Question de M. REINER Daniel (Meurthe-et-Moselle - SOC) publiée le 07/09/2006

M. Daniel Reiner attire l'attention de M. le ministre délégué à l'aménagement du territoire sur le montant de l'enveloppe financière dévolue à la Lorraine pour le contrat de projet 2007-2013 et sur les méthodes employées pour la négociation de ces contrats.
Il s'indigne du montant attribué à la Lorraine pour le futur contrat de projet qui présente une baisse de 203,5 millions d'euros par rapport au contrat de plan 2000-2006 (605 millions d'euros pour le plan précédent, 401,5 pour le futur contrat de projet).
L'effort de l'État sur les contrats de projet en faveur de la Lorraine passe donc de 6,63 % de l'enveloppe totale de 2000-2006 à 3,82 % alors même que 80 % de l'enveloppe qui lui a été attribuée lors du précédent contrat de plan sont d'ores et déjà utilisés.
La Lorraine passerait donc au 9ème rang en matière de dotation, alors qu'elle était hier encore au 3ème rang et la contribution par habitant ne serait plus que de 172 € alors qu'elle était précédemment à 259 €.

Cette baisse ne peut être justifiée par l'exclusion du volet routier des futurs contrats car il en est de même pour l'ensemble des régions françaises et la région Lorraine, il faut le rappeler, ne bénéficiait pas dans le plan précédent d'un volet routier plus important que les autres.
On note également que cette baisse ne touche que la Lorraine et le Nord-Pas-de-Calais : toutes les autres régions sont en hausse ou stagnent.

De plus, la préparation de ce contrat a été menée en quelques semaines et les montants ont été annoncés durant l'été. On ne peut guère, dans ces conditions, parler d'un véritable partenariat entre l'État et les collectivités territoriales.

La région Lorraine a subi une crise industrielle et économique exceptionnelle dans les années 1980. Elle a su, avec la mobilisation de l'État, engager une politique de reconversion qui a commencé a donner des résultats mais qui nécessite aujourd'hui encore un effort renouvelé pour renforcer ce qui demeure fragile. Ainsi, on a pu voir ces dernières semaines la fermeture de nombreuses entreprises, soit traditionnelles comme par exemple dans les Vosges, soit plus récentes et créées pendant la période de reconversion.

Enfin, faut-il le rappeler, les régions touchées par l'après-mines justifient pendant plusieurs années encore un effort particulier, comme l'a demandé l'ensemble des élus lors du débat sur cette question qui s'est tenu en juin.

Il souhaite donc connaître les raisons de cette diminution exceptionnelle des crédits alloués au contrat de projet Lorrain et demande que l'enveloppe financière attribuée à la Lorraine soit réévaluée.

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Réponse du Ministère délégué à l'aménagement du territoire publiée le 26/10/2006

Réponse apportée en séance publique le 25/10/2006

M. le président. La parole est à M. Daniel Reiner, auteur de la question n° 1109, adressée à M. le ministre délégué à l'aménagement du territoire.

M. Daniel Reiner. Monsieur le ministre, je souhaite, par cette question que j'ai rédigée au début du mois de septembre mais qui ne vient en séance qu'aujourd'hui seulement, attirer votre attention sur le montant de l'enveloppe financière dévolue à la Lorraine pour le contrat de projet 2007-2013 et sur les méthodes employées pour la négociation de ces contrats.

Je ne vous cache pas que, comme la plupart des élus lorrains, je suis véritablement indigné du montant - il a été annoncé en juillet dernier - attribué à la Lorraine pour le futur contrat de projet, qui présente une baisse de 203,5 millions d'euros par rapport au contrat de plan 2000-2006. En effet, 605 millions d'euros étaient prévus pour le contrat de plan précédent alors que seulement 401,5 millions d'euros sont programmés pour le futur contrat de projet.

Après avoir examiné la situation des autres régions, nous nous sommes rendu compte que l'effort de l'État, s'agissant des contrats de projets en faveur de la Lorraine, passait de 6,63 % à 3,82 % de l'enveloppe financière totale pour 2000-20²06, alors même que plus de 80 % des crédits qui lui ont été attribués lors du précédent contrat de plan sont d'ores et déjà utilisés.

