Question de M. MARTIN Pierre (Somme - UMP) publiée le 16/05/2003

Question posée en séance publique le 15/05/2003

M. Pierre Martin. Monsieur le président, ma question s'adresse à M. le ministre de l'intérieur.

Monsieur le ministre, la loi permet à tout étranger, même présent en situation irrégulière sur notre territoire, de bénéficier de plein droit d'une carte de séjour par mariage avec un citoyen français.

Il peut obtenir la nationalité française par simple déclaration une année après. Cette disposition légale connaît cependant des dérives lors des unions de complaisance, appelées couramment « mariages blancs ».

Mme Nicole Borvo. Ah !

M. Pierre Martin. Maire, président de l'union départementale des élus locaux, je puis vous assurer que ces mariages blancs et leurs incidences, qui étaient bien loin de nos préoccupations, sont de plus en plus souvent évoqués. Les maires sont aujourd'hui appelés à célébrer des unions entre des Français et des étrangers sans savoir si ces derniers sont en situation régulière ! (Exclamations sur les travées du groupe CRC et du groupe socialiste.)

Nous savons aujourd'hui que des réseaux se sont mis en place et proposent un conjoint français pour 1 500 à 3 000 euros et un témoin de mariage pour 100 euros.

M. Roland du Luart. Ce n'est pas cher ! (Rires.)

M. Pierre Martin. Par ailleurs, depuis la loi du 11 mai 1998 relative à l'entrée et au séjour des étrangers en France, l'ancien certificat d'hébergement délivré par les maires pour les étrangers souhaitant un visa pour un court séjour a été remplacé par une simple attestation d'accueil, gratuite et délivrée sans la moindre vérification de la capacité de l'hébergeant à accueillir un ou plusieurs étrangers.

La réglementation ne confère, en effet, aucune compétence au maire pour apprécier l'opportunité de l'accueil d'un étranger par le demandeur de l'attestation d'accueil : il doit seulement s'assurer de son identité et de la réalité de son domicile dans la commune.

Dans ces deux domaines où il assume responsabilité et décision, le maire est démuni pour discerner ou détecter les situations pouvant favoriser le processus d'immigration clandestine.

Monsieur le ministre, vous avez récemment présenté en conseil des ministres un projet de loi sur l'immigration qui devrait être discuté au Parlement à l'automne prochain.

Pouvez-vous nous indiquer les moyens dont pourraient disposer les maires pour mettre fin à ces pratiques qui, malheureusement, aboutissent à jeter l'opprobre sur les étrangers qui vivent honnêtement sur notre territoire, se marient et désirent, eux, s'intégrer ?

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Réponse du Ministère de l'intérieur, de la sécurité intérieure et des libertés locales publiée le 16/05/2003

Réponse apportée en séance publique le 15/05/2003

M. Nicolas Sarkozy, ministre de l'intérieur, de la sécurité intérieure et des libertés locales. Monsieur le sénateur, le Gouvernement partage pleinement votre analyse.

M. Paul Loridant. C'est un scoop !

M. Nicolas Sarkozy, ministre. Il tient d'ailleurs à la disposition de tous ceux qui souhaiteraient en prendre connaissance l'abondant courrier de maires communistes, socialistes, centristes, UMP, non inscrits... (Protestations sur les travées du groupe socialiste et du groupe CRC.)

M. René-Pierre Signé. Pas moi !

M. Nicolas Sarkozy, ministre. ... se plaignant du scandale qui consiste à être obligés de célébrer un mariage frauduleux, parce qu'ils sont laissés seuls et abandonnés devant une réalité inacceptable. (Applaudissements sur les travées de l'UMP et de l'Union centriste, ainsi que sur certaines travées du RDSE. - Exclamations sur les travées du groupe socialiste.)

Commentez la question, mais écoutez ma réponse !

Il n'y pas que les maires de droite qui sont choqués, tous les maires le sont, et le Gouvernement ne fait pas de procès aux maires de gauche.

M. Raymond Courrière. Quand même !

M. Nicolas Sarkozy, ministre. Quel maire peut accepter d'être obligé de célébrer un mariage irrégulier ?

Le projet de loi que nous présenterons et qui a été arbitré par le Premier ministre va durablement modifier cet état de fait. (Très bien ! et applaudissements sur les travées de l'UMP.)

D'abord, il faudra deux ans, contre un an actuellement, à un étranger qui se marie à un Français ou à une Française pour obtenir un titre de séjour.

On constate une augmentation de plus de 400 % des acquisitions de nationalité par le mariage entre 1998 et 2002. C'est bien qu'il y a fraude ! (Exclamations sur les travées du groupe socialiste et du groupe CRC.)

Ce constat en fait rire peut-être certains ici, mais cela fait moins rire nos compatriotes qui vivent dans certains quartiers et assistent, impuissants, à la montée de l'amalgame du racisme et de la xénophobie parce que les réseaux clandestins ont de beaux jours devant eux puisque la France est le seul pays à ne pas s'être doté d'une législation en la matière !

Deuxièmement, nous proposerons la création d'un délit d'organisation ou de participation à un mariage blanc.

Troisièmement, le procureur sera obligé de prendre position et de motiver sa décision lorsqu'un maire...

M. Jacques Mahéas. C'est déjà le cas !

M. Nicolas Sarkozy, ministre. Ce n'est pas exact ! Il sera obligé de motiver sa décision lorsqu'un maire lui demandera s'il est normal de devoir procéder à un mariage frauduleux.

Telle est, monsieur Pierre Martin, la réponse concrète du Gouvernement à votre juste préoccupation.

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