Question de M. SOUVET Louis (Doubs - UMP) publiée le 14/04/2005

M. Louis Souvet attire l'attention de M. le ministre des affaires étrangères sur les conditions dans lesquelles se déroule la mission de l'ONU au Congo (MONUC). Pour différentes raisons et notamment compte tenu d'une organisation défectueuse des services de renseignements, les Casques bleus ne peuvent exécuter leur mission dans des conditions satisfaisantes d'une part, pour la crédibilité de l'ONU, d'autre part, pour leur propre sécurité comme en atteste l'assassinat des Casques bleus à Loga. Il demande si le gouvernement français, via le Conseil de sécurité des Nations unies, va inciter ses partenaires dudit conseil à adopter une résolution modifiant dans un sens positif les conditions de maintien de la paix dans ce secteur géographique. Comme le rappelle un analyste : « En cas d'échec, la leçon serait que l'organisation n'est capable que de faire du gardiennage amélioré ». Gardiennage qui coûte cher à la collectivité internationale. La mission, pour fonctionner, doit disposer d'un milliard de dollars par an.

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Réponse du Ministère des affaires étrangères publiée le 01/09/2005

Depuis la création de la mission des Nations unies en République démocratique du Congo (MONUC) par la résolution 1279 du Conseil de sécurité du 30 novembre 1999, la France a constamment plaidé pour que cette opération dispose d'un mandat clair et des moyens lui permettant de s'en acquitter. Le soutien de la France à la MONUC prend plusieurs formes, en dehors de sa contribution financière très substantielle au budget de l'ensemble des opérations de maintien de la paix des Nations unies (quote-part de 7,259 % au 1er juillet 2005). Quelque vingt militaires français (officiers de l'armée de terre et gendarmes) participent à l'état-major et à la composante de police civile de l'opération. A l'heure actuelle, ce sont un officier général et un commissaire de police français qui occupent respectivement les postes de chef d'état-major de la composante militaire et de chef de la composante de police civile de la MONUC. Il convient également de souligner que, dans le contexte des graves affrontements qui s'étaient déroulés en Ituri en 2003, la France avait accepté d'assumer le rôle de nation-cadre de l'opération européenne Artémis, déployée dans l'urgence à Bunia conformément à la résolution 1484 du Conseil de sécurité du 30 mai 2003, pour enrayer la dégradation de la situation sécuritaire et humanitaire et créer les conditions d'un renforcement de la présence de la MONUC dans le secteur. La résolution 1493, adoptée le 28 juillet 2003 à l'initiative de la France, avait alors autorisé le relèvement du plafond des effectifs militaires de la MONUC à 10 800 hommes, et le déploiement en Ituri d'une brigade complète, afin de mettre l'opération en mesure de contribuer à la stabilisation de l'ensemble de cette vaste région. Cette brigade de la MONUC est aujourd'hui forte de quelque 4 800 hommes. Grâce à son action, un programme de désarmement et de réinsertion communautaire des combattants est en cours d'exécution. Plus de 15 000 combattants ont ainsi été désarmés, en vue de leur réinsertion dans la vie économique et sociale locale. La MONUC poursuit ses efforts de stabilisation et de sécurisation de l'Ituri, où quelque 1 000 combattants refusent toujours de désarmer, entretenant une grave insécurité pour la population civile. En juin 2004, la prise de la ville de Bukavu par des militaires mutins a mis en lumière les risques graves que la situation dans les Kivus continuait de faire peser sur la transition congolaise dans son ensemble, ainsi que la faiblesse des moyens et des structures de la MONUC pour y faire face. Une nouvelle fois, la France s'est fortement engagée aux Nations unies en vue de remédier à cette situation. C'est grâce à ses efforts que le Conseil de sécurité a adopté la résolution 1565 du 1er octobre 2004, qui a clarifié et recentré les missions de la MONUC (appui à la transition, sécurité dans l'Est), et renforcé considérablement les moyens de l'opération dans l'Est. Le Conseil a autorisé le déploiement de deux brigades homogènes dans les Kivus, tandis que la structure d'état-major de la MONUC était réorganisée, renforcée et décentralisée, et qu'un état-major avancé et un bataillon de réserve étaient mis en place à Kisangani pour commander les trois brigades déployées dans l'Est. En outre, une cellule d'analyse conjointe (composée d'analystes politiques et militaires) a été créée, afin de mieux exploiter l'information collectée par les différentes composantes de la mission et anticiper les menaces. C'est sur le fondement du mandat renforcé par la résolution 1565 et rappelé par la résolution 1592 du 30 mars 2005, que la MONUC a pu mener, en Ituri comme dans les Kivus, des opérations de contrôle de zone afin d'accroître la pression militaire sur les groupes armés qui continuent de se livrer à des exactions contre la population civile et à menacer le processus de transition. La détermination accrue affichée par la MONUC depuis qu'elle a atteint sa pleine capacité dans l'Est a produit des résultats très significatifs. Le courage des contingents engagés dans l'Est mérite d'être salué. Pour la seule Ituri, depuis le début de l'année 2005, onze casques bleus sont morts dans des accrochages avec les groupes armés. Par ailleurs, le département des opérations de maintien de la paix du secrétariat des Nations unies conduit actuellement des travaux tendant à améliorer encore les capacités de la MONUC dans le domaine du renseignement, et à renforcer par ce biais son efficacité opérationnelle. Enfin la préparation et l'approche des élections va vraisemblablement se traduire par une volatilité accrue dans les grands centres urbains et dans le sud-est du pays (Katanga, Kasaïs), ainsi que l'a souligné le secrétaire général des Nations unies. Dans son rapport spécial du 26 mai dernier sur les élections en République démocratique du Congo, celui-ci demande au Conseil de sécurité de nouveaux moyens spécifiques pour la MONUC, en vue de contribuer à assurer la sécurité des élections, d'une part, et de les soutenir sur le plan logistique, d'autre part. Nous participons à ces différents travaux aux Nations unies avec le souci, rappelé plus haut, de l'efficacité et du réalisme s'agissant du mandat de la MONUC et des moyens qui lui sont confiés, dans un contexte de forte augmentation des effectifs sous casques bleus (66 058 personnels en tenue à travers le monde au 31 mai 2005). Le Parlement congolais vient de décider de prolonger pour six mois la période de transition prévue par l'accord global et inclusif de Pretoria du 17 décembre 2002, en vue de permettre la préparation et la tenue dans les meilleures conditions possibles des opérations électorales. L'action de la MONUC demeure un élément essentiel de la stabilisation du pays au cours de cette période sensible. La France s'attache à convaincre ses partenaires des Nations unies que le moment n'est pas encore venu pour la communauté internationale de relâcher son effort en République démocratique du Congo.

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