Question de M. DARNICHE Philippe (Vendée - NI) publiée le 18/11/2005

Question posée en séance publique le 17/11/2005

M. Philippe Darniche. Monsieur le président, monsieur le Premier ministre, mesdames, messieurs les ministres, mes chers collègues, ma question portera sur le grave problème de la consommation croissante de drogues illicites, particulièrement de cannabis, chez les plus jeunes, et sur l'économie souterraine qu'elle génère sur la totalité de notre territoire, des zones urbaines jusqu'au plus petit de nos villages.

Aujourd'hui, cette problématique nationale, que dis-je, ce fléau ! a pris une importance majeure dans les jeunes générations, et débouche sur une situation tragique en termes de santé publique.

Or quels discours complaisants n'a-t-on pas entendus concernant le cannabis, y compris, à une certaine époque, de la part de hautes autorités politiques ? (« Voynet ! » sur les travées de l'UMP.) Jusqu'à quel point n'a-t-on pas banalisé cette dérive et « ringardisé » ceux qui, y compris parmi les scientifiques, se sont inquiétés de l'emprise croissante de cette substance sur notre jeunesse ?

Le constat que l'on peut établir aujourd'hui est terrible, et les chiffres parlent d'eux-mêmes, hélas !

Ainsi, on dénombre près d'un million de consommateurs réguliers, dont 500 000 quotidiens, l'immense majorité d'entre eux étant âgés de quatorze à vingt-cinq ans. Le bilan des accidents de la route impliquant de jeunes conducteurs ayant consommé cette drogue est affligeant. Dans notre pays, un lycéen sur deux a déjà fumé du cannabis, et un sur quatre est un consommateur régulier. La France est devenue championne d'Europe pour la consommation régulière de cette substance chez les adolescents, le nombre des fumeurs quotidiens ayant triplé en dix ans.

Pourtant, des découvertes scientifiques récentes ont démontré que la toxicité du cannabis, si souvent décrit comme une « drogue douce », est telle que des consommateurs « accros » présentent, on le constate aujourd'hui, une instabilité irréversible du comportement. Cela engendre des « dégâts collatéraux » pour la société, avec une instabilité au travail et une instabilité familiale. En outre, on relève des effets irréversibles sur la mémoire : c'est le coeur même de l'intelligence de l'homme qui se trouve ainsi dégradé.

Je ne doute pas, monsieur le Premier ministre, mesdames, messieurs les ministres, que vous avez à coeur de prendre des mesures coercitives s'agissant de ce difficile problème, dont les récents événements survenus dans les banlieues ont à nouveau mis en exergue l'acuité.

En effet, on évalue à 3 milliards d'euros par an le marché des substances illicites. On peut certes s'enorgueillir de la saisie, l'an dernier, de 76 tonnes de cannabis, mais quand on apprend que le volume du trafic quotidien, uniquement pour la région parisienne, est estimé à l'heure actuelle à 5 ou 6 tonnes, on mesure les efforts qu'il reste encore à consentir.

Mme Nicole Borvo Cohen-Seat. Combien de temps va-t-il parler, monsieur le président ? Cela fait déjà quatre minutes !

M. Philippe Darniche. J'en viens à ma question.

Notre pays voit arriver, par voie maritime ou terrestre, des tonnes de ces substances, dont on connaît l'origine géographique. Nos frontières sont totalement poreuses. Dans ces conditions, quel dispositif envisagez-vous de mettre en oeuvre pour enrayer l'empoisonnement progressif d'une partie de notre jeunesse ? (Applaudissements sur les travées de l'UMP et sur certaines travées de l'UC-UDF.)

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Réponse du Ministère délégué aux collectivités territoriales publiée le 18/11/2005

Réponse apportée en séance publique le 17/11/2005

M. Brice Hortefeux, ministre délégué aux collectivités territoriales. Monsieur Darniche, vous avez raison de souligner les ravages que les différents types de drogues provoquent dans notre pays.

