Question de M. SOUVET Louis (Doubs - UMP) publiée le 30/06/2005

M. Louis Souvet attire l'attention de M. le garde des sceaux, ministre de la justice, sur l'administration de la preuve des infractions de blanchiment ou de non-justification de ressources. Le code pénal exige fort logiquement la preuve d'une distorsion entre le train de vie du mis en cause et ses déclarations de revenus, d'une part, et une relation directe et habituelle avec un trafiquant, d'autre part. Une nouvelle fois, le processus jurisprudentiel est venu modifier et donc limiter la portée de la loi en rajoutant à l'élément intentionnel l'exigence que le mis en cause ait entretenu sciemment la relation avec le trafiquant pour bénéficier des revenus de son activité. Il demande si les pouvoirs publics, en introduisant la mesure adéquate visant à rappeler la prééminence de la loi sur toute autre source de production juridique, entendent rationaliser le travail des enquêteurs.

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Réponse du Ministère de la justice publiée le 01/09/2005

Le garde des sceaux a l'honneur de faire connaître à l'honorable parlementaire que la chambre criminelle de la Cour de cassation, par un arrêt du 25 juin 2003, a rejeté le pourvoi formé par le procureur général de Lyon contre un arrêt de la cour d'appel de son siège du 28 mai 2002 qui relaxait deux prévenus poursuivis des chefs de non-justification de ressources par une personne en relations habituelles avec un trafiquant de stupéfiants. Parmi les motifs retenus par la cour figurait, notamment, le fait que la preuve n'était pas rapportée qu'ils avaient sciemment été en relations habituelles avec le trafiquant. Il n'appartient pas au garde des sceaux, ministre de la justice, de commenter les décisions de justice. On peut néanmoins observer qu'en application du principe général du droit pénal selon lequel « il n'y a point de crime ou de délit sans intention de le commettre » (art. 121-3, alinéa 1, du code pénal), le délit de non justification de ressources par une personne en relations habituelles avec un trafiquant de stupéfiants (art. 222-39-1 du code pénal) est une infraction intentionnelle. De fait, si une fois établi le décalage entre les ressources déclarées et le train de vie du prévenu ainsi que les relations habituelles qu'il entretient avec une personne se livrant à l'usage ou au trafic de stupéfiant, ce texte instaure une présomption selon laquelle l'auteur de l'infraction connaît l'origine frauduleuse des ressources qu'il emploie, permettant ainsi au ministère public de ne pas avoir à établir le lien entre les ressources non justifiées et le produit de l'infraction commise par le trafiquant ou l'usager de stupéfiants avec lequel le prévenu entretient des relations, elle ne l'exonère pas de prouver que le prévenu n'ignorait pas la nature illicite des activités de ce trafiquant ou de cet usager.

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