Question de M. COURTEAU Roland (Aude - SOC) publiée le 06/10/2006

Question posée en séance publique le 05/10/2006

M. Roland Courteau. Ma question s'adresse à M. le ministre délégué à l'industrie.

Alors que l'Assemblée nationale vient tout juste de se prononcer sur le projet de loi visant notamment à privatiser Gaz de France (Exclamations sur les travées de l'UMP et de l'UC-UDF, ainsi que sur certaines travées du RDSE), voilà que le Sénat, sans délai et au pas de charge, est à son tour invité à légiférer.

Mme Janine Rozier. Au pas de charge ?

M. Roland Courteau. Pourquoi une telle obsession à vouloir à toute force privatiser GDF, alors que les nouveaux défis justifient l'accroissement de l'intervention des pouvoirs publics pour assurer le contrôle de l'énergie ?

Pourquoi un tel acharnement à démolir les fondements mêmes de notre service public de l'énergie qui, pourtant, a fait la preuve de son efficacité ?

M. René-Pierre Signé. Par idéologie !

M. Roland Courteau. N'eût-il pas été plus responsable, en cette fin de législature et sur un dossier aussi essentiel et aussi lourd de conséquences, de renvoyer une telle décision au vote des Français lors des élections de 2007 ?

M. René-Pierre Signé. Voilà !

M. Roland Courteau. Mais peut-être avez-vous peur de leur jugement ?

Quelle funeste erreur que de favoriser la transformation d'un monopole public en un monopole privé, pour le plus grand bénéfice de quelques actionnaires, alors que d'autres solutions existent !

Quelle faute majeure que d'abandonner les Français à la jungle des tarifs les plus fous...

M. René-Pierre Signé. Ça, ils vont payer !

M. Roland Courteau. ... à travers un projet de loi de complaisance à l'égard du marché et de négligence envers l'avenir ! Votre responsabilité sera écrasante, car on ne joue pas au Monopoly avec les entreprises publiques.

M. Jean-Jacques Hyest. Pour ça, vous pouvez parler !

M. Alain Gournac. Vous l'avez fait !

M. Roland Courteau. La morale ne s'y retrouve pas davantage et le Gouvernement, qui avait engagé sa parole, en sort décrédibilisée.

En effet, M. Sarkozy, voilà à peine quelques mois, affirmait que : « Compte tenu de leur caractère déterminant pour les intérêts vitaux de la France en termes de sécurité d'approvisionnement et de sécurité nucléaire, l'État conservera une part majoritaire du capital des entreprises EDF et GDF. »

M. Robert Hue. Bravo !

M. Roland Courteau. Et M. Sarkozy poursuivait en ces termes : « Je l'affirme parce que c'est un engagement du Gouvernement : EDF et GDF ne seront pas privatisés. » (M. Boulaud pointe le pouce vers le bas.)

M. René-Pierre Signé. Il l'affirme !

M. Roland Courteau. Et M. Sarkozy concluait en ces termes : « Ce qui nous garantit que la loi ne permettra pas de privatiser ultérieurement, c'est la parole de l'État ! » (M. Boulaud s'esclaffe !)

D'où ma question : monsieur le Premier ministre, que vaut la parole de l'État par les temps qui courent ?

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Réponse du Ministère délégué à l'industrie publiée le 06/10/2006

Réponse apportée en séance publique le 05/10/2006

M. le président. La parole est à M. le ministre délégué.

M. René-Pierre Signé. Bien embarrassé pour répondre !

M. François Loos, ministre délégué à l'industrie. Pas du tout !

M. Didier Boulaud. Pourtant, la question est embarrassante !

M. François Loos, ministre délégué. C'est nous qui avons adopté une attitude responsable en déposant sans attendre le projet de loi relatif au secteur de l'énergie.

M. Michel Dreyfus-Schmidt. C'est qui « nous » ?

M. François Loos, ministre délégué. C'est nous qui prenons nos responsabilités.

Si nous n'avions rien fait, la directive européenne sur l'ouverture des marchés se serait appliquée automatiquement au 1er juillet 2007, ce qui aurait eu pour effet de supprimer les tarifs régulés dans notre pays.

M. Ladislas Poniatowski. Absolument !

M. Alain Gournac. Eh oui !

M. François Loos, ministre délégué. Monsieur Courteau, c'est parce que nous voulons maintenir l'intervention de l'État et les tarifs régulés, parce que nous savons que c'est fondamental pour les consommateurs français et pour l'économie de notre pays que nous sommes obligés de transposer la directive européenne avant la fin de l'année. Ainsi, au 1er juillet 2007, ...

M. Didier Boulaud. Nous serons revenus aux affaires !

M. René-Pierre Signé. Préparez vos vacances !

M. François Loos, ministre délégué. ... les consommateurs français pourront conserver les tarifs régulés qui, vous le savez, sont particulièrement intéressants, dans l'absolu et par rapport à ceux qui sont pratiqués dans les autres pays européens.

M. Guy Fischer. On en reparlera !

Mme Nicole Borvo Cohen-Seat. Cela fera long feu !

M. François Loos, ministre délégué. Par ailleurs, vous aurez sans doute observé que, depuis 2004, les prix du pétrole et du gaz ont été multipliés par 2,5.

Mme Nicole Borvo Cohen-Seat. C'est pour cette raison que vous privatisez !

M. François Loos, ministre délégué. Face à de très grands vendeurs qui possèdent de très importantes réserves, ...

Mme Nicole Borvo Cohen-Seat. Ce sont des États !

M. François Loos, ministre délégué. ...ce qui compte, c'est la capacité des entreprises à acheter sur le long terme, à investir dans des gisements, à acquérir elles-mêmes des ressources. Or Gaz de France ne possédant pas de gisement a besoin d'acquérir une taille plus importante.

Aujourd'hui, Gaz de France détient des réseaux de distribution et des fichiers de clients.

Mme Nicole Borvo Cohen-Seat. Il fallait décider la fusion de EDF avec GDF. Que vient faire Suez là-dedans ?

M. François Loos, ministre délégué. Aujourd'hui, il nous faut donner à Gaz de France une dimension internationale. À cette fin, nous devons la doter des moyens nécessaires et d'une taille appropriée. C'est la raison pour laquelle nous avons préféré ouvrir le capital de Gaz de France plutôt que de demander à l'entreprise de s'endetter pour faire face à cette situation.

Alors, mesdames, messieurs les sénateurs, qui a raison en termes de calendrier ? Qui prend ses responsabilités ? C'est nous ! (Bravo ! et vifs applaudissements sur les travées de l'UMP.)

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