La Lorraine passerait donc au neuvième rang en matière de dotation, alors qu'elle était encore au troisième rang, et la contribution par habitant - j'ai bien entendu celle que vous citiez pour le Jura tout à l'heure - ne serait plus que de 172 euros, alors qu'elle était précédemment de 259 euros.

Cette baisse de plus de 30 % ne peut être justifiée par l'exclusion du volet routier des futurs contrats, car il en va de même pour l'ensemble des régions françaises, et la région Lorraine ne bénéficiait pas, dans le plan précédent, d'un volet routier plus important que les autres.

On note également que cette baisse ne touche que la Lorraine et le Nord-Pas-de-Calais, c'est-à-dire toutes les régions industrielles d'hier.

De plus, la préparation de ce contrat a été menée en quelques semaines et les montants ont été annoncés durant l'été. On ne peut guère, dans ces conditions, parler d'un véritable partenariat entre l'État et les collectivités territoriales.

La région Lorraine a subi une crise industrielle et économique exceptionnelle dans les années quatre-vingt. Elle a su, avec la mobilisation de l'État, engager une politique de reconversion qui a commencé à donner des résultats, mais qui nécessite, aujourd'hui encore, un effort renouvelé de solidarité pour renforcer ce qui demeure fragile. Ainsi, on a pu assister, ces dernières semaines, à la fermeture de nombreuses entreprises, soit traditionnelles, comme le textile dans les Vosges, soit plus récentes et créées pendant la période de reconversion.

La Lorraine et les élus lorrains sont prêts à engager un partenariat fort avec l'État sur des projets concrets. Mais qu'en est-il de l'État ? Comment, avec les moyens que vous annoncez, la Lorraine pourrait-elle financer des projets essentiels à son développement, comme le renforcement de l'axe Nancy-Metz, la réalisation de la gare d'interconnexion TGV-TER de Vandière, le développement du site de Belval ?

Enfin - faut-il le rappeler ? -, les régions touchées par l'après-mines justifient, pendant plusieurs années encore, un effort particulier, comme l'a demandé l'ensemble des élus lors de la discussion, le 22 juin 2006, de la question orale avec débat sur la gestion de l'après-mines, débat auquel vous participiez et dans lequel je suis moi-même intervenu.

Par conséquent, je souhaite connaître les raisons de cette diminution exceptionnelle des crédits alloués au contrat de projets lorrain et je demande - je ne suis pas le seul -que l'enveloppe financière attribuée à la Lorraine soit réévaluée.

Des discussions ont été rouvertes depuis le mois d'octobre, mais il est clair qu'une réévaluation significative serait un signe fort de la part de l'État, qui prouverait ainsi que le sort de la Lorraine, laquelle a beaucoup donné à la France, ne peut pas être aujourd'hui banalisé.

M. le président. La parole est à M. le ministre délégué.

M. Christian Estrosi, ministre délégué à l'aménagement du territoire. Monsieur le sénateur de Meurthe-et-Moselle, tout d'abord, je vous remercie sincèrement du ton et de la qualité de votre question. Vous l'avez posée sous une forme très constructive. Cela démontre que vous souhaitez aboutir à une bonne conclusion.

Ayant moi-même participé, en tant qu'élu local, à nombre de discussions sur les contrats de plan précédents, j'ai coutume de dire que, lors de la signature d'un contrat, on signe pour une durée au cours de laquelle, pour des raisons d'alternance de gouvernements, l'État qui signe n'est pas celui qui exécute et, pour des raisons d'alternance des exécutifs, la région qui signe n'est pas forcément celle qui exécute. Pendant la durée de ce contrat, on essaie toutefois, ensemble, de faire avancer les choses sur un territoire.

Ce n'est donc pas par dogmatisme, comme je l'ai dit dans ma réponse à une question précédente, que nous sommes passés d'une génération de contrats de plan à une génération de contrats de projets.

S'agissant de la Lorraine, au cours d'une première phase, les élus ont fait remonter jusqu'à nous leurs projets, sur la base desquels a été donné au préfet un mandat de négociation qui n'est pas forcément satisfaisant. En effet, certains élus lorrains se sont rendu compte, en cours de route, que des projets qu'ils n'avaient pas identifiés au cours de la première phase méritaient de l'être.

