Question de M. DOMEIZEL Claude (Alpes de Haute-Provence - SOC) publiée le 15/10/2004

Question posée en séance publique le 14/10/2004

M. Claude Domeizel. Monsieur le président, mesdames, messieurs les ministres, mes chers collègues, je tiens tout d'abord à dire qu'il est honteux que Mme Girardin ait qualifié de colonialiste la démarche d'un parlementaire se rendant en déplacement sur le territoire de la République. (Bravo ! et applaudissements sur les travées du groupe socialiste.)

M. Josselin de Rohan. C'est la vérité ! Elle a bien fait !

M. Claude Domeizel. Ma question s'adresse à Mme la ministre déléguée à la lutte contre la précarité et l'exclusion.

Madame la ministre, votre Gouvernement a fait le choix de réduire l'aide de l'Etat à l'emploi du secteur public et associatif. Les collectivités locales et les associations en sont les premières victimes, notamment le secteur de la petite enfance et les crèches.

Vous préférez tenter de stimuler l'emploi avant tout dans les entreprises privées, alors que l'Observatoire français des conjonctures économiques juge que l'emploi non marchand, que vous sanctionnez, n'est pas nécessairement improductif.

En 2000, on comptait 500 000 emplois aidés : les contrats emploi solidarité, CES, les contrats emplois consolidés, CEC, et les emplois-jeunes.

Aujourd'hui, il n'en reste plus que 200 000, eux-mêmes menacés, puisque vous persistez dans cette voie de réduction des emplois aidés.

Vous espériez la création de 200 000 de ces« contrats jeunes en entreprises » que vous avez instaurés. Aujourd'hui, vous annoncez l'embauche de 130 000 jeunes. Mais ces chiffres doivent être corrigés. En effet, il apparaît que les entreprises ont largement utilisé ce dispositif pour stabiliser des jeunes déjà employés dans l'entreprise en contrat à durée déterminée.

En outre, 20 % de ces contrats sont rompus au cours des six premiers mois. Nous sommes bien loin de vos prévisions.

De la même façon, les contrats d'insertion des jeunes dans la vie sociale, dits CIVIS, et les revenus minimum d'activité, les RMA, sont boudés par les deux secteurs concernés, marchand et non marchand.

M. Henri de Raincourt. Ce n'est pas vrai !

M. Josselin de Rohan. C'est vous qui les sabotez !

M. Claude Domeizel. Manifestement, ces mesures-là ne donnent satisfaction ni aux employeurs ni aux employés, qui sont encore plus précarisés.

Le chômage, quant à lui, ne baisse pas. Bien au contraire ! Il atteint aujourd'hui le taux de 9,9 % et touche 20 % des jeunes de moins de 25 ans.

M. Gérard Cornu. La question !

M. Claude Domeizel. Mesdames, messieurs les ministres, on compte aujourd'hui dans notre pays 2 700 000 chômeurs. Depuis que vous êtes aux affaires, chaque jour qui passe, il y a 400 chômeurs de plus. Et la progression continue, puisque l'ensemble de vos mesures pour l'emploi, que vous annonciez si « prometteuses », ne portent pas les fruits attendus.

M. Gérard Cornu. La question !

M. Claude Domeizel. J'en viens à ma question.

M. Henri de Raincourt. Cela vaut mieux !

M. Claude Domeizel. Aussi, comme tous les Français, nous aimerions connaître les mesures urgentes que vous comptez prendre pour corriger une situation de l'emploi en pleine dégradation.

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Réponse du Secrétariat d'Etat à l'insertion professionnelle des jeunes publiée le 15/10/2004

Réponse apportée en séance publique le 14/10/2004

M. Laurent Hénart, secrétaire d'Etat à l'insertion professionnelle des jeunes. Monsieur le sénateur, je vais répondre, non sur la Turquie, mais sur la question primordiale de l'emploi.

Je ferai deux remarques.

La première porte sur le constat que vous faites concernant les emplois aidés. Il faut prendre en compte l'ensemble des emplois aidés. Quand vous payez une partie du salaire net d'une personne embauchée dans une association, vous aidez l'emploi. Quand vous prenez à votre compte les charges sociales d'une entreprise, vous aidez tout autant l'emploi !

Il faut donc considérer les emplois aidés tout à la fois dans les associations, dans les collectivités publiques et dans les entreprises. De ce point de vue, les chiffres que vous avez avancés traduisent non pas une baisse des emplois aidés mais un rééquilibrage, c'est-à-dire une hausse des emplois aidés en entreprise.

