Question de M. COLLIN Yvon (Tarn-et-Garonne - RDSE) publiée le 04/06/2004

Question posée en séance publique le 03/06/2004

M. Yvon Collin. Monsieur le secrétaire d'Etat à l'agriculture, à quelques jours du scrutin européen, je souhaite évoquer l'un des aspects fondamentaux de la construction communautaire : la politique agricole commune.

Avec 45 milliards d'euros, soit un peu moins de la moitié du budget de l'Union européenne, l'agriculture est une préoccupation majeure pour de nombreux pays membres, dont la France.

La réforme décidée le 26 juin 2003 à Luxembourg va modifier radicalement les modalités de financement du secteur agricole. En particulier, la plus grande partie des aides sera désormais versée indépendamment des volumes de production.

S'agissant, tout d'abord, du second pilier, relatif au développement rural, le renforcement du soutien à l'installation des jeunes agriculteurs ainsi que les nouveaux crédits destinés à aider la mise aux normes constituent des avancées.

En revanche, le premier pilier, qui concerne les aides compensatoires, appelle un commentaire. Si l'on peut, naturellement, approuver le principe qui consiste à garantir les revenus des agriculteurs et à leur permettre de déterminer leur production en fonction des besoins du marché et de la demande des consommateurs, on peut toutefois s'interroger sur les modalités de sa mise en oeuvre.

L'instauration des paiements uniques par exploitation, notamment, suscite de vives inquiétudes, exprimées non seulement dans le Tarn-et-Garonne et par mon collègue Jean-Michel Baylet, mais aussi sur d'autres travées de cette assemblée.

Comme vous le savez, le système est complexe. A ce titre, il appelle une nouvelle clarification.

Les droits à paiement unique, qui sont en réalité des droits marchands, ne risquent-ils pas de faire obstacle à l'installation des jeunes agriculteurs dans la mesure où ils pourraient soit renchérir le foncier, soit inciter l'exploitant détenteur du droit à le monnayer lors d'un transfert ?

Ensuite, sachant que les aides sont liées au respect des standards européens en matière d'environnement, de sécurité alimentaire, de bien-être des animaux et d'entretien des terres, qu'en est-il, monsieur le secrétaire d'Etat, des règles de la conditionnalité ? Seront-elles compatibles avec nos pratiques agricoles ?

L'agriculture doit demeurer au coeur du projet européen, d'autant que l'intégration récente de dix nouveaux pays au sein de l'Union a augmenté la superficie agricole de 30%.

C'est pourquoi il serait souhaitable que le Gouvernement définisse des modalités à la fois lisibles et équitables, ce qui n'est pas le cas aujourd'hui.

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Réponse du Secrétariat d'Etat à l'agriculture, à l'alimentation, à la pêche et aux affaires rurales publiée le 04/06/2004

Réponse apportée en séance publique le 03/06/2004

M. Nicolas Forissier, secrétaire d'Etat à l'agriculture, à l'alimentation, à la pêche et aux affaires rurales. Monsieur le sénateur, vous soulevez le problème de la réforme de la PAC, dont la mise en oeuvre est effectivement complexe et délicate.

Notre agriculture est entrée dans sa troisième phase de mutation. Nous devons la réussir.

Je souhaite tout d'abord rappeler que M. Gaymard a obtenu de haute lutte que le budget agricole soit garanti jusqu'en 2013. C'est très important, car cela donne dix ans de lisibilité à nos agriculteurs.

Un second combat, également très important pour les exploitants, a été mené avec succès : sur le découplage et les droits à paiement, la France a obtenu de Bruxelles le maintien d'un couplage partiel des aides à la production. Le Gouvernement a souhaité faire pleinement usage de cette marge de manoeuvre en maintenant le taux de couplage le plus élevé. Ainsi, en ce qui concerne la prime à la vache allaitante, le couplage est total.

S'agissant de la gestion des droits, ses modalités ont été arrêtées le 18 mai dernier lors du conseil supérieur d'orientation, avec l'accord des professionnels. Nous visons à cet égard deux objectifs : tout d'abord, éviter les comportements spéculatifs sur les droits par la taxation à 50 % des transferts de droits sans terre ; ensuite, favoriser l'installation des jeunes, dossier auquel le Premier ministre est très sensible.

Sur ce dernier point, je vous rappelle que les jeunes exploitants, dans les cinq ans de leur installation, seront exonérés de prélèvement sur les transferts de droits avec terre. La réserve de droits nationale constituée par des prélèvements initiaux permettra d'attribuer des droits gratuits à l'installation des jeunes.

La réforme entrant en vigueur le 1er janvier 2006, l'année 2005 sera une année de simulation, exploitation par exploitation, de façon à examiner la situation de chacune et à apporter les adaptations nécessaires.

En ce qui concerne la conditionnalité des aides, elle s'appliquera à partir de 2005. Elle vise à faire en sorte que les aides européennes soient assorties du respect de la législation européenne en matière d'environnement et de bien-être des animaux.

Nous sommes conscients que le monde agricole attend des précisions quant à la mise en oeuvre de cette conditionnalité. Un document explicatif sera élaboré dans les prochains mois et transmis à l'ensemble des agriculteurs, de façon que puissions réussir cette mutation à laquelle je vous sais très attaché.

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