Question de M. TRILLARD André (Loire-Atlantique - UMP) publiée le 29/12/2005

M. André Trillard rappelle à M. le ministre de l'éducation nationale, de l'enseignement supérieur et de la recherche que la réforme de la classe de troisième engagée à la rentrée dernière a consacré la disparition de l'option « technologie », qui ouvrait droit à la perception de la taxe d'apprentissage pour nombre de collèges. Cette amputation des budgets pédagogiques fait peser de lourdes conséquences financières pour les établissements concernés. Certes, les modules de découverte professionnelle de six heures pourront bénéficier de versements de la taxe professionnelle, mais, en raison de la lourdeur de la mise en place de tels dispositifs, il est à craindre que peu d'établissements ne puissent ouvrir ces classes. En outre, celles-ci seront en priorité instituées dans des lycées professionnels, et non pas dans des collèges. De leur côté, les troisièmes de « découverte professionnelle » à option trois heures (qui se substituent donc à l'option « technologie ») ne devraient pas, en principe, autoriser le bénéfice de la taxe d'apprentissage, au motif qu'elles ne préparent pas directement à la voie professionnelle et ne supposent pas forcément l'acquisition de matériel et de machines. Lui rappelant que la disparition de la taxe d'apprentissage peut brutalement déséquilibrer les budgets pédagogiques des collèges concernés dans des proportions qui peuvent atteindre de 15 % à 20 %, il lui demande quelles mesures il compte prendre pour accompagner financièrement la mise en place de cette nouvelle option de « découverte professionnelle » de trois heures.

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Réponse du Ministère de l'éducation nationale, de l'enseignement supérieur et de la recherche publiée le 01/02/2006

Réponse apportée en séance publique le 31/01/2006

M. le président. La parole est à M. André Trillard, auteur de la question n° 893, adressée à M. le ministre de l'éducation nationale, de l'enseignement supérieur et de la recherche.

M. André Trillard. Monsieur le ministre, la réforme engagée lors de la rentrée dernière de la classe de troisième a consacré la disparition de l'option « technologie », qui ouvrait droit à la perception de la taxe d'apprentissage pour nombre de collèges.

Certes, les modules dits de « découverte professionnelle », d'une durée de six heures, pourront bénéficier de versements de taxe professionnelle. Mais, ces dispositifs étant lourds à mettre en place, il est à craindre que de telles classes ne puissent être ouvertes que dans peu d'établissements, et qu'elles ne le soient prioritairement dans des lycées professionnels et non dans des collèges.

De leur côté, les troisièmes à option découverte professionnelle de trois heures - qui se substituent donc à l'option technologie - ne devraient pas en principe être autorisées à percevoir la taxe d'apprentissage, au motif qu'elles ne préparent pas directement à la voie professionnelle et ne requièrent pas forcément l'acquisition de matériels et de machines.

Monsieur le ministre, je souhaite dépasser ici un court instant cette stricte logique et apporter un éclairage plus concret sur les lourdes conséquences que la fin de la perception de la taxe d'apprentissage fera peser sur le fonctionnement des collèges concernés.

D'abord, ces conséquences sont, bien sûr, d'ordre financier. Faut-il rappeler que la taxe d'apprentissage représente couramment 10%, 15%, voire 20 % des budgets pédagogiques des collèges et que perdre cette part équivaut à diminuer la subvention pédagogique du même pourcentage ?

Les conséquences pédagogiques doivent, pour leur part, être évaluées au regard tant du volume des équipements que de leur productivité. Certes, la taxe d'apprentissage était perçue au bénéfice des seules options y ouvrant droit. Mais la technologie dans son ensemble bénéficiait des retombées et ne ponctionnait de ce fait que marginalement le budget commun. Les équipements informatiques, en particulier, étaient mutualisés - au moins indirectement - et d'autres disciplines pouvaient en bénéficier. Désormais, les matériels ne seront entretenus et remplacés qu'à un rythme plus lent, d'où un vieillissement probable du parc.