M. Claude Domeizel. C'est faux !

M. Laurent Hénart, secrétaire d'Etat. Ma deuxième remarque concerne le contrat jeune en entreprise, que vous avez cité à juste titre. Mais on peut aussi évoquer le contrat initiative emploi, qui permet de relancer l'emploi des chômeurs de longue durée. Ce rééquilibrage vient compenser l'arrêt du programme des emplois-jeunes, arrêt que vous aviez vous-même prévu dans la loi de 1997, puisque ces contrats n'avaient qu'une durée de vie de cinq ans.

Il faut, sur ces sujets, faire preuve de modestie.

M. Jacques Mahéas. Là, au moins, nous sommes d'accord !

M. Laurent Hénart, secrétaire d'Etat. On pourrait longuement étudier le programme emplois-jeunes et le fait que seuls 30 % de ces emplois survivent à l'arrêt du subventionnement de l'Etat, ce qui prouve qu'ils ne sont pas pérennes, qu'ils ne sont pas durables.

M. Jacques Mahéas. Ce n'est pas vrai ! Ce n'est absolument pas vrai !

M. Laurent Hénart, secrétaire d'Etat. Sur ce point, je tiens à votre disposition des chiffres éloquents du ministère.

Aujourd'hui, de quoi s'agit-il ?

Il nous faut partir de deux constats.

Premièrement, les politiques d'emplois aidés menées depuis vingt ans se heurtent au fait que ces emplois ne sont pas durables et qu'ils sont insuffisamment adossés aux réalités du marché des emplois privés et publics.

M. Josselin de Rohan. C'est vrai !

M. Laurent Hénart, secrétaire d'Etat. Les maisons de l'emploi ont pour but de compenser ce handicap. Leur première mission est de réaliser une gestion prévisionnelle des emplois, en entreprise comme dans les services publics, dans chaque agglomération, et d'ouvrir, prioritairement dans ces métiers, des voies de formation et de reconversion, afin que toute formation, tout emploi aidé, ait un lendemain.

Deuxièmement, nous sommes dans une situation paradoxale. D'un côté, 4 millions de Français sont sans emploi, chômeurs, bénéficiaires du RMI, de l'allocation de solidarité spécifique, l'ASS, de l'allocation de parent isolé. Or, dans le même temps, 400 000 emplois sont vacants, correspondant à des branches économiques qui ne trouvent pas la main-d'oeuvre nécessaire à leur développement et à la croissance.

Mme Nicole Borvo. Cela ne fait pas le compte !

M. Laurent Hénart, secrétaire d'Etat. La priorité des priorités est donc d'aider ces branches qui ne parviennent pas à recruter, dans le privé comme dans le public. On peut ainsi citer le secteur du bâtiment ou les métiers sanitaires et sociaux.

M. Josselin de Rohan. Très bien !

Mme Nicole Borvo. Il faut former et payer les gens !

M. Laurent Hénart, secrétaire d'Etat. Nous mettons donc en oeuvre une réforme qui vise à simplifier les emplois aidés.

Vous avez cité, par exemple, le contrat d'insertion pour le RMA. Il y manquait des droits sociaux : Nelly Olin a veillé à ce que ceux-ci figurent dans le plan de cohésion sociale.

Vous avez enfin cité le contrat jeune en entreprise : il en existe désormais 200 000, et nous continuons à développer ce support.

Mme Nicole Borvo. Depuis trois ans, ça ne marche pas !

M. Laurent Hénart, secrétaire d'Etat. Je citerai également deux autres grands contrats.

Tout d'abord, le contrat d'avenir : 1 million de ces contrats permettront, dans les quatre ans à venir, à des bénéficiaires du RMI de renouer avec le travail dans ces métiers qui recrutent.

Mme Nicole Borvo. On aurait déjà dû voir le résultat !

Mme Hélène Luc. Faites-nous un bilan !

M. Laurent Hénart, secrétaire d'Etat. Ensuite, le contrat d'accompagnement à l'emploi, qui remplace sept emplois aidés successifs, permet une simplification et confère un pouvoir de décision beaucoup plus important aux mairies et aux territoires dans le montage concret de l'emploi aidé.

Mme Nicole Borvo. Combien de personnes ont été embauchées par des entreprises ?

M. Laurent Hénart, secrétaire d'Etat. Il existe deux grandes différences entre ces deux types de contrat et ceux que vous aviez mis en place.

Premièrement, ces contrats débouchent sur des métiers qui recrutent.

Deuxièmement, ils prévoient toujours un temps de formation : le quart du temps de travail, au moins, est consacré à une formation qualifiante, ce qui n'était le cas ni des emplois-jeunes ni des CES ni des CEC que vous avez mis en place.

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