Question de M. TESTON Michel (Ardèche - SOC) publiée le 20/10/2004

M. Michel Teston appelle l'attention de Mme la ministre déléguée à l'industrie sur le caractère dissuasif du mode de calcul des redevances d'usage des fréquences hertziennes, pour les projets en zones rurales. Le déploiement des réseaux de télécommunications à haut débit dans les zones enclavées ou à faible densité de population ne peut s'envisager qu'au moyen de systèmes hertziens, les technologies filaires impliquant, pour le moment, un investissement trop onéreux. Or, le mode de calcul des deux redevances dites de gestion et de mise à disposition des fréquences radioélectriques, prévues au décret du 3 février 1993, est de nature à dissuader le recours à ces techniques. Ainsi, le syndicat intercommunal à vocation unique des inforoutes de l'Ardèche, qui a créé un réseau hertzien MMDS, doit s'acquitter d'un montant supérieur à 65 000 euros auprès de l'Autorité de régulation des télécommunications (ART) pour les deux redevances. En effet, le montant des redevances dues est proportionnel à la taille de la zone de couverture du réseau, mais l'ART n'attribue pas de fréquence sur des territoires plus restreints que celui de la région. En conséquence, le surcoût engendré, sans commune mesure avec le nombre d'utilisateurs réellement desservis, est préjudiciable au développement des zones à faible densité de population du département. Compte tenu des enjeux majeurs qui se posent aux territoires faiblement peuplés et de l'importance du désenclavement numérique, rappelé à nouveau par le CIADT du 13 septembre 2004, il lui demande quelles dispositions il envisage de prendre pour lever cette véritable barrière fiscale et permettre de favoriser de telles initiatives locales qui visent à mettre en oeuvre des solutions adaptées pour accéder à l'Internet à haut débit dans les départements ruraux.

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Réponse du Ministère délégué au commerce extérieur publiée le 03/11/2004

Réponse apportée en séance publique le 02/11/2004

M. Michel Teston. Monsieur le ministre, mes chers collègues, dans son édition du 15 septembre dernier, Le Monde titrait, à propos des décisions du comité interministériel pour l'aménagement et le développement du territoire du 13 septembre 2004 : « Le "rural profond" attend toujours l'Internet à haut débit », ...

M. Gérard Delfau. Eh oui !

M. Michel Teston. ... mettant ainsi en relief la persistance de ce qu'il est aujourd'hui convenu de nommer « la fracture numérique ». Dans le département de l'Ardèche, nous sommes quotidiennement confrontés à cette réalité, à laquelle nous ne nous résignons pas.

Ainsi, le syndicat intercommunal à vocation unique des inforoutes de l'Ardèche a créé, en 1995, un réseau hertzien de type MMDS - microwave multipoint distribution system - qu'il exploite dans le but de mettre en oeuvre des solutions d'accès à Internet à haut débit pour les zones non desservies par l'ADSL.

En effet, le déploiement des réseaux de télécommunications à haut débit dans les zones enclavées ou à faible densité de population ne peut s'envisager qu'au moyen de systèmes hertziens, les technologies filaires impliquant, pour le moment, un investissement trop onéreux.

Toutefois, une difficulté financière vient s'ajouter aux contingences techniques : le mode de calcul des deux redevances dites « de gestion » et « de mise à disposition des fréquences radioélectriques » prévues par le décret du 3 février 1993 est de nature à dissuader le recours aux systèmes hertziens.

Par exemple, au titre d'exploitant, pour les deux redevances, le SIVU des inforoutes de l'Ardèche doit s'acquitter auprès de l'Autorité de régulation des télécommunications, l'ART, d'un montant supérieur à 65 000 euros. En effet, le montant des redevances dues est proportionnel à la taille de la zone de couverture du réseau, mais l'ART n'attribue pas de fréquences sur des territoires plus restreints que celui de la région. En conséquence, le surcoût ainsi engendré est sans commune mesure avec le nombre d'utilisateurs réellement desservis.

Compte tenu des enjeux majeurs en termes de développement pour les territoires faiblement peuplés et de l'importance que le Gouvernement dit accorder au désenclavement numérique, il est vital de lever cette véritable barrière fiscale, préjudiciable aux initiatives locales dans ces territoires.

