Question de Mme BLANDIN Marie-Christine (Nord - SOC-R) publiée le 19/11/2004

Mme Marie-Christine Blandin souhaite interroger M. le ministre de l'intérieur, de la sécurité intérieure et des libertés locales sur les conditions qui ont amené le Gouvernement à accorder la nationalité française à l'ex-président fondateur de Daewoo (J.O. du 7 avril 1987). C'est en effet avec 35 millions d'euros de subventions publiques que Daewoo avait promis en 1987 des implantations porteuses d'emplois en Lorraine sinistrée, et c'est dix ans plus tard que les liquidations s'enchaînent... Les Coréens également touchés en 1999 ont fait part de leur révolte : l'ex-président de Daewoo, en fuite, a laissé un groupe endetté de plus de 50 milliards de dollars et des milliers de licenciements. Une délégation syndicale coréenne s'est même rendue en France. Avec des Lorrains, ils ont manifesté devant la résidence niçoise de l'ex-président condamné en 1995 à Séoul pour corruption, et figurant sur la liste rouge d'Interpol des personnes les plus recherchées de la planète depuis 2001. Alors que la Corée demande officiellement depuis 1999 son extradition et que la nationalité française accordée par notre Gouvernement le soustrait à la justice de son pays, alors que des centaines de réfugiés honnêtes se voient refoulés aux frontières ou poursuivis autour de Sangatte, désormais dépourvus de lieu humanitaire, comment peut-on justifier l'accueil et la protection de ce " patron-voyou " ?

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Transmise au Ministère de l'emploi, du travail et de la cohésion sociale


Réponse du Secrétariat d'Etat aux transports et à la mer publiée le 22/12/2004

Réponse apportée en séance publique le 21/12/2004

Mme Marie-Christine Blandin. Je souhaite interroger M. le ministre de l'intérieur ou M. le ministre de l'emploi sur les conditions qui ont amené le Gouvernement à accorder la nationalité française à l'ex-président fondateur de Daewoo.

C'est en effet avec 35 millions d'euros de subventions publiques que Daewoo avait promis, en 1987, des implantations porteuses d'emplois en Lorraine sinistrée. Et c'est dix ans plus tard que les liquidations s'enchaînent !

Les Coréens, également touchés en 1999, ont fait part de leur révolte : l'ex-président de Daewoo, en fuite, a laissé un groupe endetté de plus de 50 milliards de dollars et des milliers de licenciements.

Une délégation syndicale coréenne s'est même rendue en France et a manifesté avec des Lorrains devant la résidence niçoise de M. Kim, condamné en 1995 à Séoul pour corruption. Son nom figure d'ailleurs depuis 2001 sur la liste rouge d'Interpol : celle des personnes les plus recherchées de la planète.

Depuis 1999, la Corée du Sud demande officiellement son extradition, mais la nationalité française qui lui a été accordée par notre gouvernement le soustrait à la justice de son pays d'origine. Alors que des centaines de réfugiés honnêtes se voient refoulés à nos frontières ou poursuivis dans les environs de Sangatte, où n'existe plus désormais de lieu d'accueil humanitaire, comment peut-on justifier la protection accordée à ce « patron voyou » ?

M. le président. La parole est à M. le secrétaire d'Etat.

M. François Goulard, secrétaire d'Etat aux transports et à la mer. Madame la sénatrice, M. Borloo m'a chargé de vous transmettre les éléments de réponse qui suivent.

M. Kim Woo Choong, sa femme et ses enfants ont obtenu la nationalité française par décret du 2 avril 1987, publié au Journal officiel du 7 avril 1987.

Je crois qu'il faut se garder de tout amalgame en pareille matière : il y a des faits et il y a le droit. Les conditions de l'obtention de la nationalité française sont très claires et, à l'époque, il a été considéré que la demande de M. Kim était recevable en application de l'article 78, 1°, du code de la nationalité française, alors en vigueur. Je vous en rappelle les termes :

« Est assimilé à la résidence en France lorsque cette résidence constitue une condition à l'acquisition de la nationalité française :

« 1° le séjour hors de France d'un étranger qui exerce une activité professionnelle publique ou privée pour le compte de l'Etat français ou d'un organisme dont l'activité présente un intérêt particulier pour l'économie ou la culture française. »

Aux termes de la jurisprudence du Conseil d'Etat, la naturalisation est une faveur. Aussi la naturalisation de M. Kim et de sa famille a-t-elle été décidée en opportunité, en 1987, en fonction des considérations que je viens d'évoquer.

M. le président. La parole est à Mme Marie-Christine Blandin.

Mme Marie-Christine Blandin. Je ne fais pas d'amalgame, monsieur le secrétaire d'Etat, mais la cohésion sociale dont nous sommes tous responsables repose sur la confiance dans la République. Or il est injuste et très mal ressenti que des innocents potentiellement utiles à notre pays - parmi les réfugiés de Sangatte, il y a des médecins, des ingénieurs... - soient livrés au froid, à l'hostilité des institutions et à la clandestinité, tandis que l'individu dont il est ici question est à l'abri sur la Riviera, après avoir bénéficié d'une grande sollicitude, voire, comme vous l'avez dit, d'une faveur.

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