Question de M. HÉRISSON Pierre (Haute-Savoie - UMP) publiée le 13/02/2003

M. Pierre Hérisson appelle l'attention de M. le Premier ministre sur les conséquences induites par les négociations mondiales et les directives européennes engageant la libéralisation progressive des services publics. En effet, les négociations actuellement en cours au sein de l'Organisation mondiale du commerce sur l'accord général sur le commerce des services pourraient constituer, selon certains, une menace sérieuse pour la pérennité des services publics français. Cet accord, dans le cadre d'un processus irréversible, demanderait aux pays signataires de négocier périodiquement jusqu'à la privatisation de l'ensemble des secteurs de service, exceptés ceux de la défense, la justice, la police et l'état civil qui resteraient des services publics. En outre, le traité de Rome affirmant les principes de libre échange et de concurrence, organise également à son niveau une soumission des services publics aux lois du marché. L'exemple de La Poste qui tente de se restructurer pour survivre est éloquent en la matière, mais d'autres services pourraient subir le même sort. Aussi, il lui demande de bien vouloir lui apporter des précisions sur les services publics qui seraient à ce jour visés par ce processus irréversible et de lui indiquer quelle sera la position de la France sur leur éventuelle libéralisation.

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Transmise au Ministre de l'économie, des finances et de l'industrie


Réponse du Ministre de l'économie, des finances et de l'industrie publiée le 10/04/2003

De nouvelles négociations sur les services sont engagées, depuis le 1er janvier 2000 à l'Organisation mondiale du commerce (OMC), et ont été incorporées dans la négociation globale de l'agenda du développement de Doha. Ces négociations ont été engagées sur la base de l'article XIX de l'accord général sur le commerce des services (AGCS) qui prescrit des séries de négociations successives, ayant notamment pour objectif de promouvoir les intérêts de tous les participants sur une base mutuelle, sans objectif final autre. Lors des précédentes négociations du cycle d'Uruguay, qui ont amené pour l'essentiel la consolidation du droit alors existant, l'Union européenne a fait figurer dans son offre une disposition précisant que, dans tous les Etats membres, les services considérés comme services publics sur le plan national ou local peuvent faire l'objet de monopoles publics ou de droits exclusifs réservés à des fournisseurs privés. L'offre de libéralisation de l'Union n'a comporté d'engagements que dans le secteur privé, concurrentiel et marchand à l'exclusion de l'ensemble du service public. Elle a en outre consolidé à l'OMC les dispositions déjà en vigueur au titre de notre droit et qui permettent à des prestataires de services originaires de pays tiers de s'installer ou d'exercer dans notre pays, sous certaines conditions très précises (exigences de qualification, de déontologie, par exemple ; limitations quantitatives dans le secteur de la santé, afin de préserver nos instruments de régulation de l'offre). L'AGCS n'exclut a priori aucun secteur. Alors que dans un certain nombre de cas, des activités se partagent entre services publics et services privés, l'exclusion formelle des services publics requerrait un consensus sur le champ dont la définition serait difficile à trouver. Chaque Etat, chaque membre de l'OMC a sa conception du service public, au-delà de la seule définition des services gouvernementaux figurant dans l'AGCS. C'est pourquoi la préservation des services publics repose fondamentalement sur le mécanisme de négociation par listes positives et limitations de l'AGCS reconduit pour les négociations en cours. De par ce mécanisme, aucun membre ne peut se voir contraint à privatiser un service public contre son gré, ni à l'offrir à la concurrence. Les ouvertures réalisées correspondent à la situation effective prévalant chez un membre, et souhaitée par celui-ci, de par la possibilité de limiter le champ de l'ouverture selon une définition propre, de poser des limitations en termes d'accès au marché ou de traitement national. La nouvelle négociation en cours conduit la France à réaffirmer ces mêmes principes. L'Union européenne étant déjà très ouverte dans le domaine des services, la France n'est pas hostile à ce que la prochaine négociation couvre un large champ de secteurs. Pour autant, elle veille et veillera à ce que l'Union européenne n'offre pas la libéralisation de ses services publics tels qu'ils sont conçus et protégés dans l'Union, le degré de libéralisation atteint au plan interne ou communautaire constituant notre élément de référence à l'OMC et à ce que soient préservés les équilibres trouvés dans le cadre de l'accord AGCS. A cet égard, il convient de rappeler que les différentes directives communautaires, adoptées par le Conseil, fixent tout autant les conditions de concurrence entre opérateurs que les modalités de maintien du service universel dans les secteurs où existe une vocation ou une structure publique.

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