Question de M. REPENTIN Thierry (Savoie - SOC) publiée le 28/04/2005

M. Thierry Repentin appelle l'attention de M. le ministre délégué au logement et à la ville sur les conséquences de l'arrêté du 30 avril 2004, fixant un seuil de 24 euros par mois en dessous duquel l'aide personnalisée au logement (APL) n'est plus versée. Cet arrêté, comme le relève le Médiateur de la République dans une lettre envoyée spontanément au ministère est « déni de droit ». La conséquence de cette réglementation vis-à-vis des foyers modestes est une privation d'une prestation d'un montant non négligeable, à savoir près de 290 euros par an. De son côté, l'aide personnalisée au logement a fait l'objet au 1er juillet 2003 d'une actualisation des barèmes en tenant compte de l'évolution de la valeur moyenne de l'indice des prix à la consommation et de la réévaluation des loyers plafonds. Cependant, l'actualisation de ces paramètres n'a pas permis de faire évoluer les aides personnelles au même rythme que le coût de la vie, d'où une perte de pouvoir d'achat. De plus, l'an dernier ces évolutions ont été contrebalancées par des mesures d'économies sur les barèmes pour un montant de 18 millions d'euros. Tout ceci a pour conséquence un décalage entre l'inflation et la progression des aides au logement de plus en plus accru. C'est pourquoi il lui demande si, face aux difficultés financières auxquelles sont confrontés un nombre croissant de ménages modestes, le Gouvernement entend revenir sur l'arrêté du 30 avril 2004 et réévaluer à leur juste mesure les aides au logement qui concernent près de sixmillions de foyers.

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Transmise au Ministère de l'emploi, de la cohésion sociale et du logement


Réponse du Ministère délégué à l'aménagement du territoire publiée le 29/06/2005

Réponse apportée en séance publique le 28/06/2005

M. Thierry Repentin. Cette question relative aux aides personnalisées au logement comporte deux volets.

Je voudrais tout d'abord attirer l'attention de M. le ministre sur les conséquences d'un arrêté, en date du 30 avril 2004, fixant un seuil de 24 euros par mois en deçà duquel l'aide personnalisée au logement n'est plus versée.

Cette mesure, comme le relève l'excellent Médiateur de la République, M. Jean-Paul Delevoye, dans une lettre adressée spontanément au ministre chargé du logement, est vécue par les personnes concernées comme un « déni de droit ».

La conséquence de l'application de cette réglementation nouvelle, pour les foyers modestes, est la privation d'une prestation d'un montant non négligeable, puisqu'il est de près de 290 euros par an. Quelque 115 000 foyers français sont frappés, chiffre qui devrait d'ailleurs augmenter au 1er janvier 2005.

Le profil type du ménage concerné est le couple avec deux enfants disposant de revenus mensuels inférieurs à 1 900 euros par mois. On ne peut pourtant pas dire qu'il soit très riche ! Pour un célibataire, la mesure s'applique dès lors qu'il perçoit un salaire proche du SMIC sans que ce niveau soit atteint.

En outre, l'aide personnalisée au logement a fait l'objet, au 1er janvier 2003, d'une actualisation des barèmes tenant compte de l'évolution de la valeur moyenne de l'indice des prix à la consommation et de la réévaluation des loyers plafonds. Cependant, l'actualisation de ces paramètres n'a pas permis de faire évoluer le montant de l'APL au même rythme que le coût de la vie, d'où une perte de pouvoir d'achat dès 2003.

De plus, en 2004, ces évolutions ont été contrebalancées par des mesures d'économies portant sur les barèmes décidées par le Gouvernement, pour un montant de 18 millions d'euros.

Tout cela induit un décalage croissant entre l'inflation et la progression des aides au logement.

Monsieur le ministre, eu égard aux difficultés financières auxquelles est confronté un nombre grandissant de ménages aux revenus modestes ou moyens, le Gouvernement entend-il revenir sur l'arrêté du 30 avril 2004 ?

Par ailleurs, compte-t-il réévaluer dans de justes proportions, au 1er janvier 2005, les aides au logement, qui concernent près de six millions de foyers, sachant que ces derniers sont locataires de logements relevant tant du parc privé que du parc public et situés dans les grands centres urbains, dans les agglomérations moyennes ou même dans des zones où la situation est moins tendue ?

M. le président. La parole est à M. le ministre délégué.

M. Christian Estrosi, ministre délégué à l'aménagement du territoire. Monsieur le sénateur, permettez-moi tout d'abord de vous dire que M. Jean-Louis Borloo, que vous avez interrogé sur la revalorisation des aides personnelles au logement et sur les modalités de versement de celles-ci, vous prie de bien vouloir excuser son absence.

Le seuil en deçà duquel les aides personnelles au logement ne sont pas versées n'avait pas été actualisé depuis juillet 1988. Le relèvement, au printemps 2004, de ce seuil de 15 euros à 24 euros, après plus de quinze ans d'absolue stabilité, a donc suivi avec beaucoup de retard l'inflation enregistrée au cours de cette période. Il convient d'ajouter que 98 % des 6 millions de bénéficiaires des aides personnelles au logement ne sont pas concernés par cette mesure.

