Question de M. DEMERLIAT Jean-Pierre (Haute-Vienne - SOC) publiée le 15/01/2003

M. Jean-Pierre Demerliat attire l'attention de M. le ministre de la fonction publique, de la réforme de l'Etat et de l'aménagement du territoire sur la prise en charge des traitements et charges sociales des agents qui exercent un mandat syndical dans les petites collectivités locales. Dans les collectivités de plus de cinquante agents, les centres de gestion remboursent le traitement et les charges sociales des agents désignés par les organisations syndicales pour bénéficier de décharges d'activités de service ou d'autorisations spéciales d'absence. Dans les collectivités de moins de cinquante agents, où les autorisations spéciales d'absence font l'objet d'une répartition entre les différentes organisations syndicales qui désignent parmi les agents de ces collectivités ceux qui les représentent, aucun remboursement n'est obligatoire. Ainsi donc, toute désignation d'agent par une organisation syndicale induit une charge extrêmement lourde pour les petites communes : elles doivent non seulement supporter le paiement du traitement et des charges du fonctionnaire en question mais également financer son remplacement. Il demande donc quelles mesures pourraient être envisagées afin que la prise en charge de l'exercice du droit syndical n'obère pas les finances des petites collectivités.

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Réponse du Ministère de la fonction publique, de la réforme de l'Etat et de l'aménagement du territoire publiée le 26/02/2003

Réponse apportée en séance publique le 25/02/2003

M. Jean-Pierre Demerliat. Monsieur le président, monsieur le ministre, mes chers collègues, dans le cadre de l'exercice du droit syndical au sein de la fonction publique territoriale, les agents peuvent bénéficier de congés de formation syndicale, de décharges d'activité de service et d'autorisations spéciales d'absence.

Les autorisations spéciales d'absence sont accordées aux représentants syndicaux mandatés pour participer aux congrès ou aux réunions statutaires d'organismes directeurs des organisations syndicales. Le volume de ces autorisations spéciales est calculé au niveau des collectivités elles-mêmes pour celles de cinquante agents et plus et au niveau des centres de gestion pour les collectivités de moins de cinquante agents.

Il peut arriver que, parce qu'ils sont permanents syndicaux à plein temps, des agents cumulent décharges d'activité de service et autorisations spéciales d'absence. Si, en vertu de l'article 100 de la loi n° 84-53 du 26 janvier 1984 portant dispositions statutaires relatives à la fonction publique territoriale, les centres de gestion sont tenus de rembourser aux collectivités les charges salariales de toute nature afférentes aux décharges d'activité de service, les autorisations spéciales d'absence prévues à l'article 14 du décret n° 85-397 du 3 avril 1985, qui font également l'objet d'une répartition entre les organisations syndicales, n'entraînent pas, elles, de remboursement de la part des centres de gestion et ce, quel que soit le nombre d'agents employés par les collectivités ou les établissements.

Les communes de moins de cinquante agents, surtout les plus petites d'entre elles, connaissent de graves difficultés car les absences fréquentes des agents ne sont pas prises en charge et la commune doit faire face seule à leur remplacement.

Afin d'illustrer mon propos, permettez-moi de présenter un exemple précis : une petite commune de la Haute-Vienne, comptant deux cents habitants, employait une secrétaire de mairie et un agent d'entretien. La désignation de la secrétaire de mairie comme permanent à temps complet par une organisation syndicale handicape financièrement cette commune, car une large partie du temps consacré à l'activité syndicale de cet agent est constituée par des autorisations spéciales d'absence. Cette petite commune, dont la capacité financière est faible, doit donc prendre à sa charge la rémunération et les charges sociales de la fonctionnaire en question correspondant aux autorisations spéciales d'absence. Elle doit de surcroît payer le salaire et les charges de sa remplaçante afin d'assurer la continuité du service.

Une telle situation a bien évidemment des répercussions importantes sur le budget de cette commune qui ne peut supporter ces dépenses de fonctionnement supplémentaires, que les contribuables estiment par ailleurs injustifiées.

Jusqu'à présent, il n'est pas prévu de remboursement par les centres de gestion pour les autorisations spéciales d'absence, car celles-ci sont habituellement peu nombreuses et de courte durée. Mais il peut arriver, nous venons de le voir, qu'elles constituent une partie importante de la décharge syndicale totale d'un agent.

Le législateur, à l'époque, n'avait pas prévu une telle utilisation des autorisations spéciales d'absence. Aujourd'hui, étant donné les habitudes prises, il me paraît indispensable de vous demander de bien vouloir faire en sorte que les textes soient modifiés afin que les contribuables de nos plus petites collectivités n'aient pas à assumer des charges qui ne leur incombent pas. Il est bien entendu qu'il ne s'agit pas pour moi ici de porter atteinte à l'exercice du droit syndical, droit pour lequel nous nous sommes presque tous battus.

