Question de M. DENEUX Marcel (Somme - UC-UDF) publiée le 01/07/2005

Question posée en séance publique le 30/06/2005

M. Marcel Deneux. Monsieur le Premier ministre, lors de votre déclaration de politique générale, vous avez annoncé la poursuite de la cession par l'Etat de ses participations dans les sociétés d'autoroutes. Depuis lors, M. Hervé Mariton, dans un rapport d'information parlementaire qu'il a récemment présenté, est venu appuyer votre position et, surtout, M. Jean-François Copé, ministre délégué au budget et à la réforme de l'Etat, a présenté un premier calendrier pour ces privatisations.

L'Etat est aujourd'hui actionnaire majoritaire d'ASF, de la SANEF et d'APRR et détient 45 % du capital des SEMCA. Au total, la cession de l'ensemble de ces participations représenterait entre 10 milliards et 12 milliards d'euros, suivant l'« humeur » du marché.

Toutefois, une telle décision rompt avec la politique menée jusque-là et privilégie le très court terme, au détriment d'un gain plus important sur une longue durée. En effet, le Gouvernement a toujours veillé à conserver la majorité du capital de ces sociétés, par crainte d'une trop forte concentration entre les majors du secteur du bâtiment et des travaux publics.

Le précédent gouvernement avait déjà envisagé une telle privatisation, mais, au regard de considérations financières, M. Raffarin avait tranché, lors de la réunion du CIADT, le Comité interministériel pour l'aménagement et le développement du territoire, le 18 décembre 2003, en faveur du maintien des participations de l'Etat. En effet, si les privatisations peuvent rapporter de 10 milliards à 12 milliards d'euros, les services du ministère des transports ont estimé que, dans les trente prochaines années, jusqu'à la date de fin des concessions en cours, les péages autoroutiers pourraient rapporter de 34 milliards à 39 milliards d'euros.

Monsieur le Premier ministre, votre volonté de renforcer l'effort de la nation en faveur des infrastructures de transports est légitime et le groupe UC-UDF l'approuve entièrement. Toutefois, l'arbitrage économique que vous avez privilégié n'est-il pas le plus risqué et le moins rentable ?

En outre, pouvez-vous nous garantir que la totalité des sommes retirées de la vente de ces participations sera bien affectée à l'AFITF, l'Agence de financement des infrastructures de transport de France, présidée par notre collègue Gérard Longuet, et au financement des contrats de plan Etat-région et non au désendettement de l'Etat, comme M. Copé l'a annoncé hier ?

Enfin, le désengagement de l'Etat des sociétés autoroutières ne peut-il pas faire craindre aux usagers une hausse inconsidérée des tarifs des péages, à l'heure où l'on parle déjà de péages sur les routes nationales ? (Applaudissements sur les travées de l'UC-UDF ainsi que sur certaines travées de l'UMP et du RDSE.)

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Réponse du Ministère délégué au budget et à la réforme de l'État, porte parole du Gouvernement publiée le 01/07/2005

Réponse apportée en séance publique le 30/06/2005

M. Jean-François Copé, ministre délégué au budget et à la réforme de l'Etat. Monsieur le sénateur, je n'ai qu'un regret, celui de ne pas avoir pu vous parler directement de ce sujet hier, en commission. Je vais donc maintenant lever tout malentendu, à supposer qu'il y en ait un.

Les ouvertures du capital des sociétés d'autoroutes s'inscrivent dans la durée, car voilà plusieurs années maintenant que l'Etat s'est engagé dans cette voie.

M. Michel Dreyfus-Schmidt. C'est le cas de le dire !

M. Jean-François Copé, ministre délégué. A cet égard, le Gouvernement n'a qu'un objectif : investir pour l'avenir de la France.

En l'occurrence, de telles décisions sont bonnes pour les sociétés elles-mêmes et pour leur équilibre financier. Elles sont bonnes pour le pays, car elles vont notamment permettre à l'Etat de trouver là des leviers de financement nouveaux pour investir.

L'avenir, c'est d'abord, effectivement, le désendettement de notre pays.

Mme Nicole Bricq. Ah !

M. Jean-François Copé, ministre délégué. Personne ne peut imaginer que les cessions de capital détenu par l'Etat ne se traduisent pas par des affectations au désendettement, car il s'agit de l'avenir de nos enfants. La logique de responsabilité commande que de telles décisions soient prises.

L'avenir, c'est également le financement des infrastructures.

A cet égard, monsieur le sénateur, je veux vous dire avec la même force qu'une partie très significative des produits de cession de capital sera naturellement affectée à ce financement, à travers l'AFITF. Cette agence, qui va financer les infrastructures de transport, a un rôle essentiel à jouer pour l'avenir de la France. Elle sera donc largement dotée.

Mme Nicole Bricq. Un demi milliard !

M. Jean-François Copé, ministre délégué. Cette dotation sera constituée, certes, pour une part, par le produit des cessions, mais aussi par l'affectation d'une taxe spécifique, la taxe sur l'aménagement du territoire, qui sera directement affectée à ce financement, et par des crédits « frais », provenant du budget de l'Etat.

Bref, nous serons attentifs à honorer les rendez-vous avec l'avenir. Tel est notre devoir, telle est notre responsabilité. Sur ce point, monsieur le sénateur, je suis persuadé que vous nous rejoindrez. (Applaudissements sur les travées de l'UMP et de l'UC-UDF, ainsi que sur certaines travées du RDSE.)

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