Question de M. OUDIN Jacques (Vendée - UMP) publiée le 26/02/2003

M. Jacques Oudin attire l'attention de Mme la ministre déléguée à l'industrie sur les dispositions concernant l'implantation des éoliennes et la protection de l'environnement adoptées par le Sénat le 24 octobre 2002. Ce texte visait à préciser les conditions d'implantation des éoliennes et avait pour objet de réintégrer les éoliennes dans le droit commun de l'urbanisme. Ses principales dispositions ont été reprises au sein de la loi n° 2003-8 du 3 janvier 2003 relative aux marchés du gaz et de l'électricité et au service public de l'énergie. Les projets d'implantation d'éoliennes connaissent un fort développement depuis un an conduisant à une certaine spéculation concernant la réservation de sites pour leur implantation. Or ces sites sont souvent situés dans les zones littorales ou montagneuses qui relèvent de mesures de protection spécifiques prévues par la loi Montagne n° 85-30 du 9 janvier 1985 et la loi Littoral n° 86-2 du 3 janvier 1986. Cette spéculation tient à la rentabilité de ces installations maintenue artificiellement à un niveau élevé grâce à l'obligation d'achat imposée à EDF par l'article 10 de la loi n° 2000-108 du 10 février 2000 relative à la modernisation et au développement du service public de l'électricité et par l'arrêté tarifaire du 8 juin 2001. Selon la Commission de régulation de l'énergie, le niveau de ces tarifs se situerait " très au-dessus de toutes les estimations raisonnables des coûts de revient de la filière éolienne ". En conséquence, il demande au Gouvernement s'il envisage une modification prochaine du régime de tarification applicable à la vente de l'énergie éolienne permettant de concilier le soutien au développement de cette source d'énergie et le fonctionnement normal du marché de l'énergie.

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Réponse du Secrétariat d'Etat aux petites et moyennes entreprises, au commerce, à l'artisanat, aux professions libérales et à la consommation publiée le 09/04/2003

Réponse apportée en séance publique le 08/04/2003

M. Jacques Oudin. Je souhaite attirer l'attention du Gouvernement sur les dispositions concernant l'implantation des éoliennes et la protection de l'environnement adoptées par le Sénat le 24 octobre 2002 et reprises dans la loi n° 2003- 8 du 3 janvier 2003 relative aux marchés du gaz et de l'électricité et au service public de l'énergie.

Les projets d'implantation d'éoliennes connaissent actuellement un fort développement, ce qui suscite une importante spéculation concernant la réservation des sites. Or ces sites, par définition venteux, sont souvent situés dans les zones littorales ou montagneuses qui relèvent de mesures de protection spécifiques prévues par la loi Montagne n° 85-30 du 9 janvier 1985 et la loi Littoral n° 86-2 du 3 janvier 1986.

Cette spéculation tient essentiellement au fait que la rentabilité de ces installations est maintenue artificiellement à un niveau élevé grâce à l'obligation d'achat imposée à EDF par l'article 10 de la loi n° 2000-108 du 10 février 2000 relative à la modernisation et au développement du service public de l'électricité et par l'arrêté tarifaire du 8 juin 2001. Selon la Commission de régulation de l'énergie, la CRE, le niveau de ces tarifs se situerait « très au-dessus de toutes les estimations raisonnables des coûts de revient de la filière éolienne ». Concrètement, il s'agit de 4,42 centimes d'euro, soit près de quatre fois le prix de rentabilité ou de production de l'électricité normale par EDF.

Compte tenu des perspectives de développement des éoliennes, à ce tarif-là, la charge finale pour la nation sera à long terme, considérable.

Dans ces conditions, je vous demande, monsieur le secrétaire d'Etat, si vous entendrez suivre la Commission de régulation de l'énergie qui, dans l'avis rendu au Gouvernement, suggère l'abandon de ce mécanisme d'achat de l'électricité au profit de la procédure normale d'appel d'offres prévue par la loi du 10 février 2000. Le Gouvernement envisage-t-il de modifier prochainement le régime de tarification applicable à la vente de l'énergie éolienne, permettant ainsi de concilier à la fois le soutien au développement de cette source d'énergie, qui est sympathique, et le fonctionnement normal du marché de l'énergie, qui est nécessaire ?

M. le président. La parole est à M. le secrétaire d'Etat.

M. Renaud Dutreil, secrétaire d'Etat aux petites et moyennes entreprises, au commerce, à l'artisanat, aux professions libérales et à la consommation. Monsieur le sénateur, je vous prie de bien vouloir excuser Mme Fontaine, qui m'a prié de vous transmettre sa réponse.

Le développement des énergies renouvelables, dont l'énergie éolienne, et la diversification des modes de production figurent parmi les objectifs communs à la politique énergétique française et à la politique énergétique de l'Europe.

