Question de M. BIWER Claude (Meuse - UC) publiée le 05/02/2004

M. Claude Biwer attire l'attention de M. le ministre délégué à la famille sur les résultats d'une étude réalisée par l'OCDE dans dix-neuf des plus grands pays industrialisés, laquelle semble démontrer que la France n'arrive qu'en dixième position en matière de conciliation de la vie professionnelle et de la vie familiale des jeunes mères de famille. Il le prie de bien vouloir préciser les mesures que le Gouvernement compte proposer visant à améliorer les performances de notre pays dans ce domaine.

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Réponse du Secrétariat d'Etat aux programmes immobiliers de la justice publiée le 25/02/2004

Réponse apportée en séance publique le 24/02/2004

M. Claude Biwer. Monsieur le président, madame la secrétaire d'Etat, mes chers collègues, « la France n'aide pas suffisamment ses jeunes mères de famille », tel est, en substance, le message délivré par l'Organisation de coopération et de développement économiques, l'OCDE, dans une étude qu'elle vient de réaliser dans dix-neuf des plus grands pays industrialisés.

En réalité, cet organisme mettait en cause non pas le soutien financier accordé aux parents qui, il faut le reconnaître, est particulièrement important dans notre pays puisqu'il avoisine les 12,5 milliards d'euros, toutes collectivités confondues, mais bien plus les politiques mises en oeuvre pour permettre aux jeunes mères de famille actives de concilier leur vie professionnelle et leur vie familiale.

Les pays scandinaves sont, dans ce domaine, considérés comme étant les plus en avance, mais, contrairement à bien des idées reçues, ils sont rejoints dans le haut du classement par le Royaume-Uni, l'Australie et les Etats-Unis.

Horaires de travail flexibles et grandes possibilités de travail à temps partiel, excellentes infrastructures d'accueil pour les jeunes enfants compensent souvent, dans ces pays, la faiblesse des indemnités accordées aux jeunes mamans pendant le congé de maternité.

Dans ce classement, la France n'arrive qu'en dixième position avec des performances à peine moyennes en ce qui concerne le nombre de crèches, mais très inférieures en matière de flexibilité des horaires et de temps de travail partiel choisi ; seuls les pays méditerranéens font moins bien que nous en ces domaines.

Ces critiques, pour désagréables qu'elles soient, pourraient être salutaires si elles devaient entraîner une modification des comportements individuels et collectifs.

Force est de reconnaître que, en ce qui concerne la flexibilité des horaires et le temps de travail partiel choisi, ces deux notions relèvent, pour l'essentiel, de la responsabilité des entreprises et, dans ce domaine comme dans bien d'autres, de telles mesures sont plus aisées à mettre en oeuvre dans une grande entreprise que dans une petite structure. Or il faudrait pourtant sensibiliser les chefs d'entreprise à ce problème, car les jeunes mamans sont très demandeuses. Certaines entreprises sont d'ailleurs également demandeuses et se tournent vers les collectivités territoriales pour étudier les mesures qui pourraient être prises. Nous pouvons considérer que cela correspond à l'esprit qui anime nos partenaires et s'intègre dans ce que l'on appelle l'environnement de l'entreprise.

On observe qu'une très forte priorité est donnée au plus jeune âge dans l'orientation des prestations familiales. Or cette priorité ne permet pas une augmentation parallèle de l'aide financière accordée aux parents d'enfants plus âgés, alors que chacun sait que le coût de l'enfant, hors frais de garde, a tendance à augmenter avec l'âge.

La Cour des comptes relève également les écarts très importants qui existent entre le coût de la garde d'un enfant en crèche - plus de 10 000 euros par an et par enfant - et celui de la garde par une assistance maternelle - moins de 5 000 euros par an et par enfant - et souhaite une réduction du coût unitaire des places en crèche et une amélioration de la prise en charge financière de la garde par les assistantes maternelles.

Madame la secrétaire d'Etat, notre pays a la chance de bénéficier, à l'heure actuelle, d'un taux de natalité parmi les plus élevés d'Europe, mais nous savons bien qu'il ne suffit déjà plus au renouvellement des générations.

Or un pays qui ne se renouvelle pas, inexorablement, se meurt. Telles sont les raisons pour lesquelles toute mesure visant à concilier la vie familiale et la vie professionnelle sera la bienvenue, de manière à encourager les jeunes couples, dans la mesure du possible, à avoir trois enfants au moins, seule manière, nous le savons bien, de renouveler les générations.

M. le président. La parole est à Mme la secrétaire d'Etat.

Mme Nicole Guedj, secrétaire d'Etat aux programmes immobiliers de la justice. Monsieur le sénateur, je tiens tout d'abord à excuser M. Christian Jacob, qui se trouve actuellement en Chine, et je vous remercie de poser cette question, qui m'amène à confirmer que la conciliation entre vie professionnelle et vie familiale fait l'objet de toutes les attentions de la part du Gouvernement. Le sujet est aujourd'hui primordial, car c'est un souci quotidien pour tous les parents. Nos réflexions et les décisions prises par le Gouvernement ont été guidées à chaque étape par deux soucis : faire simple et offrir de la liberté.

