Question de M. TRILLARD André (Loire-Atlantique - UMP) publiée le 08/10/2003

M. André Trillard expose à M. le ministre de l'économie, des finances et de l'industrie que les actions conjuguées du gouvernement français et des élus des collectivités du littoral ont permis d'accomplir des progrès réels au plan international, mais surtout communautaire et national, en matière de sécurité maritime depuis la catastrophe du Prestige. Mais, qu'il s'agisse de la politique de prévention, de l'aggravation des sanctions, de l'extension des zones de compétence des tribunaux maritimes, les avancées récemment intervenues n'ont de sens que si des moyens suffisants sont mis en oeuvre pour repérer et confondre les " voyous des mers ". A cet égard, l'efficacité des avions Polmar et I et II, spécialement équipés des matériels de haute technologie qui permettent l'enregistrement d'images thermographiques sur lesquelles la présence d'hydrocarbures est clairement visible, n'est plus à démontrer. On ne peut, par contre, que déplorer leur petit nombre. Aussi il lui demande, tout d'abord, ce qu'il en est exactement aujourd'hui du troisième appareil, dit Polmar III, dont le projet d'acquisition a été contrarié par les difficultés rencontrées par la société chargée de le construire et, d'autre part, à quelle échéance il est envisagé de doter la direction des douanes d'appareils supplémentaires, seuls outils techniquement capables d'apporter les preuves flagrantes des dégazages sauvages.

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Réponse du Secrétariat d'Etat aux petites et moyennes entreprises, au commerce, à l'artisanat, aux professions libérales et à la consommation publiée le 22/10/2003

Réponse apportée en séance publique le 21/10/2003

M. André Trillard. Monsieur le secrétaire d'Etat, le drame du Prestige, voilà bientôt un an, a eu pour seul mérite de nous renforcer, nous autres élus du littoral, dans une conviction aujourd'hui unanimement partagée : il n'est pas admissible que le dossier dit de la sécurité maritime progresse au seul rythme de telles catastrophes et des tributs qui en résultent pour nos côtes.

S'il n'est pas question de nier la réalité des progrès accomplis sur ce plan entre l'Erika et le Prestige, c'est, cette fois-ci, à la définition et à la mise en place d'une véritable politique de sécurité maritime sur le plan national, articulée avec les instances européennes et internationales, que s'est attelé le gouvernement auquel vous appartenez. Dans cette action, qui a pour objet de mettre un terme à la sinistre litanie des marées noires accidentelles, mais qui vise aussi à éradiquer l'espèce détestable des « voyous des mers » pratiquant sans vergogne dégazages et déballastages sauvages, vous êtes soutenu sans aucune réserve par les élus des collectivités du littoral.

Qu'il s'agisse des mesures mises en place à titre préventif ou du développement d'un arsenal répressif, il convient de saluer les avancées importantes intervenues l'année dernière. Parmi celles-ci, je citerai l'adoption, en mars dernier, d'une proposition de directive européenne prévoyant des sanctions pénales incluant des peines de prison pour les responsables de dégazages, l'extension, par la loi Perben du 15 avril dernier, de la compétence des trois tribunaux du littoral maritime spécialisés à la zone des 200 milles, ainsi que le projet de loi, actuellement en navette, portant sur l'adaptation de la justice aux évolutions de la criminalité.

Toutefois, monsieur le secrétaire d'Etat, aussi volontaristes soient-elles, ces mesures n'auront de portée réelle que si des moyens suffisants sont mis en oeuvre pour repérer et confondre les auteurs de ces pollutions illicites. Chacun sait que les rejets de pollution ne peuvent être repérés que par voie aérienne. A cet égard, l'efficacité des avions POLMAR I et II, spécialement équipés d'un matériel de haute technologie qui permet l'enregistrement d'images thermographiques sur lesquelles la présence d'hydrocarbures est clairement visible, n'est plus à démontrer. On ne peut, en revanche, que déplorer le petit nombre de tels avions.

La question se pose, notamment, du sort de POLMAR III, dont la construction a été compromise par la mise en liquidation de la société Reims Aviation en janvier dernier et dont la mise en service est d'autant plus attendue qu'il sera doté de capteurs antipollution beaucoup plus performants que ses prédécesseurs.

Monsieur le secrétaire d'Etat, je suis particulièrement sensible au contexte budgétaire difficile qui est le nôtre et, pas plus que M. Mer, je n'aime dépenser ; mais je m'interroge.

Au regard de la longueur exceptionnelle du littoral dont notre pays est doté et du climat général d'irresponsabilité auquel les milieux maritimes n'échappent pas, hélas !, le nombre actuel de deux appareils n'est-il pas quelque peu dérisoire ?

Quel rapport y a-t-il entre le coût d'un aéronef et les sommes colossales englouties dans une marée noire ?

