Question de Mme BORVO COHEN-SEAT Nicole (Paris - CRC) publiée le 13/06/2003

Question posée en séance publique le 12/06/2003

M. le président. La parole est à Mme Nicole Borvo.

Mme Nicole Borvo. Monsieur le président, monsieur le Premier ministre, mesdames, messieurs les ministres, mes chers collègues, d'emblée, je souhaite saluer le courage et l'intelligence des centaines de milliers de professionnels de l'éducation nationale (« Ah bon ! » sur les travées de l'UMP) qui mènent depuis plusieurs mois un mouvement d'une grande ampleur, avec un sens des responsabilités remarquables. (Exclamations sur les travées de l'UMP et de l'Union centriste.)

Si vous m'empêchez de parler, je dépasserai mon temps de parole ! (Protestations sur les mêmes travées.)

Après avoir refusé de négocier durant plusieurs semaines - de nombreux enseignants étaient en lutte depuis le mois de mars - le Gouvernement a agité le risque virtuel d'une remise en cause du baccalauréat.

Le baccalauréat devait avoir lieu, monsieur le ministre. Il a lieu ! (Applaudissements sur les travées du groupe CRC et sur quelques travées du groupe socialiste. - Vives exclamations sur les travées de l'UMP et de l'Union centriste, ainsi que sur certaines travées du RDSE.)

M. Dominique Braye. C'est une honte !

Mme Nicole Borvo. Il a lieu comme prévu, car les enseignants ont profondément à coeur d'exercer leur métier. Mais le mouvement continue et les attentes demeurent.

M. Dominique Braye. La France exposée !

Mme Nicole Borvo. Monsieur le ministre, je souhaiterais vous interroger sur trois points parmi de très nombreux autres.

S'agissant de la décentralisation, le maintien des transferts des personnels TOSS de l'Etat vers les collectivités territoriales n'apparaît pas justifié.

Vous dites qu'il est logique que les personnels de gestion des bâtiments gérés par les collectivités territoriales soient sous la responsabilité de ces dernières. Or, monsieur le ministre, la grande majorité de ces personnels est employée dans des tâches directement liées à la collectivité pédagogique. Il faut donc retirer les personnels TOSS de la décentralisation. J'attends votre réponse sur ce point.

Ma deuxième interrogation concerne votre annonce, lors des négociations, de la création de 2 500 postes dans le premier degré. S'agit-il, monsieur le ministre, de créations de postes ou de redéploiements ? Vous comprendrez que les enseignants n'accepteront pas que l'on déshabille Pierre pour habiller Paul. (Protestations sur les travées de l'UMP.) Et que faites-vous des aides-éducateurs en fin de contrat ?

Enfin, nous avons noté, monsieur le ministre, votre volonté de scinder les revendications des enseignants sur la décentralisation et les conditions de travail du débat sur leur retraite.

M. Dominique Braye. Démago ! C'est une honte !

Mme Nicole Borvo. Pourtant, monsieur le ministre, que répondez-vous à ces jeunes enseignants confrontés à un métier de plus en plus difficile ?

M. Dominique Braye. C'est la France protégée !

Mme Nicole Borvo. Car ce sont les enseignants qui subissent les répercussions de la déstructuration libérale de la société...

M. Dominique Braye. Allez voir ce que font les ouvriers des travaux publics !

Mme Nicole Borvo Or ils ont appris soudainement qu'on leur demanderait de travailler beaucoup plus pour conserver une retraite déjà modeste, car, rappelons-le, les salaires des enseignants sont modestes.

M. Dominique Braye. Protecteur de l'élitisme !

Mme Nicole Borvo. Monsieur le ministre, le passage du bac n'est pas votre victoire, c'est la démonstration du courage des professeurs qui ont su dominer leur colère pour le bien des enfants. (Applaudissements sur les travées du groupe CRC ainsi que sur quelques travées du groupe socialiste. - Exclamations sur les travées de l'UMP, de l'Union centriste et sur certaines travées du RDSE.)