En effet, la consommation de ces substances anéantit la vie de milliers d'adolescents, elle nourrit toutes formes de délinquance, elle enrichit les caïds.

M. Jacques Mahéas. Ça, c'est vrai !

Mme Nicole Borvo Cohen-Seat. Que fait la police ?

M. Brice Hortefeux, ministre délégué. Ce qui est vrai aussi, mesdames, messieurs les sénateurs, c'est qu'elle plonge dans le désarroi, la solitude et l'impuissance un grand nombre de familles françaises.

Le ministre d'État, Nicolas Sarkozy, sous l'autorité du Premier ministre, Dominique de Villepin,...

M. Didier Boulaud. En accord avec le Président de la République, et sans oublier Clemenceau !

M. Brice Hortefeux, ministre délégué. ...a clairement affiché un objectif : mener une approche patrimoniale, en s'attaquant au produit de cette criminalité. C'est ainsi toute l'action des GIR, les groupements d'intervention régionaux, qui a été développée. (Applaudissements sur les travées de l'UMP.)

Je n'abuserai pas des chiffres ; retenez simplement que, depuis le début de l'année, ce sont plus de 130 réseaux de trafiquants qui ont été démantelés,...

Mme Nicole Borvo Cohen-Seat. Plus on arrête de trafiquants, plus il y en a ! C'est incroyable !

M. Brice Hortefeux, ministre délégué. ...tandis que près de 1 000 kilos de cannabis, 20 kilos d'héroïne et 13 kilos de cocaïne ont été saisis.

Mme Nicole Borvo Cohen-Seat. Bravo !

M. Brice Hortefeux, ministre délégué. Nous avons également saisi plus de 300 000 euros en numéraire et plus de 130 véhicules.

À l'évidence, les résultats sont encourageants, mais nous devons naturellement faire mieux. Nous sommes engagés dans cette voie depuis quelques jours, car notre action s'est intensifiée et certains réseaux ont été mieux identifiés. Ainsi, depuis le 27 octobre dernier, 186 trafiquants de drogue ont été interpellés.

Vous m'avez interrogé plus particulièrement, monsieur le sénateur, sur la protection de nos frontières, notamment maritimes et aériennes. Je puis vous indiquer que tous les moyens sont mis en oeuvre...

Mme Nicole Borvo Cohen-Seat. Lesquels ?

M. Brice Hortefeux, ministre délégué. ...pour intercepter aéronefs et bâtiments.

Mme Nicole Borvo Cohen-Seat. Ah bon ?

M. Brice Hortefeux, ministre délégué. Cela signifie, très concrètement, que la coordination entre le ministère de l'intérieur, le fisc, le ministère de la défense et les douanes fonctionne bien.

Mme Nicole Borvo Cohen-Seat. Il faut lever le secret bancaire !

M. Brice Hortefeux, ministre délégué. De plus, les accords internationaux nous permettent d'échanger chaque jour davantage d'informations avec d'autres pays, et de procéder à des opérations communes.

Le ministre d'État, Nicolas Sarkozy (Exclamations ironiques sur les travées socialistes et du groupe CRC.), s'est d'ailleurs rendu, voilà quelque temps, en Colombie,...

M. Didier Boulaud. Sous l'autorité du Premier ministre, de Georges Clemenceau et de la grand-mère d'icelui ! (Rires sur les mêmes travées.)

M. Brice Hortefeux, ministre délégué. ...pour travailler avec les pays sources. Il se rendra de même très prochainement, en tout cas au plus tard au début de l'année 2006, en Afghanistan.

Vous le voyez, monsieur le sénateur, le Gouvernement en est, comme vous-même, tout à fait convaincu : éradiquer l'économie souterraine des stupéfiants...

Mme Nicole Borvo Cohen-Seat. Il faut tripler le nombre d'arrestations !

M. Brice Hortefeux, ministre délégué. ...servira toujours mieux la jeunesse que le laxisme mondain ! (Très bien ! et vifs applaudissements sur les travées de l'UMP et sur certaines travées de l'UC-UDF.)

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