Question de Mme DEMESSINE Michelle (Nord - CRC) publiée le 23/06/2005

Mme Michelle Demessine souhaite attirer l'attention de M. le ministre de la santé et des solidarités au sujet de la consommation de psychotropes dans le département du Nord. En effet, elle a pris connaissance d'une étude menée par la Caisse nationale d'assurance maladie sur la consommation de psychotropes, dont les résultats sont assez éloquents. Cette étude, publiée en 2003, donne les chiffres de la consommation de ces substances par département. Il apparaît que, dans le département du Nord, la situation est particulièrement préoccupante. Alors que la moyenne nationale, à population d'âge et de sexe identiques, est de 24,5 %, le nombre de personnes ayant reçu dans l'année une prescription de psychotropes s'élève à 27,7 %. La surconsommation est particulièrement forte pour les anxiolytiques avec 18,7 % de patients qui se voient prescrire un tranquillisant contre 17,4 % au plan national et pour les somnifères avec 11,6 % de taux de prescription contre 8,8 %. A titre de comparaison, dans le Haut-Rhin, seulement 20,6 % de la population reçoit une prescription de psychotropes dans l'année, 14,3 % d'anxiolytiques et 7,6 % de somnifères. Aucune explication n'est encore donnée pour justifier ces écarts. De manière générale, elle considère que le corps psychiatrique porte la plus lourde responsabilité dans cette surconsommation de psychotropes. C'est ce corps, en particulier les représentants de la psychiatrie biologique, qui a fait la promotion de ces produits auprès des autres médecins, et cela avec le soutien des laboratoires (voir rapport Zarifian dès 1995). C'est également cette profession qui a popularisé les diagnostics (souvent devenues auto-diagnostics) de troubles mentaux, à tel point que chaque phase normale de la vie et chaque émotion sont devenues pathologiques. C'est ce que récemment Philippe Pignarre appelait dans un ouvrage sur le sujet « l'épidémie de dépression », qui aboutit à psychiatriser tous les problèmes de l'existence. L'Etat et la CNAM se sont engagés dans des campagnes pour réduire cette consommation, mais il s'agit de campagnes très discrètes dont les résultats se font attendre. C'est pourquoi, elle souhaite savoir s'il entend prendre des dispositions plus adaptées et plus efficaces, notamment pour le public des enfants et des jeunes, afin que cette surconsommation soit réellement enrayée.

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Réponse du Ministère de la santé et des solidarités publiée le 26/01/2006

L'étude de la CNAMTS « Médicaments psychotropes : consommation et pratiques de prescription en France métropolitaine » indique que, en 2000, près d'un quart de la population du régime général (24,5 %) a bénéficié du remboursement d'au moins un médicament psychotrope. Cette étude met en évidence de légères disparités régionales et intrarégionales que rien ne permet d'expliquer de façon certaine, compte tenu de leur caractère hétérogène. Tout au plus peut-on évoquer l'existence de certains facteurs susceptibles d'influer sur la consommation de médicaments psychotropes, tels que le niveau de précarité financière et professionnelle, les conditions de travail, ou encore la disponibilité de l'offre de soins. En revanche, une analyse approfondie révèle surtout une inadéquation entre les prescriptions et les pathologies traitées. En effet, par exemple le taux mesuré de consommateurs d'antidépresseurs (9,7 %) est bien supérieur au taux de prévalence de la dépression, estimé en France à 4,7 %, ce qu'atteste un certain nombre d'études. A l'inverse, d'autres études suggèrent qu'une part importante de troubles dépressifs et anxieux ne serait pas identifiée et traitée de façon adéquate. Pourtant, utilisés dans le respect de l'autorisation de mise sur le marché (AMM), des recommandations de l'Agence française de sécurité sanitaire des produits de santé (AFSSAPS) et de la Haute Autorité de santé (HAS, ex-ANAES), qui font l'objet d'actualisations régulières en fonction de l'évolution des données disponibles, les médicaments psychotropes ont fait la preuve de leur efficacité. Les autorités de santé communiquent donc régulièrement en direction des professionnels de santé et du grand public pour rappeler les principales recommandations à respecter pour le bon usage et la prescription de ces médicaments. Dans le cadre du plan « Psychiatrie et santé mentale 2005-2008 », la Haute Autorité de santé a été sollicitée pour élaborer et valider des référentiels de bonnes pratiques en santé mentale, comprenant notamment des recommandations sur la place respective des médicaments et des psychothérapies dans la stratégie thérapeutique. Une campagne de communication, destinée au grand public et aux médecins généralistes, devrait être lancée en 2006 par l'Institut national de prévention et d'éducation pour la santé (INPES) sur la base de ces recommandations. Son objectif sera de faciliter la reconnaissance des troubles mentaux et d'informer sur les filières de soins et les traitements appropriés. Parallèlement l'assurance maladie sera encouragée à poursuivre son objectif de maîtrise médicalisée sur les médicaments psychotropes. La convention nationale signée le 12 janvier 2005 comprend d'ores et déjà pour l'année en cours un objectif d'infléchissement de 10 % des montants tendanciels de prescription des anxiolytiques et hypnotiques.

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