selon moi, l'argument le moins important. En effet, la politique consiste, non pas à défendre des intérêts catégoriels, mais à travailler en faveur de l'intérêt général.
Dans la mesure où le Gouvernement a cru devoir ne pas mettre en place la retenue à la source, je souhaite qu'il réserve au minimum une suite favorable à l'une des recommandations émises par le conseil des impôts, à savoir la suppression du décalage d'un an entre la perception des revenus et leur imposition, comme cela se pratique déjà pour l'impôt sur les sociétés.
Cette formule consisterait à prendre comme assiette le revenu de l'année courante et non plus celui de l'année précédente avec, bien sûr, une régularisation en fin d'année. Une telle formule aurait comme avantage de supprimer le décalage d'un an, qui est favorable, certes, aux contribuables dont les revenus augmentent, mais très défavorable lorsque ceux-ci viennent à diminuer.
Ce décalage peut même constituer une véritable gêne, voire empêcher l'acquittement normal de l'impôt lorsque les revenus courants supportant la charge fiscale subissent une diminution très forte, en cas de chômage ou de mise à la retraite par exemple.
Une telle réforme constituerait, selon moi, une étape importante en direction de la retenue à la source, tout en n'impliquant pas, dans un premier temps, les employeurs dans la collecte de l'impôt.
De plus, il me paraîtrait également normal de récompenser les contribuables qui acceptent de payer leur impôt sur le revenu par mensualités automatiquement prélevées : pourquoi ne pas leur consentir un abattement d'impôt, dont le montant pourrait être fixé en loi de finances ?
Par ailleurs, monsieur le ministre, nos compatriotes sont quelquefois étonnés d'apprendre, en se rendant à leur perception, qu'ils ne peuvent y obtenir de formulaires leur permettant de remplir leur déclaration de revenus. Même si cette réflexion est connexe au sujet que je souhaitais aborder aujourd'hui, elle démontre, s'il en était besoin, combien la réforme de l'Etat passe également par une profonde réforme du ministère de l'économie et des finances.
Il faut réconcilier les Français avec l'impôt sur le revenu. Cela passe, me semble-t-il, par une simplification du mode de calcul de cet impôt, en le faisant dorénavant asseoir sur les revenus de l'année en cours et en récompensant les contribuables qui font l'effort de se mensualiser.
J'ose espérer que le Gouvernement réservera, dès que possible, une suite favorable à ces réflexions.
M. le président. La parole est à M. le ministre délégué.
M. François Loos, ministre délégué au commerce extérieur. Monsieur le sénateur, vous avez abordé la question du décalage entre la perception du revenu et le paiement de l'impôt sur le revenu, notamment pour les personnes qui constatent une baisse de leur revenu d'une année sur l'autre.
A l'instar de ce qui se pratique dans la plupart des pays de l'OCDE, une piste pourrait consister à prélever l'impôt à la source, c'est-à-dire dès le paiement du revenu. Cette solution a fait l'objet d'une étude approfondie, aux termes de laquelle il apparaît que cette réforme présenterait, certes, des avantages, mais également de nombreux inconvénients. En particulier, la retenue à la source ne dispenserait pas les contribuables de souscrire une déclaration annuelle ; elle se traduirait également par des charges supplémentaires pour les entreprises et poserait de sérieuses difficultés de mise en place, difficultés que vous avez vous-même évoquées.
Dès lors, un simple aménagement des modalités de recouvrement de l'impôt consistant à supprimer le décalage d'un an entre la déclaration et le paiement de l'impôt pourrait constituer une solution. Cette solution, que vous souhaitez voir retenue, est également suggérée par le conseil des impôts dans son vingtième rapport au Président de la République. Elle éviterait, notamment, le transfert aux entreprises de la charge administrative liée au paiement de l'impôt.
Nous avons demandé à nos services de lancer très rapidement une étude approfondie sur cette proposition, qui permettrait de rapprocher l'année de perception de l'impôt de celle de la perception des revenus. Il convient, en effet, de s'assurer de la faisabilité de cette mesure, de vérifier qu'elle ne génère pas des complexités excessives pour le contribuable et d'examiner comment résoudre le difficile problème de l'année de transition entre les deux systèmes.
Nous prenons note, bien sûr, de toutes vos propositions, mais je ne suis pas sûr que celle qui consiste à verser un bonus au contribuable soit conforme à la Constitution.
Sans préjuger la suite qui pourra être donnée à cette étude, nous avons décidé de privilégier dès maintenant deux axes d'amélioration du recouvrement de l'impôt sur le revenu qui sont réellement de nature à simplifier les formalités à la charge des contribuables et qui vont dans le sens que vous souhaitez, monsieur le sénateur. Le premier consistera à renforcer l'incitation au paiement mensuel de l'impôt : le processus de gestion de la mensualisation fait d'ores et déjà partie de ceux qui ont été retenus pour faire l'objet d'une démarche de réingénierie, qui a commencé en décembre dernier. Le second visera à mettre en oeuvre un système déclaratif simplifié au travers de l'instauration de la déclaration préremplie par l'administration. Notre objectif, en termes de calendrier pour la déclaration préremplie, est que celle-ci soit mise en oeuvre en 2005, au titre des revenus perçus en 2004.
Vous le constatez : des améliorations sont prévues. Le ministère des finances a bien compris qu'il était au coeur de la réforme de l'Etat.
M. le président. La parole est à M. Claude Biwer.
M. Claude Biwer. Monsieur le ministre, je prends note de l'orientation que vous souhaitez développer et qui va, me semble-t-il, dans le bon sens. En tant qu'élu frontalier, je constate que les pratiques sont très différentes d'un pays à l'autre et je souhaite voir se rapprocher certains principes.

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