Question de M. VINÇON Serge (Cher - UMP) publiée le 26/06/2003

M. Serge Vinçon appelle l'attention de Mme la ministre de la défense sur les conditions dans lesquelles les formations militaires de renseignement peuvent obtenir le concours de spécialistes civils, notamment dans le domaine des langues rares. Il souhaiterait savoir si l'état actuel de la réglementation et des budgets permet de faire face à ce besoin avec la souplesse et la réactivité requises. Plus particulièrement, la réglementation permet-elle d'utiliser de tels spécialistes à l'étranger dans le cadre d'opérations extérieures et de leur assurer une couverture juridique adaptée aux risques inhérents à ces engagements ? La possibilité ouverte par la loi n° 99-984, portant organisation de la réserve militaire, d'attribuer un grade à titre temporaire dans la réserve opérationnelle peut-elle être une solution adaptée aux difficultés éventuellement rencontrées ?

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Réponse du Ministère de la défense publiée le 11/09/2003

L'appréciation de la réalité du besoin en matière de spécialistes civils en langues rares relève de la compétence de l'état-major des armées, dont l'une des missions est d'estimer les besoins opérationnels des forces. Le personnel civil envoyé en mission extérieure en tant qu'agent de l'État bénéficie de la protection juridique prévue aux articles 11 et 11 bis de la loi n° 83-634 du 13 juillet 1983 modifiée portant droits et obligations des fonctionnaires. Ces dispositions font obligation à l'État de couvrir ses agents des condamnations civiles à la suite d'une faute de service, de les protéger contre les menaces, violences, injures ou diffamations formulées à l'occasion de l'exercice de leurs fonctions ainsi que lorsqu'ils sont poursuivis pénalement à l'occasion de l'exercice de leurs fonctions. Ce dispositif juridique s'applique quel que soit le lieu où se produit le fait générateur ouvrant droit à cette protection. En outre, la protection juridique du personnel civil en opération extérieure résulte également de l'accord de statut des forces conclu à l'occasion de chaque engagement. Ainsi, à titre d'exemple, s'agissant de la Bosnie-Herzégovine, de la Croatie, de la République de Serbie et du Monténégro, le statut des forces a fait l'objet de trois accords, figurant à l'appendice B de l'annexe 1A de l'accord de Dayton signé le 14 décembre 1995 à Paris, qui prévoient que les termes " personnel de l'OTAN désignent les personnels civils et militaires de l'organisation du traité de l'Atlantique Nord, à l'exception des personnels recrutés localement ". Toutefois, le personnel civil en opération extérieure ne peut bénéficier d'aucun renforcement de sa couverture sociale ni d'aucun régime indemnitaire particulier susceptible de compenser les sujétions inhérentes à l'exercice de ses fonctions en zone opérationnelle. De plus, l'envoi de ce type de personnel sur des théâtres d'opérations extérieurs ne serait pas en cohérence avec la logique de la professionnalisation des armées. En effet, la loi n° 99-894 du 22 octobre 1999 portant organisation de la réserve militaire et du service de défense qui s'inscrit dans ce processus a justement été élaborée pour répondre aux besoins ponctuels et urgents des armées. Conçue comme une force d'appoint, la réserve opérationnelle est en effet composée de réservistes disponibles sélectionnés pour leurs compétences et immédiatement opérationnels. Elle permet ainsi, par exemple, à des volontaires détenant une compétence rare dans le monde civil de revêtir l'uniforme afin de servir à titre militaire pour une courte durée sans avoir reçu de formation militaire au préalable (article 9 de la loi). De surcroît, les réservistes de la réserve opérationnelle bénéficient des dispositions très protectrices du code des pensions militaires d'invalidité et des fonds de prévoyance liées à la notion de risques inhérente à la condition militaire. C'est dans ce cadre que des linguistes issus de la société civile, en particulier les spécialistes des langues rares, peuvent apporter leur contribution à l'armée d'active en opération extérieure. Toutefois, la durée annuelle maximale d'emploi des réservistes est limitée par la loi à trente jours. Elle peut être prolongée jusqu'à une durée totale de cent vingt jours pour les nécessités liées à l'emploi opérationnel des forces. Dès lors, une autre voie peut être adoptée, celle des officiers servant sous contrat au titre de l'article 98-1 du statut général des militaires. En effet, l'arrêté du 27 janvier 1980 fixant la liste des emplois des officiers recrutés à ce titre prévoit la spécialité de linguiste. Ces officiers, dont le grade est conféré par le ministre de la défense, peuvent servir à ce titre jusqu'à dix ans au sein des forces armées. L'officier servant sous contrat, comme le réserviste opérationnel, bénéficie, d'une part, de la protection juridique accordée par l'État au militaire en application des articles 16 et 24 de la loi n° 72-662 du 13 juillet 1972 portant statut général des militaires et, d'autre part, de la même couverture sociale que le militaire d'active. L'ensemble de ce dispositif de recrutement sous statut militaire de spécialistes civils ne justifie donc pas le recours à du personnel recruté sous statut civil pour satisfaire les besoins des armées dans des zones où il serait exposé à des risques importants.

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