M. le président. La parole est à M. le ministre.

M. Jean-Paul Delevoye, ministre de la fonction publique, de la réforme de l'Etat et de l'aménagement du territoire. Monsieur le sénateur, l'article 14 du décret n° 85-397 du 3 avril 1985 relatif à l'exercice du droit syndical dans la fonction publique territoriale, modifié par le décret n° 94-191 du 4 mars 1994, prévoit que des autorisations spéciales d'absence sont accordées aux représentants syndicaux mandatés pour participer aux congrès ou aux réunions statutaires d'organismes directeurs des organisations syndicales d'un autre niveau que ceux qui sont indiqués à l'article 13 du décret. Ces autorisations sont délivrées dans la limite d'un contingent global d'autorisations spéciales d'absence déterminé, chaque année, à raison d'une heure d'autorisation spéciale d'absence pour 1 000 heures de travail effectuées par l'ensemble des agents.

Chaque collectivité territoriale ou établissement public employant au moins cinquante agents calcule, selon ce barème appliqué au nombre d'heures de travail effectuées par les agents employés dans cette collectivité ou cet établissement, un contingent global qui est réparti entre les organisations syndicales qui ont obtenu des suffrages pris en compte pour la répartition des sièges au Conseil supérieur de la fonction publique territoriale, et ce proportionnellement au nombre de voix obtenues au comité technique paritaire de la collectivité ou de l'établissement.

Pour les collectivités et établissements employant moins de cinquante agents, le centre de gestion calcule, selon le même barème appliqué au nombre d'heures de travail effectuées par le total des agents employés par ces collectivités et établissements, un contingent global qui est réparti entre les organisations syndicales ayant obtenu des sièges au Conseil supérieur de la fonction publique territoriale, proportionnellement au nombre de voix obtenues au comité technique paritaire placé auprès du centre de gestion.

Les agents bénéficiaires sont désignés par les organisations syndicales parmi leurs représentants en activité dans la collectivité ou l'établissement concerné ou, en cas d'application des dispositions concernant les collectivités et établissements employant moins de cinquante agents, dans ces collectivités et établissements.

Ainsi, quel que soit le nombre d'agents employés par une collectivité ou un établissement, les dépenses exposées au titre des autorisations spéciales d'absence ne font pas l'objet d'un remboursement obligatoire par les centres de gestion.

Ceux-ci remboursent déjà une grande part des dépenses relatives à l'exercice du droit syndical dans les collectivités affiliées. En effet, en application de l'article 100 de la loi n° 84-53 du 26 janvier 1984, ils doivent leur rembourser les charges salariales de toute nature afférentes aux décharges d'activité de service.

Ce système de remboursement ne s'applique pas aux autorisations spéciales d'absence dans la mesure où celles-ci portent, par nature, sur des périodes de temps plus limitées.

L'institution d'un dispositif de remboursement de ces charges financières par les centres de gestion constituerait une nouvelle mission obligatoire pour ces établissements publics et ne pourrait donc résulter que d'une modification législative. L'opportunité d'engager une telle réforme doit être évaluée au regard des coûts générés et de la cohérence d'ensemble du régime d'affiliation aux centres de gestion, notamment dans le cas où le dispositif de remboursement ne concernerait que les collectivités employant moins de cinquante agents.

M. le président. La parole est à M. Jean-Pierre Demerliat.

M. Jean-Pierre Demerliat. Monsieur le ministre, vous avez, me semble-t-il, ouvert une piste pour résoudre ce problème qui, s'il ne concerne pas beaucoup de communes, peut les concerner toutes.

Aucune commune, surtout pas les plus petites, n'est à l'abri de ce qui constitue une véritable catastrophe financière. Ainsi la commune de la Haute-Vienne à laquelle je faisais référence doit prélever 62 000 euros, soit presque 410 000 francs, sur ses fonds propres pour compenser les autorisations spéciales d'absence.

Si ce risque était mutualisé pour les collectivités de moins de cinquante agents, le surcoût de cotisation serait 150 euros par an pour une commune de 800 habitants. La mise en place d'une telle assurance, dont le coût n'est certes pas négligeable, vaudrait néanmoins la peine d'être étudiée.

Monsieur le ministre, je me rapprocherai de vos services pour examiner la possibilité de résoudre ce problème, peut-être en déposant un amendement à l'occasion d'un autre texte, à condition, bien évidemment, que les collectivités, que vous connaissez aussi bien que moi de par les responsabilités que vous avez exercées, soient en majorité d'accord pour que nous allions dans ce sens.

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