Question de M. DOMEIZEL Claude (Alpes de Haute-Provence - SOC) publiée le 24/02/2006

Question posée en séance publique le 23/02/2006

M. Claude Domeizel. Ma question s'adresse à M. le. Premier ministre.

La pauvreté et l'exclusion gagnent tous les jours un peu de terrain. C'est ce message qu'il faut lire dans la colère qui s'est manifestée d'une manière violente dans les banlieues à l'automne dernier. À cette situation alarmante, vous répondez, monsieur le Premier ministre, par un projet de loi que vous avez l'outrecuidance de baptiser « pour l'égalité des chances ».

Mais que signifie le mot « égalité » quand vous remettez profondément en question l'obligation scolaire jusqu'à seize ans ou quand vous portez de telles attaques au code du travail ?

Quelle conception bizarre avez-vous de l'égalité en installant la précarité de l'emploi, particulièrement chez les jeunes ?

Quel crédit pourra-t-on accorder à une loi votée sans concertation, contrairement aux engagements que vous aviez pris, sans participation des syndicats, des associations, des travailleurs sociaux, des enseignants, des élus qui sont sur le terrain ?

Votre dernière trouvaille, c'est le contrat première embauche, le CPE, qui, rappelons-le, concerne l'entrée des jeunes dans le monde du travail. Ce CPE, vous l'ajoutez au dernier moment, sous forme d'amendement, sans prendre l'avis du Conseil d'État.

Pourquoi donc avoir avancé le débat de quinze jours ? La ficelle est trop grosse : vous vouliez tout simplement que le Parlement débatte de ce sujet pendant les vacances scolaires ! Oh, vous n'en êtes pas à votre coup d'essai, monsieur le Premier ministre, puisque déjà en plein été 2005, par ordonnance, donc sans débat au Parlement, vous avez créé le contrat « nouvelles embauches », le CNE !

Le code du travail est gravement atteint car l'objectif non affiché du CPE, et de son grand frère le CNE, est finalement la disparition du contrat de travail à durée indéterminée pour tous les salariés, je dis bien pour « tous les salariés » !

M. Jacques Mahéas. Très bien !

M. Claude Domeizel. À l'Assemblée nationale, vous avez bâillonné les députés en utilisant une nouvelle fois le fameux article 49-3 de la Constitution. En mettant brutalement fin au débat, vous affichez au grand jour votre conception méprisante de la démocratie sociale et politique ! (Rires sur les travées de l'UMP.)

M. Alain Gournac. Vous ne manquez pas d'air !

M. Claude Domeizel. Ici, au Sénat, c'est à la sauvette que sont menés les préparatifs du débat. Ainsi, les auditions se font au pas de charge ; en commission, l'opposition n'obtient aucune réponse à ses questions Le Sénat accepte même de délibérer sans attendre les conclusions de la mission d'information sénatoriale sur les politiques conduites envers les quartiers. Cette mission devient ainsi de la poudre aux yeux.

Hier, pour hâter un peu plus le pas, l'ordre du jour du Sénat a subi un tripatouillage, que nous condamnons.

M. le président. Veuillez poser votre question, monsieur Domeizel !

M. Claude Domeizel. Inadmissibles sont ces méthodes qui font fi de la représentation nationale, qui contournent le Parlement !

M. Alain Gournac. La question !

M. Claude Domeizel. Vous avez peur, peur de la rue, peur de l'opposition !

MM. Josselin de Rohan et Alain Gournac. La question !

M. Claude Domeizel. Monsieur le Premier ministre, la précipitation, mais aussi l'absence d'écoute, je dirai même votre incapacité d'écoute, jouent toujours de mauvais tours.

M. le président. Posez votre question, mon cher collègue !

MM. Jean-Claude Carle et Alain Gournac. Coupez !

M. Claude Domeizel. C'est vrai pour le CPE, pour l'apprentissage à quatorze ans, comme c'est vrai pour le désamiantage du Clemenceau.

Jusqu'où irez-vous dans cette escalade du mépris ?

M. le président. Votre question, je vous prie !

M. Claude Domeizel. Nos concitoyens attendent des réponses à la hauteur de la gravité d'une situation que vous avez créée depuis quatre ans. (Très bien ! et applaudissements sur les travées du groupe socialiste et du groupe CRC.)

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Réponse du Ministère de l'emploi, de la cohésion sociale et du logement publiée le 24/02/2006

Réponse apportée en séance publique le 23/02/2006

M. Jean-Louis Borloo, ministre de l'emploi, de la cohésion sociale et du logement. Monsieur le sénateur, je n'ai pas vraiment compris quelle était votre question ! (Rires sur les travées de l'UMP.)

M. Jean-Claude Carle. Nous non plus !

M. Claude Domeizel. Je peux la répéter ! Elle s'adresse à M. le Premier ministre !

M. Jean-Louis Borloo, ministre. Entre l'évocation du Clemenceau, du désamiantage, de l'escalade, de la méthodologie sénatoriale, je m'y perds ! (Protestations sur les travées du groupe socialiste.)

En revanche, je peux vous dire que les jeunes qui sont en butte à des discriminations en matière de logement, d'emploi, en raison de CV trop souvent ciblés, à l'entrée des boîtes de nuit,...

M. Jacques Mahéas. Ils vont l'être en plus dans le domaine du travail !

M. Jean-Louis Borloo, ministre. ...ces jeunes qui enchaînent contrats d'intérim et stages attendent des réponses que le projet de loi pour l'égalité des chances prétend apporter.

Mme Hélène Luc. Pas celles que vous donnez !

M. Jean-Louis Borloo, ministre. Ce texte est examiné actuellement par le Sénat. Malgré quelques tentatives un peu compliquées d'obstruction, le débat se poursuit dans la sérénité.

Permettez-moi de remercier, d'une part, M. le rapporteur,...

M. David Assouline. On n'a pas le rapport !

M. Jean-Louis Borloo, ministre. ...qui a pu entendre les uns et les autres (Protestations sur les travées du groupe socialiste. - Applaudissements sur les travées de l'UMP.), les organisations de la jeunesse, les syndicats, et, d'autre part, les quatre rapporteurs pour avis...

M. Didier Boulaud. Montrez-nous le rapport !

M. Jean-Louis Borloo, ministre. ...qui ont formulé des propositions extrêmement importantes, notamment en matière de discriminations. La commission des lois, en particulier, a déposé des amendements essentiels.

M. Didier Boulaud. Où est le rapport parlementaire ?

M. Jean-Louis Borloo, ministre. Mesdames, messieurs les sénateurs, le sujet de la discrimination...

M. Didier Boulaud. Donnez-nous le rapport parlementaire ; nous y avons droit !

M. Jean-Louis Borloo, ministre. ...est le poison de notre République.

M. Paul Raoult. Et Sarkozy l'alimente !

M. Jean-Louis Borloo, ministre. Le Premier ministre et le Gouvernement vous proposent, par ce texte, des solutions courageuses, innovantes, dans la droite ligne de la Haute Autorité de lutte contre les discriminations, dont nous disposons enfin.

M. Robert Del Picchia. Très bien !

M. David Assouline. Le CPE !

M. Jean-Louis Borloo, ministre. La France est le dernier pays d'Europe à disposer d'une autorité de ce genre ! (Applaudissements sur les travées de l'UMP et de l'UC-UDF.)

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