Je ne serais pas complet sur ces effets prévisibles si je ne rappelais pas l'implication dans la vie locale et le tissu économique que représentait la collecte de la taxe d'apprentissage. Les collèges concernés ont souvent mobilisé longuement équipes, élus et parents d'élèves, ce qui confortait leur statut d'acteur de la vie économique locale.

Le rayonnement de l'établissement auprès du monde économique ne peut que pâtir de la disparition de cette forme de reconnaissance par la puissance publique.

Monsieur le ministre, je ferai trois brèves remarques pour terminer.

D'une part, il semble peu logique de pénaliser les établissements à proportion de leurs engagements, car plus un collège a fait l'effort de s'ouvrir sur l'extérieur par la recherche de partenariats, plus la perte de la taxe d'apprentissage sera sensible. À cet égard, je peux vous citer plusieurs collèges de la Loire-Atlantique dont les responsables s'inquiètent d'autant plus qu'ils ont beaucoup oeuvré en la matière.

D'autre part, il semble contradictoire de vouloir sensibiliser les élèves à la vie économique en supprimant une ressource vitale et symbolique de leur insertion dans le monde de l'entreprise.

Enfin, il semble difficile pour les principaux des collèges de mobiliser des équipes pédagogiques sur une nouvelle option « découverte des métiers », en leur présentant parallèlement une chute des budgets pédagogiques de 10% à 20 %.

Quelles mesures comptez-vous prendre pour accompagner financièrement la mise en place de cette nouvelle option de « découverte professionnelle » de trois heures ?

M. le président. La parole est à M. le ministre.

M. Gilles de Robien, ministre de l'éducation nationale, de l'enseignement supérieur et de la recherche. Monsieur le sénateur, je tiens tout d'abord à préciser que, depuis la rentrée de septembre 2005, la classe de troisième connaît des innovations importantes grâce à l'instauration de la découverte professionnelle sous forme d'un module de six heures et d'une option facultative de trois heures.

Le module de six heures de découverte professionnelle concerne plus particulièrement un public d'élèves volontaires, scolairement fragiles, prêts à se mobiliser autour d'un projet de poursuite de formation professionnelle à l'issue de la classe de troisième.

Les classes de troisième option « technologie » ou « préparatoire à la voie professionnelle » préexistantes ont été supprimées pour être remplacées par cette formule du module de six heures.

Si ce module est le plus souvent implanté en lycée professionnel, son ouverture en collège est également possible. Quel que soit l'établissement qui le propose, il ouvre toujours droit à la perception de la taxe d'apprentissage, ce qui devrait vous rassurer.

S'agissant de l'option découverte professionnelle de trois heures, c'est une option facultative, appelée à être offerte à tout élève sur l'ensemble du territoire, au même titre que les autres options facultatives du collège. Tous les collèges devront la proposer à la prochaine rentrée. Les deux tiers des collèges l'ont déjà mise en application avec succès et 30 % à 40 % des élèves se portent volontaires pour suivre ces trois heures de découverte professionnelle.

Son objectif est d'apporter aux élèves une première connaissance du monde professionnel par une découverte des métiers, de leurs débouchés et des voies de formation qui y conduisent. Sa vocation n'est pas de se substituer à la troisième à option « technologie » et n'exige pas d'investissements identiques. Le financement de cette option ne me paraît donc pas poser de problèmes. En effet, à la rentrée de 2005, un tiers de nos collèges, publics et privés sous contrat, ont ouvert cette option, qui est aujourd'hui suivie par 38 000 élèves dans la moitié des collèges. Dans certaines régions, tous les collèges ont ouvert une option de découverte professionnelle.

M. le président. La parole est à M. André Trillard.

M. André Trillard. Je remercie M. le ministre de sa réponse, mais je suis déçu, car ce lien entre les entreprises et les collèges était un facteur d'insertion dans le tissu économique.

Aucun des principaux et des enseignants de collèges avec lesquels j'ai discuté n'est opposé au principe du changement. D'ailleurs, chacun peut comprendre la logique qui consiste à supprimer un financement faute de moyens. Mais quand les partenariats et les financements existent, pourquoi et au profit de qui supprimer ce qui fonctionne bien ? J'espère que cette option de trois heures et ce module de six heures ne seront pas trop compliqués à mettre en place.

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