Question de M. LAGAUCHE Serge (Val-de-Marne - SOC) publiée le 28/01/2005

Question posée en séance publique le 27/01/2005

M. Serge Lagauche. Ma question s'adresse à M. le ministre de l'éducation nationale, de l'enseignement supérieur et de la recherche.

Malgré la réforme des retraites, malgré le transfert des techniciens ouvriers et de service, les TOS, imposé aux collectivités et à la communauté éducative, enseignants et parents d'élèves continuent, plus que jamais, à dire non à vos projets : non aux suppressions massives et répétées de postes d'enseignants, d'aides-éducateurs et de contrats emploi-solidarité, les CES, non à l'amputation des crédits pédagogiques et de la formation professionnelle, non au sacrifice de l'éducation artistique et culturelle à l'école, non à l'abandon de la scolarisation dès deux ans, non à la fermeture de formations et sections entières dans les lycées professionnels, non à la fermeture de classes préparatoires en zone sensible et, maintenant, non à votre projet de loi d'orientation pour l'école !

Près de 50 % de grévistes dans le premier degré, les collèges, les lycées professionnels ou ceux d'enseignement général et technologique : tel est le bilan de la mobilisation dans l'éducation nationale la semaine dernière.

Malgré un vote massif et franc du Conseil supérieur de l'éducation contre votre réforme et la mobilisation des enseignants et des parents contre votre texte, vous refusez tout net de revoir votre copie et de prendre en considération les conclusions du grand débat national sur l'avenir de l'école.

Vous institutionnalisez les inégalités par un retour à de vieilles méthodes rétrogrades, complètement inadaptées aux élèves d'aujourd'hui, par le renoncement à lutter contre les inégalités sociales, économiques et culturelles, par l'absence de politique d'éducation prioritaire, par la réapparition de la sélection précoce, en réservant la découverte professionnelle en troisième aux seuls élèves en difficulté, et en instaurant le préapprentissage à partir de quatorze ans.

Votre vision de l'éducation est minimaliste, car elle se réduit à la scolarité obligatoire ! Elle laisse de côté à la fois l'école maternelle et la démocratisation de l'enseignement supérieur. (Protestations sur les travées de l'UMP.)

M. Josselin de Rohan. Ce n'est pas une question !

M. Serge Lagauche. Il y a un abîme entre les ambitieuses déclarations et la réalité budgétaire de votre politique depuis deux ans et demi.

Allez-vous enfin dégager les investissements nécessaires à la sauvegarde du service public de l'éducation ?

M. René-Pierre Signé. Bien sûr que non !

M. Serge Lagauche. Allez-vous réactiver le plan pluriannuel de recrutement dont l'éducation nationale a tant besoin ?

Allez-vous donner les moyens nécessaires à une véritable école de l'égalité des chances dans le cadre d'une société éducative, de la maternelle à l'université ?

Enfin, quand allez-vous dialoguer avec ceux qui sont le plus concernés : les parents d'élèves et les enseignants ?

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Réponse du Ministère de l'éducation nationale, de l'enseignement supérieur et de la recherche publiée le 28/01/2005

Réponse apportée en séance publique le 27/01/2005

M. François Fillon, ministre de l'éducation nationale, de l'enseignement supérieur et de la recherche. Monsieur le sénateur, il y a un paradoxe que, par confort intellectuel et politique, l'opposition refuse de voir : depuis quinze ans, la France est, parmi tous les pays de l'OCDE, celui qui consacre le plus d'argent à l'éducation, soit aujourd'hui 23 % du budget de l'Etat.

M. Robert Del Picchia. Eh oui !

M. René-Pierre Signé. Ce n'est pas grâce à vous !

M. Jacques Mahéas. C'est grâce aux socialistes !

M. François Fillon, ministre. Depuis quinze ans, le nombre des élèves scolarisés dans l'enseignement primaire et secondaire public a diminué de 500 000 et le nombre des enseignants, au sein du même système, a augmenté de 100 000.

M. René-Pierre Signé. C'est bien !

M. François Fillon, ministre. Les résultats sont-ils au rendez-vous ? Non, ils se dégradent !

M. Charles Revet. C'est très grave !

M. François Fillon, ministre. Aujourd'hui, 150 000 jeunes sortent tous les ans du système éducatif sans aucun diplôme et sans aucune qualification, et ce nombre est en augmentation.

A l'entrée en sixième, 80 000 jeunes ne savent pratiquement ni lire, ni écrire, ni compter. (Marques d'approbation sur les travées de l'UMP.)

La France obtient les plus mauvais résultats de l'Union européenne pour l'apprentissage des langues.

Mme Nicole Borvo Cohen-Seat. Les critères d'évaluation sont manipulés !

M. François Fillon, ministre. Enfin, l'objectif de 80 % d'une classe d'âge atteignant le niveau du baccalauréat, qui faisait l'objet de la loi de 1989, est loin d'être atteint, puisque nous plafonnons à un taux variant entre 66 % et 67 %.

Il faut donc bien, monsieur le sénateur, engager une réforme de l'éducation nationale, mais pas sur la base que vous venez d'indiquer, c'est-à-dire sur l'addition de moyens, sans stratégie ni réorganisation ! (Bravo ! et applaudissements sur les travées de l'UMP et de l'UC-UDF.)

J'ai retenu du grand débat national sur l'avenir de l'école et des conclusions de la commission Thélot l'innovation la plus importante : la définition d'un socle de connaissances et de compétences fondamentales. Nous allons nous engager à les faire acquérir à l'ensemble des élèves durant la période de la scolarité obligatoire, grâce à la mise en oeuvre d'une pédagogie personnalisée, reposant notamment sur trois heures de soutien scolaire par semaine.

Mme Nicole Borvo Cohen-Seat. Avec quels moyens ? Qui assurera ce soutien ?

M. François Fillon, ministre. De la même façon, nous allons réformer de manière radicale l'enseignement des langues dans notre pays en dédoublant les cours et en mettant en place des groupes de niveau qui permettront d'avoir une approche différente de cet enseignement.

Mme Nicole Borvo Cohen-Seat. C'est démagogique ! Qui assurera les heures de soutien ?

M. François Fillon, ministre. Enfin, nous allons réformer la formation des maîtres en intégrant pleinement les instituts de formation des maîtres au sein de l'université.

Maintenant, le débat va avoir lieu devant le Parlement, monsieur le sénateur, ce qui est normal, puisque l'école appartient à la nation, et pas seulement à la communauté éducative. (Applaudissements sur les travées de l'UMP et de l'UC-UDF, ainsi que sur certaines travées du RDSE.)

Mme Nicole Borvo Cohen-Seat. Elle n'appartient pas non plus au ministre de l'éducation nationale de la majorité en place !

M. François Fillon, ministre. Je suis certain que, dans ce débat, le sénateur que vous êtes - ainsi que votre groupe - aura à coeur de formuler de vraies propositions et d'imaginer de véritables alternatives : par exemple, le socle de connaissances et de compétences fondamentales, qui était au coeur du dernier projet du parti socialiste en matière d'éducation.

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