Question de Mme FÉRAT Françoise (Marne - UC-UDF) publiée le 17/04/2003

Mme Françoise Férat appelle l'attention de M. le ministre délégué à la coopération et à la francophonie sur les retards que semble avoir pris la communauté internationale pour réaliser les objectifs arrêtés, sous l'égide de l'organisation des Nations-Unies, à l'occasion du forum mondial sur l'éducation réuni à Dakar en 2000. Parmi ceux-ci figurait en particulier un engagement visant à assurer la réalisation d'une éducation primaire gratuite et de qualité pour tous les enfants à l'horizon 2015. Cependant, à la lecture d'un rapport d'étape, récemment publié par l'UNESCO, il semble que cette ambition ne puisse être mise en oeuvre dans les délais impartis. En effet, dans le monde, nous recensons actuellement 156 millions d'enfants privés de toute forme de scolarité. Toujours selon cette source, cette situation s'explique par la baisse continue de l'aide bilatérale au développement. Pourtant, ce droit à l'éducation pour tous est certainement l'un des plus essentiels à l'épanouissement personnel, au développement des pays émergents ainsi qu'au maintien d'une certaine stabilité géopolitique. Consciente des contraintes budgétaires actuelles, elle lui demande néanmoins de bien vouloir lui indiquer les mesures qu'il envisage de prendre pour contribuer à l'effectivité d'un droit universel à l'éducation.

- page 1283


Réponse du Ministère délégué à la coopération et à la francophonie publiée le 19/06/2003

L'honorable parlementaire appelle l'attention du ministre délégué à la coopération et à la francophonie sur les retards enregistrés dans la réalisation des objectifs retenus par le Forum mondial sur l'éducation réuni à Dakar en 2000, particulièrement celui de l'accès universel à un cycle primaire complet en 2015. Les récentes analyses montrent qu'effectivement, dans un grand nombre de pays, la scolarisation progresse aujourd'hui à un rythme qui ne permettra pas d'atteindre l'enseignement primaire universel en 2015. C'est particulièrement le cas pour l'Afrique subsaharienne où actuellement plus de la moitié des enfants en âge d'être scolarisés n'ont pas accès à l'école ou la quittent prématurément, venant ainsi grossir le flot des adultes analphabètes. Cette situation de sous-scolarisation persistante compromet sérieusement la mise en oeuvre de politiques efficaces de lutte contre la pauvreté et représente aujourd'hui l'un des obstacles majeurs au développement économique et social, au renforcement de la bonne gouvernance et à la stabilité politique du continent africain. De toute évidence, la réalisation de la scolarisation universelle constitue pour l'Afrique un défi majeur. Pour le relever, elle devra scolariser en 2015 près de 180 millions d'enfants. Les pays francophones, quant à eux, auront un effort particulièrement lourd à consentir, puisqu'ils devront, à l'horizon 2015, scolariser 71 millions d'enfants, alors qu'ils en scolarisaient 23 millions en 1985 et 34 millions en 2000. La nécessaire extension de la couverture des dispositifs éducatifs implique une mobilisation accrue de ressources (construction de classes, recrutement d'enseignants...) qui dépasse les capacités de financement des pays concernés, particulièrement des plus pauvres, rendant indispensable le recours à l'aide extérieure. Les ressources budgétaires additionnelles offertes par le processus d'allégement de la dette (initiative pour les pays pauvres très endettés) constituent un début de réponse au problème du financement des politiques de développement de l'éducation. La communauté internationale (conférence de Monterrey de mars 2002, sommet du G8 de Kananaskis en juin 2002), en plaçant 'éducation au coeur des politiques d'aide au développement, a pris l'engagement d'augmenter l'aide publique au profit de la scolarisation universelle. La récente initiative " Fast Track " (procédure accélérée pour l'éducation pour tous) adoptée par le Comité de développement de la Banque mondiale d'avril 2002 permet aux pays présentant des programmes sectoriels convaincants et réalistes d'accéder à des financements extérieurs additionnels. Selon cette initiative, l'atteinte de l'objectif de l'EPT en 2015 implique une aide extérieure annuelle d'environ 2,9 milliards de dollars US, dont 2,1 pour la seule Afrique subsaharienne. Dans le cadre de cette itiative, à laquelle la France participe, dix pays (Burkina-Faso, Guinée, Guyana, Honduras, Mauritanie, Nicaragua, Niger, Gambie, Mozambique, Yémen) sont d'ores et déjà concernés pour un montant d'environ 300 millions d'euros sur trois ans. Les estimations actuelles montrent que la plupart des systèmes éducatifs de Afrique subsaharienne se caractérisent par des coûts unitaires élevés, incompatibles avec la réalisation de objectif de scolarisation universelle pour 2015, et qu'il convient en conséquence de faire un effort de rationalisation et d'optimisation de la dépense publique. Force est de constater que la recherche d'une plus grande efficience dans l'allocation et l'utilisation des ressources consacrées à l'éducation est un enjeu tout aussi essentiel que l'augmentation du volume de ces ressources. L'appui financier international doit donc être très étroitement lié à la mise en oeuvre de profondes réformes structurelles, certes difficiles et coûteuses sur les plans social et politique, mais indispensables à l'élévation des performances des systèmes en termes d'accès, d'équité et de qualité. La France a contribué activement, tant au plan diplomatique que technique, à la mise en place de l'ensemble de ces initiatives récentes visant à accroître les financements extérieurs en faveur de la scolarisation universelle. Elle s'est engagée dans un effort profond de renouvellement de ses modes d'intervention, notamment par un repositionnement de ses projets et une évolution qualitative de son assistance technique, afin de mieux s'insérer dans ce nouveau paysage éducatif. L'universalisation de l'école primaire est aujourd'hui l'objectif principal de la coopération éducative française qui entend faire porter ses efforts sur deux questions essentielles : celle de l'efficience des ressources nationales et extérieures allouées au secteur éducatif, et celle de l'impact des politiques éducatives sur le développement économique et social (particulièrement en termes de réduction de la pauvreté et des inégalités). D'autre part, la France, dans le cadre de l'initiative PPTE, amorce actuellement un effort supplémentaire exceptionnel d'allégement de la dette bilatérale, estimé à 3,7 milliards d'euros sur une dizaine d'années, qui sous la forme de contrats de désendettement-développement (C2D), doit bénéficier en priorité aux secteurs sociaux, particulièrement au secteur éducatif. Elle entend poursuivre dans cette voie de l'aide-programme en expérimentant en 2004 le financement, sur le Fonds de solidarité prioritaire, de programmes sectoriels d'éducation dont les premiers bénéficiaires pourraient être les pays élus à l'initiative Fast Track.

- page 2005

Page mise à jour le