Question de Mme BLANDIN Marie-Christine (Nord - SOC-R) publiée le 05/11/2004

Question posée en séance publique le 04/11/2004

Mme Marie-Christine Blandin. Ma question, que je pose au nom des Verts, s'adresse à M. Perben, garde des sceaux, ministre de la justice.

J'espère obtenir une vraie réponse,...

M. Dominique Braye. Pour cela, il faut une vraie question !

Mme Marie-Christine Blandin. ...à la différence de celle qui a été donnée à notre ami Louis Le Pensec devant la délégation polynésienne, qui était attentive mais qui reste sur sa faim. (Applaudissements sur les travées du groupe socialiste.)

Lundi 8 novembre, neuf personnes sont convoquées devant le tribunal correctionnel de Toulouse.

M. Alain Gournac. Elles ne l'ont pas volé !

Mme Marie-Christine Blandin. Elles sont poursuivies pour dégradation et destruction de maïs : parmi eux, se trouvent un député et un parlementaire européen.

Mon propos n'est pas ici d'ouvrir un débat sur les organismes génétiquement modifiés, ou sur la pertinence de la désobéissance civile ou civique.

M. Dominique Braye. Mais il s'agit bien de cela !

Mme Marie-Christine Blandin. Ma question concerne le fonctionnement de notre justice.

Parmi quatre cents faucheurs assumant leurs actes, les parlementaires seuls ont été l'objet d'une enquête de flagrance. On ne peut que se féliciter du fait que le bureau de l'Assemblée nationale et son président s'en soient émus et soient intervenus auprès de M. le garde des sceaux.

M. Dominique Braye. Délation !

Mme Marie-Christine Blandin. A ce jour, neuf personnes sur les quatre cents sont convoquées au tribunal. Or les policiers connaissent bien tous les autres ; ils les ont largement photographiés et identifiés ; ceux-ci ont, de plus, fait une démarche auprès des forces de l'ordre de déclaration volontaire de leur présence et de leur action, en y joignant leurs coordonnées. Nous ne sommes pas dans le cas d'une identification par défaut.

M. Dominique Braye. C'est de la délation !

Mme Marie-Christine Blandin. Il y a donc une discrimination dans l'action de la justice envers neuf personnes.

M. Dominique Braye. Bien sûr !

Mme Marie-Christine Blandin. Et le procureur n'ignore pas les circonstances, puisque, au lieu de demander deux ans et 30 000 euros d'amende, il demande cinq ans et 75 000 euros d'amende, pour circonstance aggravante de l'infraction commise « en réunion par plus de quatre cents personnes ».

M. Dominique Braye. Il s'agit de donner l'exemple !

Mme Nicole Borvo. Cela n'existe pas la justice pour l'exemple ! Ce n'est pas un tribunal militaire !

Mme Marie-Christine Blandin. Je sais que la justice française, contrairement à ce qui se passe dans d'autres démocraties, peut se prévaloir de l'opportunité des poursuites.

M. Dominique Braye. La question !

Mme Marie-Christine Blandin. En la matière, l'opportunité semble étrangement ciblée !

J'ai bien noté que M. Perben, ministre de la justice, se faisait représenter par Mme la secrétaire d'Etat aux droits des victimes. (Protestations sur les travées de l'UMP.)

M. Dominique Braye. Et alors ? Il a le droit !

M. le président. Veuillez poser votre question, madame Blandin.

Mme Marie-Christine Blandin. En la matière, mon questionnement porte sur les victimes des choix du procureur.

Je vous demande donc, madame la secrétaire d'Etat, de nous préciser les critères qui ont, pour ces neuf personnes, conduit le procureur à mettre en oeuvre une discrimination de poursuites aux aspects peu républicains.

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Réponse du Secrétaire d'Etat aux droits des victimes publiée le 05/11/2004

Réponse apportée en séance publique le 04/11/2004

Mme Nicole Guedj, secrétaire d'Etat aux droits des victimes. Madame la sénatrice, M. Dominique Perben étant retenu à Troyes cet après-midi, il m'a chargé de répondre à votre question.

En effet, le 24 juillet dernier, un collectif dit de « faucheurs volontaires » a détruit un champ de maïs en Haute-Garonne.

M. Dominique Braye. C'est scandaleux !

Mme Nicole Guedj, secrétaire d'Etat. Le parquet de Toulouse a immédiatement engagé une enquête préliminaire, et ce afin de procéder à l'identification des auteurs, sachant que, pour des raisons d'ordre public, il n'a évidemment pas été procédé sur le moment à l'interpellation des auteurs.

Neuf personnes, effectivement, ont été plus aisément identifiées,...

Mme Nicole Borvo. Oh !

Mme Nicole Guedj, secrétaire d'Etat. ...et il ne peut en aucun cas être question de discrimination.

Mme Nicole Borvo. C'est insupportable, en matière judiciaire, d'entendre ça !

Mme Nicole Guedj, secrétaire d'Etat. Ces personnes sont en effet renvoyées devant le tribunal correctionnel de Toulouse, lundi prochain.

Pour les autres, un peu de patience, l'enquête est en cours. L'identification de tous les auteurs sera faite, mais selon les modes de preuve de notre droit, à savoir des preuves formelles.

M. Michel Dreyfus-Schmidt. Des photos ?

Mme Nicole Borvo. Parce qu'on a des preuves formelles pour ces neuf personnes et pas pour les autres ? C'est étonnant !

Mme Nicole Guedj, secrétaire d'Etat. Je dis bien « des preuves formelles », à l'exclusion de tout autre mode de preuve, et ce à la fois pour l'identification et pour les conditions de participation des différents auteurs.

Lorsque cette enquête aura abouti, ne doutez pas, madame la sénatrice, que ces personnes seront, de la même façon que les neuf premières, poursuivies en correctionnelle.

J'ajoute que l'autodénonciation ne vaut pas preuve. Dans notre droit, il faut appliquer toutes nos règles, qu'il s'agisse de celles qui concernent l'identification ou de celles qui ont trait aux conditions de participation. Il faut que toutes les conditions et que toutes les preuves soient réunies !

M. Bernard Piras. Ce n'est pas facile !

Mme Nicole Guedj, secrétaire d'Etat. En effet, nos règles de preuve et nos règles de droit s'imposent à tous et, pour le cas où vous en douteriez, madame la sénatrice, bénéficient à tous. Pour le moment, attendons la fin de l'enquête.

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