La directive 2001/77/CE du 27 septembre 2001 relative à la promotion de l'électricité produite à partir de sources d'énergie renouvelables dispose ainsi que chaque Etat membre adopte un objectif indicatif national de contribution des énergies renouvelables à sa consommation d'électricité et met en oeuvre toutes les mesures nécessaires pour le réaliser.

Dans ce contexte, la France a adopté un système voisin d'obligation d'achat dans la loi du 10 février 2000 que vous avez citée.

Des dispositifs voisins ont également été mis en place ailleurs en Europe. A titre de comparaison, le tarif d'achat de l'énergie éolienne fixé par l'arrêté du 8 juin 2001 est de même niveau que les tarifs issus des réglementations d'autres Etats membres, en particulier les tarifs allemand et espagnol, qui ont contribué à faire de ces deux pays les deux premiers producteurs mondiaux d'électricité d'origine éolienne.

Ces mesures tarifaires apparaissent, au regard de ces comparaisons, équilibrées. Elles permettent à la fois d'assurer une juste rentabilité pour les installations et de limiter l'effort de la collectivité. Elles sont fortement dégressives dans le temps pour prendre en compte les progrès de la filière.

Le soutien de la filière éolienne en France, dont le contenu en emplois nationaux est tangible, permettra, par ailleurs, dedévelopper une industrie aujourd'hui naissante, d'améliorer sa compétitivité et ainsi de favoriser le développement de l'offre des industriels français en Europe.

Le Gouvernement est toutefois soucieux de limiter les impacts tarifaires qui pourraient résulter d'un développement incontrôlé de l'éolien. Afin d'assurer l'application stricte du dispositif d'obligation d'achat, l'article 10 de la loi du 10 février 2000 a été modifié dans la loi du 3 janvier 2003 relative aux marchés du gaz et de l'électricité et au service public de l'énergie instaurant une distance minimale entre deux parcs éoliens, afin d'éviter un découpage artificiel des parcs dans le seul but de respecter le seuil de 12 mégawatts au-dessus duquel l'obligation d'achat ne s'applique plus.

Pour contrôler le développement de la filière éolienne, la loi du 10 février 2000 dispose également que, si la capacité de production installée dépassait les objectifs prévus par la future programmation pluriannuelle des investissements, le Gouvernement pourrait suspendre l'obligation dans ce domaine.

Enfin, la circulaire aux préfets sur la promotion de l'énergie éolienne terrestre, qui est en préparation, précisera les modalités d'implantation des parcs éoliens, dans le respect des mesures de protection de l'environnement prévues par le législateur.

M. le président. La parole est à M. Jacques Oudin.

M. Jacques Oudin. Monsieur le secrétaire d'Etat, nous sommes tous favorables au développement des énergies renouvelables, mais la comparaison avec l'Allemagne et l'Espagne, permettez-moi de vous le dire, n'est pas tout à fait pertinente !

En effet, la France est le champion en Europe d'une autre énergie renouvelable, je veux dire l'énergie hydraulique, qui compte pour une proportion considérable dans l'ensemble de la production d'énergie. Nous devrions donc considérer le développement de l'énergie éolienne, certes, au regard des engagements que nous avons pris à Kyoto et ailleurs, mais aussi peut-être avec le souci de limiter les charges publiques.

Car, monsieur le secrétaire d'Etat, qui paie la surcharge tarifaire pour l'énergie éolienne ? Tous les consommateurs ! Si vous aviez donné au Sénat les estimations concernant le coût supporté à terme par la nation à cause de cette surtarification, tous nos collègues auraient été effrayés. Cela se chiffre en milliards ! Je préfère, moi, que ces milliards soient utilisés ailleurs !

Nous avons le plus grand respect pour le développement d'une telle énergie ; mais nous devons garder à l'esprit le fait que les éoliennes seront implantées dans les sites les plus sensibles.

Le champ éolien le plus important de France, implanté chez moi, doit commencer à fonctionner dans quelques semaines. Une éolienne, monsieur le secrétaire d'Etat, mes chers collègues, c'est soixante-dix mètres de mât, plus trente mètres de pales, soit cent mètres de hauteur totale ! Dans une zone sensible protégée au titre de Natura 2000, tout cela est un peu contradictoire !

Certes, nous souhaitons le développement de cette énergie, mais nous ne souhaitons pas moins la protection de l'environnement, raison pour laquelle, monsieur le secrétaire d'Etat, il faut concilier toutes les considérations qui précèdent avec les propositions, pleines de sagesse, de la Commission de régulation de l'énergie. J'invite donc le Gouvernement à réexaminer les modalités du financement de l'énergie éolienne en France.

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