Question de M. BESSON Jean (Drôme - SOC) publiée le 08/06/2006

M. Jean Besson souhaite attirer l'attention de M. le ministre de l'agriculture et de la pêche sur la situation de la filière des plantes à parfum et aromatiques, qui fait face depuis plusieurs années à une crise aiguë. Les conséquences d'une concurrence étrangère accrue, mais aussi de sécheresses à répétition, sont multiples. Ainsi, les prix de certaines huiles essentielles ont diminué de moitié. Quant aux débouchés des fleurs séchées, ils connaissent un véritable marasme. Ces difficultés touchent l'ensemble de la filière même si, aujourd'hui, l'actualité met en lumière la société Le Clos d'Aguzon, spécialisée dans les matières premières aromatiques, qui a dû déposer son bilan le 6 avril dernier, mettant en péril plus de 100 emplois. La lavande, le lavandin et plus généralement les plantes aromatiques sont l'emblème de la Provence (« l'âme de la Provence » comme disait Jean Giono). Mais, au-delà du symbole et de sa dimension culturelle forte, cette filière est le socle économique de nombreux territoires situés dans le sud-est de la France. L'ensemble du chiffre d'affaires généré par la lavande et le lavandin (actuellement un peu plus de 1 000 tonnes) dans les activités industrielles (parfumerie, cosmétiques) et artisanales est estimé aujourd'hui à 3 milliards d'euros. Le ministère de l'agriculture a mis en place un plan d'urgence pour venir en aide aux producteurs. Celui-ci a soulagé la production pour cette année, mais il ne suffit pas à lui donner de réelles perspectives d'avenir. L'ensemble de la profession et de nombreuses collectivités locales concernées appellent donc de leurs voeux un plan de soutien à moyen et à long terme qui serait financé dans le cadre des nouveaux fonds structurels européens. Ce programme devrait permettre, en particulier, la mise en place d'une mesure agri-environnementale d'aide à l'hectare. Par ailleurs, ces productions ne bénéficient pas du premier pilier de la PAC. Elles devraient, par conséquent, recevoir l'appui du second pilier et, dans la même perspective, continuer à bénéficier de l'appui de l'Etat dans les futurs contrats de projets en cours d'élaboration. Aussi, il aimerait connaître les intentions précises du Gouvernement quant aux mesures d'aides à la filière des plantes aromatiques et à parfum à moyen ou à long terme (contrat de projet, fonds structurels européens) ou celles plus conjoncturelles relatives à la société Le Clos d'Aguzon.

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Réponse du Ministère de l'agriculture et de la pêche publiée le 21/06/2006

Réponse apportée en séance publique le 20/06/2006

M. le président. La parole est à M. Jean Besson, auteur de la question n° 1073, adressée à M. le ministre de l'agriculture et de la pêche.

M. Jean Besson. Monsieur le président, monsieur le ministre, mes chers collègues, je souhaite attirer votre attention sur la situation de la filière des plantes aromatiques et à parfum, qui traverse depuis plusieurs années une crise aiguë.

La concurrence étrangère accrue, d'origines essentiellement bulgare, ukrainienne et chinoise, et les sécheresses à répétition ont fragilisé un secteur d'activité emblématique de la Provence, qui est une région chère à notre président de séance. (Sourires.)

Pour surmonter de telles difficultés, la profession a mis en place une stratégie de reconquête, qui a eu pour point d'orgue une opération de communication, le week-end dernier, consistant à tapisser la Grand-Place de Bruxelles de près de 6 000 pieds de lavandes. Cette action spectaculaire a connu un formidable succès et témoigne du volontarisme d'une filière qui se mobilise pour mieux se faire connaître à l'échelle européenne et trouver de nouveaux débouchés.

Mais, au-delà de leurs dimensions culturelles et paysagères très fortes, mises en valeur à juste titre au cours de plusieurs campagnes de promotion, les plantes aromatiques et à parfum demeurent un enjeu stratégique touchant aux secteurs agricole, touristique, industriel et commercial. Elles forment le socle économique de nombreux territoires, le plus souvent secs et montagneux, situés dans le sud-est de la France. En effet, il faut rappeler que le chiffre d'affaires lié à la lavande et au lavandin dans les activités de parfumerie et de cosmétiques, industrielles et artisanales, est aujourd'hui estimé à plus de 2 milliards d'euros.

Face à de tels enjeux, le ministère de l'agriculture et de la pêche a mis en place un plan d'urgence destiné à venir en aide aux producteurs. Ce dispositif a sans conteste une utilité à court terme, mais il n'est pas de nature à apporter de réelles perspectives d'avenir.

C'est pourquoi les producteurs et de nombreuses collectivités locales concernées appellent de leurs voeux, et avec force, un plan de soutien à moyen et à long terme qui serait financé dans le cadre des nouveaux fonds structurels européens. Ce programme devrait en particulier permettre la mise en place d'une mesure agri-environnementale d'aide à l'hectare.

Par ailleurs, ces productions ne bénéficient pas du premier pilier de la politique agricole commune, la PAC. Par conséquent, elles devraient recevoir l'appui du second pilier et, dans le même temps, continuer à bénéficier du soutien de l'État dans les futurs contrats de projets en cours d'élaboration.

