Question de M. SUTOUR Simon (Gard - SOC) publiée le 18/03/2005

Question posée en séance publique le 17/03/2005

M. Simon Sutour. Ma question s'adresse à M. le ministre délégué à l'industrie.

Des décisions lourdes de conséquences pour l'emploi et la pérennité du site de production, situé à Vergèze, de l'eau minérale naturelle Perrier, déclarée d'intérêt public, sont en cours d'élaboration. L'administrateur délégué du groupe Nestlé a d'ailleurs indiqué que l'option de vendre Perrier était toujours d'actualité. Richard Girardot, président-directeur général de Nestlé Waters France a, quant à lui, indiqué : « L'année 2005 sera l'année d'une réorganisation globale, avec pour objectif de gagner 25 % à 30 % de productivité et de réaliser au moins 5 % de rentabilité sur la marque Perrier ».

Cette stratégie repose sur une politique de mise en oeuvre de préretraites et de licenciements. Toutefois, j'appelle l'attention du Sénat sur une autre option envisagée, à savoir la délocalisation du site de production, y compris hors du territoire national.

M. René-Pierre Signé. C'est honteux !

M. Simon Sutour. Aussi, il est stupéfiant d'entendre le responsable des opérations de Nestlé en Asie, en Afrique et au Moyen-Orient, affirmer : « légalement, nous pouvons produire ailleurs »,...

M. Roland Courteau. C'est scandaleux !

M. Simon Sutour.... et ce sans exprimer le moindre souci quant au véritable site de production et à ses employés.

Le comité d'établissement de Vergèze s'est donné pour objectif de lier définitivement la marque Perrier à son bassin d'alimentation, afin de protéger le site de production et les emplois.

Cette démarche est soutenue par les élus des communes du département du Gard : les entreprises qui exploitent des produits liés à un territoire doivent respecter l'environnement patrimonial et social.

Des engagements sur la restructuration de l'usine ont été pris en préfecture du Gard, en présence du ministre de l'industrie. C'est sur cette base que le syndicat CGT a accepté de lever son droit d'opposition. Depuis, les tensions se multiplient entre direction et personnel, et l'épée de Damoclès de la délocalisation est régulièrement brandie par le groupe Nestlé.

Coïncidence, lundi dernier, le tribunal de grande instance de Nîmes a suspendu la filialisation du site de Vergèze, en condamnant le groupe Nestlé Waters France pour défaut de consultation du personnel.

On se trouve aujourd'hui en présence de deux logiques contradictoires : d'un côté, je partage avec les autres élus gardois et les syndicalistes la conviction que la source Perrier doit profiter au bassin d'emplois ; de l'autre, certaines personnes ne considèrent cette source que comme un point sur une carte, qui ne sert qu'à rapporter de l'argent.

Face à cette situation, monsieur le ministre, je vous demande de bien vouloir indiquer la position du Gouvernement sur le projet de délocalisation du site de production de la source Perrier. En outre, dans quelles mesures comptez-vous soutenir la demande de classement de la source en appellation d'origine contrôlée ou en appellation géographique contrôlée, afin que le produit « Perrier » soit rattaché à son bassin d'alimentation, ce qui permettrait, par voie de conséquence, d'interdire sa délocalisation ?

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Réponse du Ministère délégué à l'industrie publiée le 18/03/2005

Réponse apportée en séance publique le 17/03/2005

M. Patrick Devedjian, ministre délégué à l'industrie. Monsieur Sutour, le conflit à propos de Perrier entre Nestlé et les travailleurs du secteur préoccupe beaucoup le Gouvernement qui suit cette affaire avec beaucoup d'attention.

La question du devenir de l'appellation « Perrier » concerne deux aspects bien différents, qui méritent une courte explication juridique.

En effet, « Perrier », c'est à la fois une marque, qui appartient au groupe Nestlé, et la dénomination d'une eau minérale, qui ne peut pas être une appellation d'origine contrôlée mais qui ressort juridiquement au régime réglementaire des eaux minérales.

Au titre de la marque, il n'y a pas d'actions juridiques possibles puisque, aux termes de l'article L. 716-5 du code de la propriété intellectuelle, l'action éventuelle en contrefaçon appartient exclusivement au propriétaire de la marque, qui est le seul à pouvoir défendre son bien.

En revanche, la directive de 1980, transposée dans le droit national, dispose que chaque source d'eau minérale doit faire l'objet d'une mention d'origine. Or la source « Perrier » correspond bien à un lieu géographique.

Par conséquent, si Nestlé souhaite utiliser l'appellation « Perrier » pour une eau provenant d'une autre source, il pourra utiliser cette appellation en tant que marque, mais pas en tant que marque d'origine.

Or, dans un souci de protection du consommateur, la directive prévoit l'obligation de mentionner, sur l'étiquette, le nom de la source de l'eau en caractères infiniment plus gros que ceux qui sont utilisés pour la marque éventuellement apposée.

Tel est l'état du droit. Si Nestlé envisage d'agir ainsi, à mon avis, le consommateur ne s'y trompera pas !

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