Question de M. DUPONT Jean-Léonce (Calvados - UC-UDF) publiée le 02/03/2006

M. Jean-Léonce Dupont attire l'attention de Mme la ministre de la défense sur les inquiétudes suscitées chez les collectionneurs, par la publication du décret n°2005-1463 du 23 novembre 2005 relatif au régime des matériels de guerre, armes et munitions, pris pour l'application du code de la défense et modifiant le décret n°95-589 du 6 mai 1995. En effet, en vertu de ce texte, les matériels, véhicules, navires et aéronefs de collection d'origine militaire appartiennent à la 2e catégorie, correspondant aux « matériels destinés à porter ou à utiliser au combat les armes à feu » et sont donc considérés à tort comme des armes. Pourtant, lors de l'examen du projet de loi n° 2565, cette préoccupation avait été exprimée et il avait été souligné que « les mesures d'application envisagées pour la loi pour la sécurité intérieure tendent à imposer des contraintes lourdes aux collectionneurs de matériels et de véhicules militaires historiques et à leurs associations, alors que l'on voit mal les menaces qu'ils pourraient faire peser sur la sécurité publique ». Après près de trois ans d'attente, cet appel au bon sens a été ignoré. De fait, à titre d'exemple, la demande d'autorisation qui doit être effectuée dans l'année suivant l'entrée en vigueur du décret n° 2005-1463 devra être accompagnée d'« un certificat de neutralisation » alors que les procédures de neutralisation ne sont pas définies et qu'aucune disposition d'ordre réglementaire n'existe. En outre, les restrictions de détention et de circulation impliquent de très importantes difficultés pour les collectionneurs qui souhaitent se rendre dans un pays de l'Union européenne afin de représenter la France lors des cérémonies commémoratives. Au regard des contraintes qu'il contient, ce décret fait peser une lourde menace sur ce patrimoine. C'est pourquoi, il lui demande si le gouvernement entend modifier le décret afin que les collectionneurs puissent continuer à préserver et faire vivre notre patrimoine.

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Réponse du Ministère de la défense publiée le 20/04/2006

La définition des matériels de guerre est inchangée depuis 1973, la loi n° 2003-239 du 18 mars 2003 pour la sécurité intérieure n'ayant pas fait évoluer cette notion pour des raisons de sécurité intérieure et extérieure, ainsi que pour préserver au mieux les intérêts légitimes des collectionneurs dans l'exercice de leur activité. Pour ce qui le concerne, le décret n° 2005-1463 du 23 novembre 2005 relatif au régime des matériels de guerre, armes et munitions, pris pour l'application du code de la défense et modifiant le décret n° 95-589 du 6 mai 1995, n'a apporté aucune modification à la classification des matériels de guerre, en particulier celle des véhicules, qui prévaut depuis plus de trente-deux ans. Le critère permettant de définir le matériel de guerre reste celui de la destination du bien et non celui de sa nature ou de son origine. Ainsi, sont considérés comme des matériels de guerre, les véhicules destinés au combat ou dotés de dispositifs spéciaux permettant l'utilisation d'armes. Un véhicule commercial équipé de tels dispositifs sera donc un matériel de guerre, alors qu'un véhicule de liaison, même militaire, dès lors qu'il en est dépourvu, ne pourra être considéré comme tel. Les véhicules militaires (Jeep, Dodge, GMC, ambulances, motocyclettes...) qui ne sont pas équipés d'affûts circulaires ou de rampes de lancement destinés à recevoir des armes ne sont en aucun cas des matériels de guerre soumis à autorisation de détention et, le cas échéant, d'exportation ou d'importation. Ils relèvent, comme par le passé, du régime juridique de droit commun des véhicules à moteur. S'agissant des véhicules de collection qui sont des matériels de guerre (blindés, véhicules équipés de dispositifs permettant l'emploi des armes au combat), le Gouvernement et le législateur en ont clarifié et assoupli le régime juridique. Ainsi, le décret du 23 novembre 2005 précité autorise, hors du champ des musées publics ou privés, les collectionneurs à être propriétaires de matériels de guerre. Les personnes contribuant, par la réalisation de collections, à la conservation, la connaissance ou l'étude des matériels de guerre, peuvent acquérir et détenir, sans limitation de durée, des matériels de deuxième catégorie (chars de combat, véhicules blindés, navires de guerre, armements aériens) d'une certaine ancienneté. Le collectionneur doit justifier de documents descriptifs du matériel détenu ou sollicité, fournir un rapport sur les moyens de protection privilégiés contre le vol ou les intrusions, ainsi que sur les modalités de conservation envisagées. Il doit également présenter un certificat de neutralisation des systèmes d'armes et d'armes embarquées. Ce dernier vise à attester l'inaptitude au tir des armes et systèmes d'armes par l'application de procédés techniques définis par un arrêté interministériel qui devrait être publié tout prochainement. La neutralisation et son contrôle par le banc d'épreuves de Saint-Étienne peuvent se faire dans des conditions qui n'imposent pas aux collectionneurs de se déplacer eux-mêmes dans cette ville. Pour autant, la possibilité d'exposer ces matériels lors de représentations à l'extérieur du territoire national est conditionnée par l'obtention d'une autorisation d'exportation. Ces véhicules, malgré leur ancienneté, demeurent des matériels de guerre auxquels s'applique le principe général de prohibition des importations et exportations, sauf dérogation accordée par l'autorité administrative. Afin de ne pas entraver les échanges culturels et les manifestations historiques ou commémoratives auxquels les collectionneurs participent de part et d'autre de nos frontières, les demandes sont examinées avec le plus grand discernement. Une circulaire définissant les orientations et précisions nécessaires aux préfets pour l'application du décret du 23 novembre 2005 et prenant en compte les intérêts légitimes des collectionneurs est en cours d'élaboration par les services du ministère de la défense et ceux du ministère de l'intérieur et de l'aménagement du territoire. Consciente de la contribution des collectionneurs et des associations à la valorisation du patrimoine et de leur rôle au sein de la communauté de défense, la ministre de la défense veillera à ce que des personnalités représentatives du domaine des collections soient consultées sur ce texte afin de répondre au mieux aux questions concrètes des collectionneurs.

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