En premier lieu, il faut simplifier.

Faire simple, c'est prévoir une seule prestation au lieu de six auparavant : la prestation d'accueil du jeune enfant, la PAJE.

Faire simple, c'est prévoir un numéro de téléphone unique pour tout le territoire national, afin de connaître ses droits.

Faire simple, c'est le chèque PAJE, semblable au chèque emploi-service, pour unique formalité lorsque l'on embauche une assistante maternelle ou une garde à domicile.

En second lieu, il importe d'offrir de la liberté.

La liberté, c'est avant tout avoir le choix de suspendre son activité au moment de la naissance. C'est la raison pour laquelle le Gouvernement a ouvert, pour une durée de six mois, le congé parental rémunéré dès le premier enfant. La conciliation entre les enfants et le travail passe également par le travail à temps partiel. Le Gouvernement a revalorisé la rémunération du congé parental en cas de travail à temps partiel. Ce dernier permet aux parents de ne pas se couper de la vie active. C'est très important, parce que la rupture totale peut facilement conduire au chômage pour celles et ceux qui occupent des emplois peu qualifiés.

La liberté, c'est aussi avoir le choix de son mode de garde : une assistance maternelle, la crèche ou une garde à domicile.

Pour exercer cette liberté, il faut en avoir les moyens financiers. A cet effet, nous avons accru les aides à la garde par les assistantes maternelles. La finalité recherchée est que ce mode de garde ne coûte pas plus cher que la crèche. Ainsi les familles les plus modestes se verront-elles accorder une aide de plus de 150 euros supplémentaires par mois, afin de leur permettre d'avoir recours à une assistante maternelle.

Pour la garde à domicile, l'ancienne allocation de garde d'enfant à domicile, l'AGED, est revalorisée, et les déductions fiscales sont majorées, passant de 3 700 à 5 000 euros par an.

Pour que cette liberté puisse être exercée, il faut également - et c'est tout aussi important - que l'offre de garde soit accrue.

Notre pays manque d'assistantes maternelles. Un projet de loi a été présenté voilà deux semaines en conseil des ministres tendant à revaloriser le statut de cette profession, afin de susciter de nouvelles vocations.

L'offre de garde concerne aussi les crèches. Nous mettons en place un « plan crèches » de 200 millions d'euros. Ce plan doit permettre au total la création de 20 000 places de crèches.

Enfin, l'ouverture du secteur au privé permettra d'augmenter l'offre de garde.

Premièrement, 20 % du « plan crèches », soit 40 millions d'euros, sont réservés spécialement à des projets de création de crèches privées. L'aide est importante : 10 500 euros par place créée.

Deuxièmement, les financements des caisses d'allocations familiales, les CAF, seront ouverts aux entreprises. Jusqu'à présent et depuis un vote du conseil d'administration de la Caisse nationale d'allocations familiales, la CNAF, en 1979, tout financement par les CNAF d'entreprises privées était interdit.

La prestation de service unique des CAF - subvention de fonctionnement des places de crèches représentant de 30 à 40 % du coût de revient - pourra désormais être versée à des entreprises si, bien entendu, elles respectent la barème de tarification institué par la CNAF. Ce barème impose que les parents paient la crèche en fonction de leurs revenus.

Troisièmement, la PAJE est également offerte aux parents qui passent par une entreprise. Pour bénéficier de l'AGED et de l'AFEAMA, l'aide à la famille pour l'emploi d'une assistante maternelle, il fallait être employeur direct de sa garde à domicile ou de l'assistante maternelle. Avec la PAJE, les parents peuvent passer par une entreprise. Ce dispositif est très avantageux et simple : les parents bénéficient de 300 à 500 euros par mois et par enfant en cas de garde par une assistante maternelle. L'allocation peut atteindre 725 euros par mois et par famille en cas de garde à domicile. Les avantages fiscaux s'ajoutent à ces montants.

Enfin, quatrièmement, avec le crédit d'impôt famille, le CIF, les entreprises auront intérêt à devenir de vrais acteurs de la politique familiale. Des actions sont menées par les entreprises en faveur de la conciliation entre vie familiale et vie professionnelle de leurs salariés. Le taux de prise en charge fiscale est de 60 %. Le crédit d'impôt permet de financer aussi bien l'investissement que les frais de fonctionnement de places de crèches et toutes les actions en faveur des familles.

Vous pouvez donc constater, monsieur le sénateur, que c'est un véritable plan Marshall que ce Gouvernement a déclenché en faveur de la petite enfance dans un esprit très ouvert, dans le seul objectif de servir les familles.

M. Jacques Oudin. Très bien !

M. le président. La parole est à M. Claude Biwer.

M. Claude Biwer. Je vous remercie de toutes ces précisions, madame le secrétaire d'Etat. Ce plan Marshall me convient parfaitement, mais, parallèlement, il faudrait prévoir un maximum de souplesse dans l'organisation, particulièrement en milieu rural, car le nombre de demandeurs y est faible.

Pour être dans un secteur frontalier du nord-est de la France, je constate que la situation des pays voisins, notamment la Belgique et le Luxembourg, est très différente de celle de la France. Il y aurait peut-être lieu d'européaniser les systèmes.

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