Personnellement, je suis totalement ouvert. Le Premier ministre, lui-même, a fait savoir que nous donnerions une marge de manoeuvre plus grande en fonction de la qualité des projets qui allaient remonter jusqu'à nous.

La baisse globale de l'enveloppe accordée à la Lorraine est utilisée comme argument de base par ceux qui font des calculs un peu techniques, voire technocratiques, sur la répartition des enveloppes par région. Mais il faut admettre que la situation de la Lorraine est différente de celle qui prévalait à la fin des années quatre-vingt-dix, lors de la préparation du précédent contrat de plan entre l'État et la région. Ainsi, malgré les quelques difficultés dont vous m'avez fait part, le taux de création d'entreprises est demeuré important ces dernières années et dépasse même, chaque année depuis quatre ans, le niveau élevé atteint en 1993. La Lorraine se classe maintenant au quatrième rang national pour les créations pures, soit 71 % du total. De même, la contribution du secteur des services à la création d'emplois témoigne de la diversification continue du tissu économique régional.

Les politiques mises en oeuvre par l'État et celles qui seront définies dans un cadre contractuel doivent donc accompagner ces mutations dans une double optique de solidarité et de renforcement de la compétitivité.

Certes, la bonne réponse n'est pas de sanctionner la Lorraine, qui s'est montrée bon élève et dont la situation s'est améliorée, puisqu'elle à connu une augmentation des créations d'entreprises et une diversification de ses activités économiques. C'est en tout cas une façon de faire qui ne me convient pas, surtout si des projets forts se présentent.

Avec l'ossature et l'architecture du contrat de projets, nous aurons la possibilité de prendre en compte ces projets. J'ai d'ailleurs déjà accompagné un certain nombre de projets concernant, notamment, vos deux pôles de compétitivité : le pôle Matériaux innovants et produits intelligents, MIPI, et le pôle Fibres naturelles Grand Est. Il y a aussi les universités - celles de Metz, de Nancy - mais aussi l'intermodalité.

Sur ce dernier point, j'ai un désir pour la Lorraine, qui est située au carrefour entre mer du Nord et mer Méditerranée. Je souhaite que l'architecture du contrat de projets soit l'occasion pour nous tous de rouvrir un dossier qui a été malheureusement clos par l'un de mes prédécesseurs, la ministre en charge de l'aménagement du territoire et de l'environnement en 1997, celui de la liaison entre le Rhin et le Rhône. Vous connaissez parfaitement l'opportunité qui existe entre la Saône et la Moselle : saisissons-la ensemble !

Je pense aussi, dans le domaine des transports, au grand débat sur l'A31 et l'A32. Vos axes routiers étant saturés, il est nécessaire d'apporter une réponse immédiate, mais il ne faudrait pas pour autant qu'à l'occasion de l'arbitrage qui aura lieu entre élus lorrains sur les choix de tracé la réponse qui sera apportée le soit pour solde de tout compte, c'est-à-dire que l'on ne s'occupe plus du reste ensuite, la création de ces « tuyaux » que sont ces axes routiers supplémentaires servant, en quelque sorte, de pompe aspirante !

Le TGV arrivera dans votre région au premier semestre prochain. Je préconise qu'il serve non seulement au transport de passagers, mais aussi, dans les créneaux nocturnes, au transport rapide de marchandises. Saisissons cette opportunité pour intégrer au réseau européen les liaisons entre Perpignan et Bettembourg, au Luxembourg, entre Marseille et Londres, Marseille et la Lorraine, l'Alsace et, demain, l'Allemagne. De même, le fret aérien qui arrive à l'aéroport Roissy - Charles-de-Gaulle pourrait irriguer l'est de la France !

Sachons utiliser toutes les opportunités qui nous sont offertes par le contrat de projets pour, au passage, monter des plateformes logistiques, telles que vous les avez évoquées, avec les nouvelles gares, qui deviendraient des noeuds d'échanges entre rail, route et fluvial. Le territoire de la Lorraine s'offre à toutes ces opportunités.