Aussi, monsieur le ministre, je vous demande de me préciser dans quelle mesure il serait envisageable de définir, pour les exploitants qui interviennent dans les zones enclavées ou à faible densité de population, un barème spécifique pour ces redevances ou de mettre en oeuvre, à titre dérogatoire, une redevance réduite, comme c'est déjà le cas pour les départements d'outre-mer.

Mme la présidente. La parole est à M. le ministre délégué.

M. François Loos, ministre délégué au commerce extérieur. Monsieur le sénateur, les fréquences radioélectriques, pour l'Internet à haut débit, ont évidemment de l'avenir, mais un certain nombre de principes méritent tout de même d'être rappelés.

L'utilisation des fréquences radioélectriques constitue un mode d'occupation privatif du domaine public de l'Etat. A ce titre, il est normal qu'elle soit assujettie à une redevance.

Comme vous le rappelez, les redevances de mise à disposition et de gestion des fréquences radioélectriques sont définies par le décret du 3 février 1993, signé par le ministre des postes et des télécommunications de l'époque, M. Emile Zuccarelli.

Le Gouvernement mesure l'ampleur du problème et ne ménage pas ses efforts pour que les redevances d'usage des fréquences ne constituent pas un obstacle au développement des nouvelles technologies, notamment dans les zones rurales. Voilà pour le principe.

Concrètement, le décret du 3 février 1993 a été modifié à plusieurs reprises pour tenir compte des développements technologiques et de l'évolution du marché. Pour ne citer que le dernier exemple en date, ce décret a encore été modifié en 2003 pour faciliter le développement des technologies d'accès par satellite à Internet à haut débit.

Quant au syndicat intercommunal à vocation unique des inforoutes de l'Ardèche, il dispose depuis le 17 janvier 2002 d'une autorisation de fréquence dans la bande 3,5-3,7 gigahertz pour l'établissement d'un réseau radioélectrique indépendant du service fixe, délivrée à titre expérimental par l'Autorité de régulation des télécommunications. Cette autorisation, dont la durée initiale était d'un an, a été prolongée à trois reprises et arrivera à son terme le 31 décembre 2004.

Dans le cadre de son autorisation expérimentale, le SIVU acquittait des redevances d'un montant total de 8 277,96 euros et non, comme vous l'avez dit, monsieur le sénateur, de 65 000 euros.

Par ailleurs, l'ART a lancé le 9 juillet dernier une consultation publique pour évaluer l'intérêt des acteurs pour les technologies de bande locale radio dans les bandes de fréquences utilisées par le SIVU.

Cette démarche est justifiée par l'émergence de nouvelles technologies dans cette bande de fréquences, comme WiMax, pour lesquelles de nombreux acteurs, notamment des collectivités territoriales, envisagent des redéploiements.

L'ART sera par la suite amenée à proposer de nouvelles modalités d'attribution de ces fréquences, qui pourraient entraîner dans certains cas des attributions dans des zones géographiques de taille inférieure à la région, comme vous le souhaitez, monsieur le sénateur.

Dans ce contexte, le système de calcul de la redevance étant proportionnel à la surface couverte, de telles attributions résoudraient, me semble-t-il, les difficultés que rencontre le SIVU des inforoutes de l'Ardèche, que vous avez cité en exemple.

Mme la présidente. La parole est à M. Michel Teston.

M. Michel Teston. Monsieur le ministre, ma question est simple : s'agissant de l'usage des fréquences hertziennes, est-il possible que les territoires dont la densité de population est faible bénéficient d'un barème spécial de redevance ?

Si vous avez répondu favorablement à ma demande sur le principe, monsieur le ministre, il n'en demeure pas moins que, sur le fond, vous ne m'avez pas apporté de réponse satisfaisante.

Vous avez évoqué l'autorisation expérimentale accordée au SIVU des inforoutes de l'Ardèche. Or il est bien évident que les tarifs qui s'appliqueront durant la phase d'exploitation seront bien plus élevés que ceux de la phase expérimentale.

Dans ces conditions, je ne suis pas totalement satisfait de votre réponse, monsieur le ministre. La spécificité de certains territoires devrait, me semble-t-il, être reconnue. Si tel n'était pas le cas, nous savons que, en plus des difficultés d'installation et d'équipements, ces territoires rencontreront des difficultés quant à l'usage.

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