Ils attendent de nouvelles réponses et nous les attendons avec eux. (Applaudissements sur les travées du groupe CRC et sur quelques travées du groupe socialiste. - Exclamations sur les travées de l'UMP, de l'Union centriste, ainsi que sur certaines travées du RDSE.)

M. Dominique Braye. C'est honteux !

M. Henri Weber. C'est vous qui êtes honteux !

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Réponse du Ministère de la jeunesse, de l'éducation nationale et de la recherche publiée le 13/06/2003

Réponse apportée en séance publique le 12/06/2003

M. le président. S'il vous plaît, mes chers collègues, gardons notre sérénité.

La parole est à M. le ministre.

M. Luc Ferry, ministre de la jeunesse, de l'éducation nationale et de la recherche. Madame la sénatrice, j'aimerais vous dire d'abord qu'il y a au moins un point d'accord entre nous. Peut-être n'y en a-t-il pas d'autres, mais celui-là, il est certain : je rends hommage aux professeurs qui ont pris leurs responsabilités dans le bon sens...

Mme Hélène Luc. Vous voyez !

M. Luc Ferry, ministre. ... et peut-être encore davantage aux chefs d'établissement, qui vivent une situation très difficile depuis maintenant trois semaines, ainsi qu'aux autorités académiques. (Applaudissements sur les travées de l'UMP, ainsi que sur certaines travées de l'Union centriste et du RDSE.)

A propos de la décentralisation, je vous lirai simplement, en guise de réponse - et j'aimerais que vous vous imprégniez de cette bonne lecture -, la brève intervention de M. le sénateur Michel Charasse sur cette question. (Mme Nicole Borvo s'exclame.)

Vous allez m'expliquer en quoi le service public et la République seraient menacés si, demain, le cuisinier du collège de Puy-Guillaume qui, par ailleurs, est l'un de mes amis, dépendait du département plutôt que de l'Etat. Il faut arrêter de se moquer du monde !

Mme Nicole Borvo. C'est incroyable !

M. Luc Ferry, ministre. Ce n'est pas moi qui le dis, c'est le sénateur Michel Charasse ! (Applaudissements sur les travées de l'UMP, de l'Union centriste, ainsi que sur certaines travées du RDSE.)

Mme Nicole Borvo. Je n'ai pas posé la question à M. Charasse.

M. Luc Ferry, ministre. Sur les vraies questions, je vous renvoie à des enquêtes très intéressantes qui ont été publiées en 2002 et que vous trouverez dans l'annuaire de la SOFRES.

Quels sont les véritables problèmes selon les enseignants, aujourd'hui ? Pour 62 % d'entre eux, c'est l'hétérogénéité des classes ; pour 56 % d'entre eux, ce sont les violences, les incivilités et le comportement des élèves ; pour 32 % d'entre eux, c'est l'échec scolaire.

Ce que je souhaiterais, c'est qu'après avoir passé le cap de la décentralisation et des retraites, deux excellentes réformes qui, chacun le reconnaît, sont difficiles - c'est d'ailleurs pourquoi vous ne les avez pas faites - nous revenions au coeur du problème. (Applaudissements sur les travées de l'UMP et de l'Union centriste, ainsi que sur certaines travées du RDSE.)

Je voudrais dire aux enseignants que j'ai parfaitement conscience que le dialogue n'est pas terminé. Je ne vais pas crier victoire parce que les épreuves du bac se passent bien. Il faut continuer le dialogue pour poser les vraies questions, déniées pendant des années.

C'est ce que je proposerai dès la semaine prochaine. (« Très bien ! » et applaudissements sur les travées de l'UMP et de l'Union centriste, ainsi que sur certaines travées du RDSE. - Protestations sur les travées du groupe CRC.)

M. Robert Bret. La prochaine fois, on appelleraSarkozy !

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