Je n'entrerai pas plus dans les détails. Sachez seulement, monsieur Reiner, que je suis totalement ouvert à tout ce que vous venez d'évoquer à l'occasion de cette question orale. J'ai tenu, voilà quelques jours, une réunion avec le M. Pierre-René Lemas, préfet de la région Lorraine. Il m'a rapporté l'état de vos discussions avec le président du conseil régional de Lorraine, M. Jean-Pierre Masseret, les autres présidents de collectivités territoriales et les parlementaires lorrains de tout bord. Je souhaite que le contrat de projets qui sera signé permette à la Lorraine d'aller plus loin que ce qui était prévu dans le mandat de négociation initial.

Concrètement, nous ferons les efforts nécessaires dès lors que vous aurez vous-même identifié, parmi tous ceux que je viens d'évoquer et d'autres sans doute, des projets forts contribuant à l'essor économique et social de la Lorraine. Je m'engage à ce que, si un accord intervient entre l'État, la région et les collectivités de Lorraine sur des projets clairement identifiés dans les jours qui viennent - puisque, à quelques semaines près, nous sommes entrés dans le calendrier de ces contrats -, à ce que l'État fasse un effort supplémentaire. Dès lors que les collectivités respecteront le cadre et les objectifs des nouveaux contrats, je ferai en sorte que cet effort soit mis à profit dans votre région pour faire valoir des demandes d'ajustements permettant de compléter le périmètre de la négociation et d'envisager la conclusion rapide des discussions.

M. le président. La parole est à M. Daniel Reiner.

M. Daniel Reiner. Monsieur le ministre, j'enregistre votre réponse et je note avec une certaine satisfaction que vous accordez quelques justifications à l'indignation qui a été la nôtre à l'annonce du montant attribué à la région Lorraine. Les élus, qui resteront vigilants, sont en train de déposer des projets complémentaires. La discussion est donc ouverte.

Je me permets d'attirer votre attention sur quelques projets qui intéressent l'ensemble de la Lorraine et qui sont encore l'objet de discussions : la promotion de la coopération métropolitaine entre Metz et Nancy, par la valorisation de l'espace central et, vous l'avez dit très justement, autour des gares d'interconnexion TGV-TER et de l'aéroport - lequel va évidemment perdre une partie de sa signification avec l'arrivée du TGV -, le projet transfrontalier avec le Luxembourg sur le site de Belval, pour lequel les montants financiers annoncés sont un peu courts, alors qu'il est d'une importance déterminante. En effet, 60 000 travailleurs lorrains se rendent tous les matins au Luxembourg. La coopération doit donc être naturellement plus poussée. J'ajouterai à cela la grande zone industrielle du Nord, qui est d'ailleurs mentionnée dans la directive territoriale d'aménagement du territoire.

En tant que Lunévillois, permettez-moi de dire que les crédits culturels ne permettront pas de hâter - ils vont, au contraire, la retarder - la restauration du château de Lunéville. C'est pourtant le plus grand chantier patrimonial d'Europe actuellement. L'enveloppe sera tout à fait insuffisante, surtout si elle est partagée avec d'autres projets !

Enfin, s'agissant du volet territorial, vous avez, d'une certaine manière, salué le dynamisme de la Lorraine en soulignant les nombreuses créations d'entreprises. Cela relève très largement d'un fort mouvement de développement local, qui a besoin de bénéficier de crédits d'ingénierie, ce que le volet territorial ne permet pas actuellement.

La discussion reste ouverte et nous serons naturellement très vigilants, monsieur le ministre.

M. Christian Estrosi, ministre délégué. Je demande la parole.

M. le président. Je vous la donne, monsieur le ministre, mais pour une intervention très rapide, car nous avons encore un certain nombre de questions à l'ordre du jour !

M. Christian Estrosi, ministre délégué. Monsieur le sénateur, s'agissant du volet territorial, vous venez de dire qu'il n'y avait pas de crédits d'ingénierie. Je vous confirme que nous débloquons des crédits de l'État, qui seront complétés par des crédits provenant du Fonds européen de développement régional, le FEDER.

M. Daniel Reiner. Je vous remercie de cette précision, monsieur le ministre.

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