Question de M. COLLOMBAT Pierre-Yves (Var - SOC) publiée le 10/02/2006

Question posée en séance publique le 09/02/2006

M. Pierre-Yves Collombat. Ma question s'adresse à M. le ministre délégué aux collectivités territoriales.

Notre pays a vécu voilà quelques mois des moments difficiles. Le Gouvernement a été amené à décréter l'état d'urgence. Cette disposition exceptionnelle traduit à elle seule la gravité d'événements révélateurs d'une déstructuration de notre territoire et de la désespérance d'une partie de notre jeunesse.

Aucune réponse de fond n'a été apportée à la jeunesse, hormis le contrat de travail jetable, plus communément appelé CPE. Nous l'avons vu tout à l'heure.

Quant aux territoires et à leurs élus, ils attendent toujours, notamment que l'État applique la loi n°83-8 du 7 janvier 1983 relative à la répartition des compétences entre les communes, les départements et l'État.

Cette loi dispose en particulier que l'État est civilement responsable des dégâts résultant des crimes et délits commis par des attroupements ou rassemblements, soit contre des personnes, soit contre des biens. Les communes devraient à défaut faire face seules aux conséquences des dégâts causés aux équipements publics, je pense notamment au mobilier urbain, aux écoles et aux gymnases. Le coût financier se situe entre 80 millions et 150 millions d'euros.

Cela représente des charges exorbitantes pour les budgets des collectivités concernées, directement lorsque les communes sont leur propre assureur et indirectement quand elles ne le sont pas.

Des désengagements d'assureurs, des hausses de primes de 15 % à 30 % selon les cas et des relèvements du plafond des franchises extravagants sont annoncés pour 2006.

À la mi-novembre, à l'Assemblée nationale, le Premier ministre assurait que vous étiez en train, monsieur le ministre, « d'étudier avec les mutuelles comment indemniser la destruction des biens, sachant que l'État apportera une aide complémentaire ».

Au Sénat, M. le ministre délégué à l'industrie confirmait que vous examineriez « avec Bercy les conditions d'indemnisation des dommages causés aux collectivités locales ».

Depuis, si une rencontre avec l'ensemble des associations d'élus et les assureurs a bien eu lieu voilà une semaine, aucun progrès n'a été réalisé. Les associations d'élus appellent unanimement l'État à appliquer la loi du 7 janvier 1983 et, devant le Conseil d'État, les assureurs poursuivent une action contre l'État.

Monsieur le ministre, saluer le « dévouement et le sens du service public » des maires, comme l'a fait M. Sarkozy,...

M. Jacques Mahéas. Pourquoi n'est-il pas là aujourd'hui ?

M. Pierre-Yves Collombat. ...vouloir renforcer leur « rôle de pivot de la cohésion sociale, de la sécurité et de la prévention » ou leur « rendre solennellement hommage » - décidément, c'est une manie -, comme l'a fait le Premier ministre, est une chose. Leur donner les moyens de mener à bien leurs missions en est une autre.

À tout le moins, il ne faut pas se cacher derrière des arguties juridiques quand les maires ont besoin que le Gouvernement leur tende la main dans des circonstances si exceptionnelles qu'elles ont nécessité la mise en oeuvre de l'état d'urgence.

Ma question est simple : le Gouvernement entend-il oui ou non tendre la main aux élus, en appliquant les dispositions de la loi du 7 janvier 1983 ? La réponse devrait pouvoir être aussi simple et je vous remercie de ne pas me renvoyer aux conclusions d'une éventuelle table ronde. (Applaudissements sur les travées du groupe socialiste et du groupe CRC.)

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Réponse du Ministère délégué aux collectivités territoriales publiée le 10/02/2006

Réponse apportée en séance publique le 09/02/2006

M. Brice Hortefeux, ministre délégué aux collectivités territoriales. Monsieur le sénateur, vous évoquez à juste titre le coût financier des violences urbaines qui ont frappé notre pays du 27 octobre au 16 novembre dernier. Comme vous le savez, ce coût a été, en grande partie, évalué par les assureurs. Ils nous ont communiqué le chiffre de 200 millions d'euros, dont 23 millions d'euros pour les véhicules, 100 millions pour les entreprises et 10 millions pour les commerçants et les artisans. Concernant les collectivités locales, nous avons sollicité les préfets. Leur évaluation se situe entre 55 millions et 60 millions d'euros. Le Gouvernement n'est donc pas resté les bras croisés s'agissant de ce dossier. La première réaction, à la fois la plus efficace et la plus utile, a été de se préoccuper des victimes. Dans le cadre du projet de loi de finances pour 2006, nous avons proposé un système - vous vous en souvenez -, à savoir le remboursement immédiat du FCTVA, le fonds de compensation de la TVA, sans attendre les deux années, ce qui aurait pénalisé les communes. Cela représente un effort de 10 millions d'euros, qui ont été immédiatement injectés dans notre économie au service des collectivités locales. M. Raymond Courrière. Et prélevés sur la dotation globale de fonctionnement ! M. Brice Hortefeux, ministre délégué. Certains souhaitent - c'est votre cas - que l'État aille un peu plus loin et reconnaisse ses éventuelles responsabilités. Je ferai à ce sujet trois remarques. Tout d'abord, les dégâts recensés concernent des biens qui, dans leur immense majorité, étaient assurés. M. Jacques Mahéas. Pas tous ! M. Brice Hortefeux, ministre délégué. Par conséquent, les assureurs - je le dis très simplement - ont fait preuve de réactivité et d'efficacité. Ensuite, il ne faut pas se tromper de responsable. Le rôle de l'État était de rétablir l'ordre ; c'est ce qui a été fait. S'il y a des responsables à chercher, c'est d'abord du côté de ceux qui ont commis des exactions, et il faut tout de même le souligner. (Très bien ! sur plusieurs travées de l'UMP.) Enfin, si certaines communes se trouvent confrontées à des difficultés particulières, rendant précaire leur équilibre financier, leur situation sera examinée au cas par cas en présence de M. le ministre délégué au budget et à la réforme de l'État, ainsi que M. le ministre délégué à l'industrie l'a rappelé à juste titre. Vous avez évoqué la table ronde que j'ai organisée sur la demande du Premier ministre, rassemblant les assureurs et l'ensemble des associations d'élus, notamment l'Association des maires de France, l'Assemblée des départements de France, l'Association des régions de France,... et même l'Association des maires ruraux de France, ce qui était sympathique. (Sourires.) Puisque vous avez évoqué les assureurs, permettez-moi simplement de faire état d'une lettre que m'a adressée l'un d'entre eux. Vous le connaissez sans doute, puisqu'il a été maire pendant de longues années et qu'il appartient à votre famille politique, monsieur le sénateur. Il s'agit de M. Bernard Bellec, le président de la Société mutuelle d'assurance des collectivités locales, la SMACL. Dans cette lettre, il nous remercie de la façon dont nous nous sommes saisis du dossier de l'assurabilité des collectivités territoriales. Nous n'avons visiblement pas les mêmes informations, monsieur Collombat ! (Exclamations sur les travées du groupe socialiste.) En réalité, le Gouvernement a eu trois attitudes. M. Jacques Mahéas. Pour commencer, M. Sarkozy a lui-même allumé le feu ! M. Brice Hortefeux, ministre délégué. D'abord, le Gouvernement a eu une réaction rapide. Ensuite, il a su établir un dialogue efficace et constructif. Enfin, nous aboutirons à des décisions financières à la fois justes et équitables. (Applaudissements sur les travées de l'UMP. - M. Jean Arthuis applaudit également.)

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