Question de M. GOURNAC Alain (Yvelines - UMP) publiée le 05/05/2005

M. Alain Gournac attire l'attention de M. le ministre de la culture et de la communication sur les conséquences de l'arrêt de la Cour de Cassation du 1er mars 2005 relatif au paiement des droits d'auteur par les personnes bénéficiant d'une antenne parabolique collective. Tout d'abord, cet arrêt institue une discrimination à l'encontre des résidents d'ensembles immobiliers équipés d'antennes collectives. Ceux-ci devront en effet verser aux syndicats de copropriété, considérés comme des organismes tiers s'interposant entre l'émetteur de programmes et le public, une redevance supplémentaire à laquelle ne sont pas assujettis les propriétaires de paraboles individuelles. Ensuite, un tel arrêt ne peut qu'entraver l'effort des maires qui incitent les syndicats de copropriétés, notamment dans des immeubles réunissant plusieurs centaines de logements, à adopter la solution de l'antenne collective afin de lutter contre la défiguration de nos bâtiments et de nos villes. Un tel arrêt, en obligeant ces syndicats à choisir entre le souci de l'environnement esthétique et celui de la limitation des dépenses supplémentaires pour les résidents, porte un mauvais coup à leurs efforts et à ceux des élus. Aussi il lui demande quelles mesures il entend prendre pour remédier à une telle discrimination et pour que la politique environnementale de l'antenne collective ne soit pas peu ou prou remise en cause.

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Réponse du Ministère de la culture et de la communication publiée le 05/10/2005

Réponse apportée en séance publique le 04/10/2005

M. Alain Gournac. Monsieur le ministre, les maires sont confrontés dans notre pays à nombreuses contradictions.

En particulier, souhaitant que les antennes paraboliques ne défigurent pas nos villes, tous essaient dans la mesure du possible d'obtenir qu'un même ensemble d'immeubles n'ait qu'une seule parabole et d'éviter ainsi que l'on n'en trouve sur chaque balcon : c'est en tout cas ce qui se passe dans ma ville, et je puis vous assurer, monsieur le ministre, que c'est un combat difficile.

Or un arrêt de la Cour de cassation du 1er mars 2005 relatif au paiement des droits d'auteur pour les personnes bénéficiant d'une antenne parabolique collective, en contradiction avec le principe que tentent d'appliquer les maires, aboutit de fait à une discrimination puisque, selon ses termes, un particulier installant une parabole n'aurait rien à payer, alors que les habitants de grands ensembles tel Parly II, dans mon département, les Yvelines, devraient verser chacun au syndicat de copropriété - il est d'ailleurs bizarre que ce soit à lui que revienne la collecte ! - une somme destinée à l'acquittement des droits d'auteur.

Cela m'inquiète fortement, monsieur le ministre. Nous nous battons pour que nos villes soient belles et soient agréables non seulement aux yeux de leurs habitants, mais aussi pour ceux qui viennent les visiter. Or cet arrêt de la Cour de cassation va dans un sens tout à fait opposé et conduira à la multiplication des antennes paraboliques.

Monsieur le ministre, notre pays est certes un pays de contradictions ; ne peut-on cependant trouver une solution pour éviter ce recul, pour refuser cette floraison d'objets qui, reconnaissez-le, ne sont pas beaux ? Je dois vous avouer que, personnellement, je les fais retirer, même si ce n'est pas autorisé : dix-sept de ces paraboles, qui étaient visibles de la rue, ont subi ce sort depuis le mois de juin. D'ailleurs, le plan d'occupation des sols de ma commune les interdit si elles doivent être vues de la rue.

Je vous en supplie, monsieur le ministre, donnez-moi raison ! Les droits d'auteur doivent être payés, j'en conviens, mais il faut trouver une autre solution.

M. le président. La parole est à M. le ministre.

M. Renaud Donnedieu de Vabres, ministre de la culture et de la communication. Monsieur le sénateur, nous sommes effectivement pris dans de nombreuses contradictions, car nous devons concilier des points de vue et des objectifs différents, et vous avez prononcé à la fin de votre intervention le terme clef en évoquant les droits d'auteur.

Vous le savez, les juridictions françaises ont reconnu que la retransmission de programmes audiovisuels au moyen d'antennes collectives assurait la présentation d'oeuvres au public et devait faire l'objet d'une contrepartie financière au profit de leurs auteurs au même titre que la retransmission par les câblo-opérateurs.

A l'origine de cette décision de la Cour de cassation était en cause, et vous l'avez évoqué, le réseau de Parly II, qui consiste en quatre antennes paraboliques captant divers satellites et qui permettent la réception de chaînes françaises et étrangères et en assurent la retransmission au moyen d'un réseau câblé interne à chaque immeuble. Au total, près de 7 500 foyers reçoivent ainsi les programmes concernés.

Le juge n'a donc pas établi de discrimination entre antenne individuelle et réception collective. Il a, au contraire, rappelé le principe qui s'applique à tous les modes de réception collectifs.

En pratique, la rémunération qui est normalement due aux auteurs doit être fixée de manière contractuelle entre les sociétés de gestion des droits d'auteurs et les organismes qui assurent cette retransmission.

Je comprends votre objectif, mais le fait que le droit d'auteur soit perçu partout ne devrait pas entraîner la multiplication des antennes.

Cette pratique est très souple et est adaptée à l'extrême diversité des réseaux : certains sont de très petite taille, d'autres desservent plusieurs milliers de foyers à la fois. Certains sont exploités par les syndics, d'autres par les câblo-opérateurs, d'autres encore par des antennistes.

Ainsi, les accords conclus avec les câblo-opérateurs excluent de rémunération le « service antenne », c'est-à-dire les situations dans lesquelles les réseaux ne reprennent que les chaînes terrestres. Cette solution sera retenue d'une manière plus générale pour toutes les antennes collectives de réception des chaînes hertziennes.

Dans tous ces cas de figure, déroger au droit des auteurs, ce qui pourrait porter un préjudice considérable à ces derniers, n'est pas acceptable et aboutirait à créer une discrimination entre les réseaux.

Bref, nous essayons de faire en sorte que le droit d'auteur soit respecté tout en ayant, comme vous, le souci d'éviter la prolifération des antennes. Il faut donc trouver un système qui permette la desserte de plusieurs milliers, voire de dizaines de milliers d'abonnés et de téléspectateurs et donne lieu néanmoins à une rémunération.

M. le président. La parole est à M. Alain Gournac.

M. Alain Gournac. Monsieur le ministre, je vous remercie de votre réponse qui a été très claire, comme d'habitude.

Evidemment - vous le savez, ma famille est issue du spectacle - je suis pour la défense des droits d'auteurs, et ce n'est pas moi qui chercherai un moyen de les contourner. Mais je souhaite aussi que nos villes soient belles...

M. Renaud Donnedieu de Vabres, ministre. Vous avez raison !

M. Alain Gournac. ... et que le maire, placé devant des exigences contradictoires, ne se voie pas reprocher la prolifération de paraboles qui défigurent les immeubles.

Il convient de trouver un équilibre entre, d'un côté, le paiement des droits d'auteur et, de l'autre, la beauté de nos villes.

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