Quelle est, enfin, la crédibilité d'une politique qui n'est pas assortie des moyens de la mettre en oeuvre, aux yeux non seulement des contrevenants potentiels mais aussi de nos partenaires européens, que nous ne nous privons pourtant pas d'aiguillonner dans ce domaine ?

La question que je vous pose dès lors est la suivante : quelle solution a-t-elle été trouvée pour POLMAR III et à quelle échéance pouvons-nous attendre la mise en service de cet avion ?

Indépendamment du règlement de cette affaire, le Gouvernement prévoit-il de doter les douanes d'appareils supplémentaires, seuls outils capables d'apporter les preuves flagrantes d'un dégazage sauvage ?

M. le président. La parole est à M. le secrétaire d'Etat.

M. Renaud Dutreil, secrétaire d'Etat aux petites et moyennes entreprises, au commerce, à l'artisanat, aux professions libérales et à la consommation. Monsieur le sénateur, en application de décisions arrêtées lors des comités interministériels de la mer de 1982 et de 1990, la douane s'est dotée de deux avions spécialement équipés pour la télédétection des pollutions par les hydrocarbures, opérationnels depuis 1988 pour ce qui concerne POLMAR I et 1994 quant à POLMAR II. Actuellement, ces aéronefs sont respectivement basés à Bordeaux-Mérignac et à Hyères, d'où ils assurent la surveillance de la façade Atlantique - Manche - mer du Nord, pour POLMAR I, et de la Méditerranée, pour POLMAR II.

La douane française est ainsi d'ores et déjà en mesure d'assurer la surveillance de la zone de protection écologique en cours de création en mer Méditerranée.

La construction du nouvel avion F 406 dit « POLMAR III », en remplacement de l'avion POLMAR I, engagée dès juin 2001 et momentanément arrêtée par la mise en liquidation judiciaire de la société Reims Aviation, a été relancée par le repreneur de cette dernière. Cet appareil devrait être opérationnel à la fin de 2004. Son entrée en service s'accompagnera d'une mise à niveau technologique, conformément aux décisions du dernier comité interministériel de la mer du 29 avril 2003, de l'actuel avion POLMAR II, en 2005, permettant de le doter des mêmes moyens de détection des pollutions que l'avion POLMAR III.

POLMAR III, doté des technologies de détection les plus performantes, apportera des améliorations significatives à la prévention des pollutions et à la répression des rejets illicites d'hydrocarbures puisqu'il sera équipé des moyens de détection les plus récents. De plus, il pourra aussi opérer de nuit, période propice aux rejets illicites d'hydrocarbures.

L'avion POLMAR III, sera basé à Lann-Bihoué pour assurer la couverture de la zone maritime la plus sensible de la Manche - mer du Nord et pourra, en tant que de besoin, intervenir sur la façade atlantique. La Méditerranée sera, quant à elle, couverte par l'avion POLMAR II remis à niveau.

Ces aéronefs spécialisés de détection, qui ont prouvé leur efficacité, ne sont cependant pas les seuls moyens de prévention de la pollution maritime par les hydrocarbures. Des mesures internationales telles que la création d'une zone maritime particulièrement vulnérable en Europe de l'Ouest et l'amélioration des conditions de déballastage dans les installations portuaires contribueront à protéger efficacement la mer contre la pollution par les dégazages et les déballastages sauvages. La répression de ces derniers sera également rendue plus efficace par l'harmonisation des sanctions pénales qui résultera d'une directive européenne en cours d'élaboration.

Enfin, s'agissant de la Méditerranée, la création d'une zone de protection écologique par la loi n° 2003-346 du 15 avril 2003 constitue une avancée significative.

L'ensemble de ces mesures modifiera profondément les conditions actuelles de prévention et de répression des pollutions maritimes volontaires ou accidentelles.

M. le président. La parole est à M. André Trillard.

M. André Trillard. Je tiens à remercier M. le secrétaire d'Etat et à lui témoigner ma reconnaissance.

Je suis triplement satisfait : tout d'abord, par l'annonce très intéressante de la mise en service de l'avion POLMAR III dès la fin de 2004, ensuite, par le positionnement géographique de cet avion à Lann-Bihoué, ce qui permettra d'assurer dans de bonnes conditions la surveillance des côtes bretonnes et ligériennes - c'est là, en effet, que se passent beaucoup de choses - et, enfin, par la volonté du « plus jamais ça ! » affichée par le Gouvernement.

Les côtes bretonnes et ligériennes ont subi une quinzaine de pollutions graves en quelque trente ans. Nous savons bien qu'il serait utopique de croire à une disparition totale des pollutions. Mais si l'annonce des mesures gouvernementales permettait de faire cesser les pollutions et les dégazages dont sont actuellement responsables les « voyous des mers », nous aurons alors, me semble-t-il, gagné. Nos concitoyens de l'Ouest et les Méditerranéens en seront très reconnaissants au Gouvernement.

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