Question de Mme PAYET Anne-Marie (La Réunion - UC-UDF) publiée le 24/02/2006

Question posée en séance publique le 23/02/2006

Mme Anne-Marie Payet. Monsieur le président, monsieur le Premier ministre, mesdames, messieurs les ministres, mes chers collègues, à l'heure où je vous parle, l'épidémie de chikungunya poursuit son expansion sur l'île de la Réunion et se répand dans les îles voisines. La situation est alarmante.

M. Didier Boulaud. Que fait le Gouvernement ?

Mme Anne-Marie Payet. Le bilan dressé par l'Institut de veille sanitaire est sans concession : on attribuerait à cette maladie le décès de soixante-dix-sept personnes, dont quatre étaient âgées de moins de vingt ans.

M. Didier Boulaud. Rendez des comptes !

Mme Anne-Marie Payet. Pour autant, le lien direct entre cette maladie virale, transmise par le moustique, et les décès reste mal identifié.

Plus de 130 000 Réunionnais sur 785 000 ont déjà été atteints et la contamination se poursuit au rythme de 25 000 nouveaux cas par semaine.

M. Didier Boulaud. Si nous avions agi comme vous, qu'aurions-nous entendu !

Mme Anne-Marie Payet. Le chikungunya provoque des douleurs physiques insupportables. Les symptômes de la maladie sont dangereux pour la vie des plus faibles et peuvent avoir des incidences psychologiques graves sur les personnes contaminées.

En plus de ces drames humains intolérables, c'est toute l'économie de l'île, déjà très fragile, qui est mise à mal.

En outre, aujourd'hui, la maladie semble évoluer et les contaminations ne diminuent pas, l'éradication des moustiques n'étant pas facilitée par les conditions météorologiques.

Monsieur le ministre, actuellement, le Gouvernement se mobilise pleinement sur ce sujet très préoccupant...

M. Didier Boulaud. Il était temps !

Mme Anne-Marie Payet. ... et près de 9 millions d'euros ont déjà été débloqués pour ce combat. Vous avez annoncé avec le ministre de la recherche, M. François Goulard, le déploiement d'une équipe de chercheurs sur l'île. Nous attendons que vous nous donniez des informations précises sur leur programme de recherche, les axes qui seront privilégiés et les pistes qu'ils comptent exploiter.

En effet, le traitement de la maladie doit impérativement être amélioré en ce qui concerne tant les symptômes que la prévention. Surtout, la maladie est très mal connue, les mécanismes de contamination sont complexes et la violence de l'épidémie a surpris tout le monde.

M. Didier Boulaud. Surtout le Gouvernement !

Mme Anne-Marie Payet. Monsieur le ministre, concernant ce dernier point, nous souhaitons que vous précisiez la liste des mesures d'urgence que vous venez d'annoncer, dans la droite ligne des conclusions de la mission Flahaut. Ainsi, la mise à disposition de répulsifs et de matériels de démoustication est urgente et nécessaire, surtout pour les personnes les plus défavorisées. Aucun Réunionnais ne doit, encore aujourd'hui, être démuni face à l'expansion de la maladie. (Applaudissements.)

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Réponse du Ministère de la santé et des solidarités publiée le 24/02/2006

Réponse apportée en séance publique le 23/02/2006

M. Xavier Bertrand, ministre de la santé et des solidarités. Madame la sénatrice, je tiens, tout d'abord, à souligner le sens des responsabilités avec lequel, chaque fois, les parlementaires de la Réunion s'expriment sur ce sujet.

Mme Nicole Bricq. Cela fait des mois que l'on en parle !

M. Xavier Bertrand, ministre. Ce sens des responsabilités est à la hauteur du courage et de la dignité des Réunionnaises et des Réunionnais face à cette épreuve avant tout humaine. Je tenais à le préciser, comme je l'ai fait à l'Assemblée nationale.

Vous souhaitez que, sur l'île de la Réunion comme en métropole, toute la lumière soit faite et que toute la transparence possible soit apportée sur la réalité de cette épidémie.

M. Yannick Bodin. Cela va être dur !

M. Jacques Mahéas. Il y a du retard à l'allumage !

M. Xavier Bertrand, ministre. Vous l'avez demandé : c'est le droit élémentaire des Réunionnaises et des Réunionnais que de savoir les choses. M. le Premier ministre a lui aussi souhaité que cette affaire soit traitée avec la plus totale transparence.

Oui, aujourd'hui, nous savons que, contrairement à ce qu'affirmaient les scientifiques, à savoir que le virus de la fièvre chikungunya ne tuait pas, le décès de soixante dix-sept personnes y est lié, directement ou non.

Il faut reconnaître aussi que, même si nous sommes au XXIe siècle, nul, sur la planète, n'en sait plus que nous sur le chikungunya. Nous pourrions faire la même remarque pour la dengue et le virus West Nile aux États-Unis. Nous devons développer notre connaissance et notre compréhension de tous ces virus et de toutes ces maladies émergentes pour pouvoir les combattre plus efficacement.

Cela dit, il n'est pas question d'attendre que l'hiver austral offre un répit aux Réunionnaises et aux Réunionnais. Voilà pourquoi M. le Premier ministre a souhaité que, dès le retour des chercheurs que François Goulard et moi-même avons envoyés en mission, nous nous employions sans délai à continuer ce combat. Il a insisté, notamment, pour que les produits de démoustication soient distribués gratuitement aux personnes les plus fragiles, à savoir les personnes âgées, les femmes enceintes et les nouveaux-nés.

Nous avons, nous, souhaité aller au-delà, en étendant cette mesure aux enfants. En effet, les derniers cas recensés nous amènent à faire plus que ce qui nous a été demandé.

Par ailleurs, je recevrai au ministère, dans une heure et demie, l'ensemble des représentants des laboratoires pharmaceutiques implantés sur notre territoire pour leur demander de chercher, dans toute la pharmacopée existante, des médicaments visant non pas seulement à prendre en charge la douleur - de tels produits sont déjà utilisés - mais également à enrayer l'évolution du chikungunya.

Nous allons aussi mettre en place, notamment sur l'île, tous les moyens qui seront nécessaires, comme nous l'avons fait à chaque fois que cela nous a été demandé depuis le mois d'avril 2005, pour que soient développés les programmes hospitaliers de recherche clinique devant nous permettre de comprendre comment et pourquoi ce virus passe de la mère à l'enfant dans de telles conditions, apparaît, disparaît et revient chez les mêmes personnes en l'espace de quelques semaines.

Les Réunionnaises et les Réunionnais veulent toute la transparence possible ; ils l'ont. Ils font appel à la solidarité nationale : c'est aussi pour cette raison que M. le Premier ministre se rendra en personne, dès la fin de la semaine, sur l'île de la Réunion.

Je tiens, une fois encore, à saluer le remarquable sens des responsabilités dont font preuve les Réunionnaises et les Réunionnais dans l'épreuve qu'ils traversent. (Applaudissements sur les travées de l'UMP et de l'UC-UDF.)

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