Question de M. MUZEAU Roland (Hauts-de-Seine - CRC) publiée le 14/05/2004

Question posée en séance publique le 13/05/2004

M. Roland Muzeau. Ma question s'adresse à M. le Premier ministre.

Le festival de Cannes, ce rendez-vous mondial du cinéma, s'est ouvert hier.

Les réalisateurs des films français sélectionnés sur la Croisette ont tenu à rappeler qu'ils n'existeraient pas sans les intermittents.

Or ces intermittents, qui ont obtenu par leurs luttes le droit d'exprimer hier soir devant le monde entier les problèmes qu'ils rencontrent, attendent toujours les solutions urgentes qui débloqueront la situation.

M. le Premier ministre est intervenu une première fois pour mettre, selon ses propres termes, « de l'humanité sur la brutalité » du protocole du 26 juin, et une deuxième fois pour inviter l'UNEDIC à « discuter » avec les intéressés et à faire de son mieux pour les femmes enceintes qui sont entre deux contrats.

Ce sont de premières avancées, mais il reste à affronter le MEDEF (Exclamations sur les travées de l'UMP) - je sais que c'est difficile -, ...

M. Henri de Raincourt. Ah oui !

M. Roland Muzeau. ...dont le président déclare vouloir supprimer à terme les annexes 8 et 10 du protocole.

Ce gouvernement doit enfin faire preuve de fermeté face au MEDEF et répondre par des actes positifs aux questions urgentes des intermittents.

Vous avez toutes les clés en main pour cela, y compris pour les intermittents touchés par la maladie ou par un accident, et pour le droit des techniciens à assurer des formations.

Vous avez, au surplus, le devoir de promouvoir l'exception culturelle, dont l'intermittence est une dimension, et l'obligation de tenir bon sur la présomption de salariat, mise en cause par la Commission européenne.

Monsieur le Premier ministre, il ne faut pas inverser les responsabilités. Ce ne sont pas les mégaphones sur la Croisette qui font du chantage ; c'est la prétention du MEDEF à piloter les dossiers économiques et sociaux de la France.

Il faut dire la vérité à notre peuple : ce qui bloque à ce jour la mise en oeuvre de mesures fortes pour sortir de la crise, c'est la position du patronat qui s'arroge les rôles de l'exécutif et du législatif, sans en avoir ni la légitimité ni les compétences !

Monsieur le Premier ministre,...

M. René-Pierre Signé. Il n'est pas là !

M. Roland Muzeau. ... aurez-vous avoir le courage et la lucidité d'écouter ce qui se dit dans la pluralité politique, comme au comité de suivi ou à la mission Paillé à l'Assemblée nationale ?

Allez-vous exiger que les négociations reprennent avec tous les partenaires de l'assurance chômage des salariés intermittents du spectacle, du cinéma et de l'audiovisuel ?

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Réponse du Ministère délégué aux relations du travail publiée le 14/05/2004

Réponse apportée en séance publique le 13/05/2004

M. Gérard Larcher, ministre délégué aux relations du travail. Monsieur le sénateur, je suis heureux de l'occasion que vous me donnez de présenter devant la Haute Assemblée les avancées que le Gouvernement a été en mesure d'obtenir dans ce dossier.

Sous l'autorité du Premier ministre, nous n'avons pas ménagé nos efforts pour rechercher une solution.

Nous étions en effet conscients des difficultés auxquelles ont pu être confrontés certains professionnels, notamment ceux du spectacle vivant, à la suite de l'application des nouvelles règles d'indemnisation du chômage.

M. Raymond Courrière. Tu parles !

Mme Danièle Pourtaud. « Difficultés » ? Le mot est faible !

M. Gérard Larcher, ministre délégué. Un dispositif d'urgence a tout d'abord été mis en place ...

M. René-Pierre Signé. Après les élections !

Mme Nicole Borvo. Cela ne suffit pas !