Je me fais ici le porte-parole des 2 400 producteurs de lavandes ou de lavandins, dont 800 sont installés en Drôme provençale, qui sont inquiets quant à leur avenir.

Je souhaite donc connaître les mesures envisagées par le Gouvernement pour répondre à cette inquiétude. Elles doivent être de deux ordres.

En effet, certaines actions relèvent du moyen terme ou du long terme. Je veux parler du contrat de projet entre l'État et les régions et des fonds structurels européens. D'autres sont plus conjoncturelles et concernent un dossier qui m'inquiète particulièrement en tant qu'élu drômois : la situation de la société Le clos d'Aguzon. Cette entreprise, située dans le sud de la Drôme, projette de développer la sauge sclarée afin de pérenniser son activité.

M. le président. La parole est à M. le ministre.

M. Dominique Bussereau, ministre de l'agriculture et de la pêche. Monsieur le sénateur, je vous remercie de poser aussi clairement la problématique du développement des plantes à parfum et aromatiques et plus particulièrement de la lavande.

Il s'agit, il est vrai, de productions provençales au sens large, puisqu'il existe une Drôme provençale.

M. le président. M. Jean Besson est élu du département d'Émile Loubet ; vous voyez jusqu'où cela peut conduire ! (Sourires.)

M. Dominique Bussereau, ministre. Monsieur le président, je m'incline comme vous devant Émile Loubet... (Nouveaux sourires.)

Les plantes à parfum et aromatiques sont très importantes en termes de créations d'emploi et de valeur ajoutée dans des terroirs où leur production n'est pas toujours facile. Ces dernières années, les conditions climatiques n'ont pas été très favorables et la concurrence internationale s'est considérablement durcie. Mais nous allons essayer d'aider les producteurs face à cette crise.

Comme nous le faisons chaque fois que les circonstances l'exigent, nous avons mis en place des aides d'urgence. Ainsi, l'Office national interprofessionnel des plantes à parfum, aromatiques et médicinales, l'ONIPPAM, a élaboré un plan d'urgence pour essayer de réguler le marché, de continuer à favoriser l'innovation, de rechercher de nouveaux débouchés, de structurer l'offre, d'améliorer sa qualité et de valoriser les produits de la filière. Certes, cette première étape n'est pas négligeable, mais il faut un plan de soutien à moyen terme.

J'ai donc demandé aux services du ministère et à l'ONIPPAM de travailler avec la profession et les collectivités locales sur un programme d'actions ayant pour objectif de favoriser le développement durable de ces productions et la cohésion des acteurs de tous les secteurs concernés.

Pour financer un tel programme, nous bénéficierons du Fonds européen agricole pour le développement rural, le FEADER. J'espère que nous pourrons également intégrer ce plan dans le futur contrat de projet entre l'État et les régions Rhône-Alpes et Provence-Alpes-Côte d'Azur. S'agissant des mesures agri-environnementales, nous financerons la contrepartie nationale de l'indemnité compensatrice de handicap naturel, l'ICHN. Il conviendrait que les collectivités locales puissent également participer.

Je vais à présent évoquer la société Le clos d'Aguzon de votre département. Cette entreprise rencontre des difficultés, mais elle dispose également de nombreux atouts. L'État lui accorde un prêt de 330 000 euros, ce qui est à la hauteur de ce que votre département et la région Rhône-Alpes doivent lui apporter pour qu'elle puisse continuer à se développer.

Enfin, de très belles actions de promotion sont actuellement mises en oeuvre. Ainsi, la Grand-Place de Bruxelles, lieu magnifique s'il en est, a accueilli un champ de lavande ce week-end. En outre, le jeudi 22 juin prochain, j'inaugurerai une grande exposition intitulée « L'Essence de Provence » - quel beau nom ! - à la Cité des sciences et de l'industrie de la Villette. Cette manifestation sera consacrée durant six mois aux plantes à parfum et aromatiques provençales, à leur territoire et à toutes les activités liées à la filière.

Nous serons, je le crois, nombreux à nous y retrouver. Ce sera, me semble-t-il, une belle fenêtre de promotion pour les plantes à parfum et aromatiques dans la capitale.

M. le président. La parole est à M. Jean Besson.

M. Jean Besson. Je suis dans la même situation que M. Madec tout à l'heure : bien qu'étant membre de l'opposition, je me trouve dans l'obligation de remercier M. le ministre, en particulier s'agissant des 330 000 euros accordés à l'entreprise Le clos d'Aguzon.

Certes, d'autres sociétés font également partie de cette filière, en particulier dans la région du président Gaudin ; je pense à l'entreprise L'Occitane. Mais il est certain que le soutien financier qui est apporté à la société Le clos d'Aguzon est très important. Je tiens à vous en remercier, monsieur le ministre.

Bien entendu, les collectivités locales joueront également leur rôle. Le président Gaudin sera sans doute notre interlocuteur auprès de la région Provence-Alpes-Côte d'Azur ; la région Rhône-Alpes et le conseil général de la Drôme soutiendront l'entreprise au même niveau que l'État.

M. le président. Monsieur le ministre, il faudra que vous veniez un jour visiter le « lycée des parfums » que nous avons créé à Grasse ; il connaît un énorme succès.

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