Lors de la dernière actualisation des aides personnelles au logement, le Gouvernement a souhaité affecter en priorité les moyens budgétaires supplémentaires à la revalorisation générale des prestations. Cette actualisation représente un coût de 220 millions d'euros par an, dont 120 millions d'euros sont imputés sur le budget du logement. Il s'agit d'un effort financier important, venant s'ajouter à un montant de prestations annuelles d'aides personnalisées au logement et d'allocations de logement qui dépasse aujourd'hui 14 milliards d'euros, plus de 5,5 milliards d'euros étant supportés par le budget du logement.

Je puis vous assurer que le Gouvernement travaille actuellement à une revalorisation du barème des aides personnelles et qu'il s'efforcera de tenir compte des remarques formulées par l'ensemble des acteurs du secteur du logement.

En outre, je tiens à mettre en exergue l'engagement très fort du Gouvernement en faveur de l'amélioration des conditions de logement des personnes disposant de ressources modestes.

Les difficultés que rencontrent nombre de nos concitoyens pour se loger sont dues, en grande partie, à la carence de l'offre locative. Celle-ci résulte de l'insuffisance de la construction de logements sociaux au cours de la dernière décennie.

L'action menée par le Gouvernement pour combler ce déficit de logements a déjà conduit à des résultats tangibles : avec 363 000 mises en chantier au cours de l'année 2004, notre pays a, en effet, connu un niveau de production inégalé depuis plus de vingt ans.

Ce haut niveau d'activité profite, en premier lieu, aux ménages à revenus modestes. Ainsi, 75 000 logements locatifs sociaux ont été financés en 2004, contre 58 000 logements en 2003, soit une hausse de 30 %. A titre de comparaison, seulement 42 000 logements sociaux ont été financés en 2000. La production de logements locatifs privés à loyers maîtrisés a également progressé, passant de 17 000 logements en 2003 à plus de 25 000 logements en 2004, soit une augmentation de près de 50 %.

Mais l'ambition du Gouvernement se situe encore au-delà. La loi du 18 janvier 2005 de programmation pour la cohésion sociale définit les moyens nécessaires à la réalisation de 500 000 logements locatifs sociaux entre 2005 et 2009, hors programme national de rénovation urbaine. La loi de programmation prévoit également de mobiliser le parc locatif privé, grâce aux aides de l'Agence nationale pour l'amélioration de l'habitat, l'ANAH. Ainsi, 200 000 logements privés à loyers maîtrisés seront produits, au cours des cinq prochaines années, et 100 000 logements vacants seront remis sur le marché locatif.

Le Gouvernement a également mené à bien une réforme majeure de l'accession sociale à la propriété en améliorant le barème du prêt à taux zéro et en ouvrant ce dispositif à l'acquisition de logements anciens. Chaque année, plus de 200 000 ménages seront aidés par l'Etat à devenir propriétaires, ce qui encouragera la mobilité dans le parc locatif.

L'augmentation de l'offre de logements accessibles aux ménages disposant de ressources modestes, que favorise l'action menée par le Gouvernement, contribuera à modérer les tensions sur les loyers.

M. Roland Courteau. Ce n'est pas la question !

M. le président. Mais M. le ministre délégué sait faire de la politique ! (Sourires.)

La parole est à M. Thierry Repentin.

M. Thierry Repentin. Monsieur le président, dans l'ancien gouvernement il y avait un ministre du logement chargé de cette question, et il n'y a pas eu de revalorisation des aides au logement. Comme, dans le nouveau gouvernement, il n'y a plus de ministre spécifique, je pensais qu'il y aurait peut-être une revalorisation !(Sourires sur les travées du groupe socialiste.)

Monsieur le ministre, je vous parle de perte de pouvoir d'achat et vous me répondez que le nombre de constructions de logements sociaux augmente.

Ce sera un argument difficile à opposer à ceux qui ont des difficultés à se loger dans les grands ensembles, y compris à Marseille, monsieur le président, dans les quartiers Nord, à la Belle de Mai, ou du côté du Merlan.

Monsieur le ministre, quand l'un de vos administrés vous dira qu'il a du mal à payer son loyer, allez donc lui répondre qu'on lui construira des logements en plus grand nombre, mais ailleurs ! Vous lui aurez certes répondu, mais à côté.

Je vous donne rendez-vous dans quelques mois, à l'occasion de l'examen en première lecture du projet de loi « Habitat pour tous ». Nous ne pourrons pas faire l'impasse sur un sujet qui préoccupe six millions de familles, celles qui ont de plus en plus de difficultés à honorer leur loyer. Je crains que ces difficultés n'aient contribué à ce qu'un dimanche, pas si éloigné, la réponse apportée par les Français à une fameuse question n'ait pas été à la hauteur de nos espérances sur un sujet pourtant majeur.

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