M. Gérard Larcher, ministre délégué. ...pour traiter rapidement les situations les plus délicates.

A cette fin, un fonds provisoire doté par l'Etat à hauteur de 20 millions d'euros verra le jour dans les prochaines semaines. Un expert indépendant est chargé de définir, dans les jours à venir, les modalités d'organisation, de fonctionnement et de financement de ce fonds.

M. Marcel Debarge. Demain, on rase gratis !

M. Jacques Mahéas. Quel festival !

M. Gérard Larcher, ministre délégué. Dans le même temps, le Gouvernement s'est attaché à préparer l'avenir, et c'est l'essentiel pour l'ensemble des parties. (Exclamations sur les travées du groupe socialiste.)

En effet, le régime d'indemnisation des intermittents est menacé ; il l'est encore malgré la réforme courageuse portée par les partenaires sociaux l'an dernier. (Très bien ! et applaudissements sur les travées de l'UMP et de l'Union centriste.)

Le Gouvernement est profondément attaché à la survie de ce régime. Il sait ce que le secteur du spectacle vivant, du cinéma et de l'audiovisuel apporte à la collectivité et combien il contribue à la qualité de vie de nos concitoyens. Il est attaché à l'ancrage de ce régime dans la solidarité interprofessionnelle.

M. René-Pierre Signé. C'est faux !

M. Gérard Larcher, ministre délégué. Mais pour sauvegarder l'intermittence et apporter le soutien nécessaire au secteur du spectacle, naturellement fragile, il nous faut aujourd'hui, par-delà la réussite de tel ou tel festival, envisager l'avenir avec tous les partenaires intéressés.

M. Alain Gournac. Très bien !

M. Gérard Larcher, ministre délégué. L'UNEDIC a répondu favorablement à la demande que lui a adressée le Premier ministre de revenir au traitement le plus favorable des femmes enceintes,...

Mme Danièle Pourtaud. Il était temps !

M. Gérard Larcher, ministre délégué. ...en assimilant à des périodes d'activité ouvrant droit à indemnisation les congés maternité.

Des discussions pourront s'engager entre l'UNEDIC, l'Etat et tous les partenaires concernés sur l'avenir du régime d'assurance chômage du spectacle vivant, du cinéma et de l'audiovisuel.

Parallèlement, nous allons renforcer, par une campagne spécifique, le contrôle des abus et mieux encadrer le recours à l'intermittence. (Applaudissements sur les travées de l'UMP et de l'Union centriste.)

Mme Nicole Borvo. Ce sont les directeurs de société qui abusent du statut de l'intermittence !

M. Gérard Larcher, ministre délégué. J'ai d'ailleurs conduit avec la délégation interministérielle de lutte contre le travail illégal, la DILTI, une réunion de travail sur ce sujet.

Un premier décret vient de paraître, qui permettra à l'UNEDIC de croiser les déclarations des employeurs et des salariés qui bénéficient de l'intermittence ...

Mme Nicole Borvo. Ce sont les employeurs qui utilisent l'intermittence et qui n'y ont pas droit !

M. Gérard Larcher, ministre délégué. ... et nous adopterons, avant la fin du mois de juillet, le texte permettant le croisement effectif des fichiers des organismes sociaux du secteur du spectacle.

M. Alain Gournac. Très bien !

M. Gérard Larcher, ministre délégué. Nous travaillons à la définition de nouvelles obligations d'information et de certification pesant sur les employeurs qui recourent aux travailleurs intermittents, afin d'éviter des comportements d'optimisation, qui ont pour effet d'aggraver indûment le déficit.

La responsabilité du donneur d'ordre doit être renforcée.

M. René-Pierre Signé. Personne n'y croit !

Mme Nicole Borvo. Et qui va payer ?

M. Gérard Larcher, ministre délégué. C'est donc par un programme d'action de grande ampleur que nous pourrons collectivement refonder un régime spécifique d'indemnisation du chômage pour les artistes et techniciens du spectacle vivant, du cinéma et de l'audiovisuel, arrimé à la solidarité interprofessionnelle tout en prenant en compte les particularités et la diversité de leurs métiers, sans grever les comptes de l'assurance chômage.

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