Question de M. SOUVET Louis (Doubs - UMP) publiée le 19/10/2006

M. Louis Souvet attire l'attention de M. le ministre d'Etat, ministre de l'intérieur et de l'aménagement du territoire, sur les modalités d'utilisation des forces de l'ordre suivant l'objet des événements à encadrer. Les élus locaux font part de leur étonnement, de leur incompréhension, quand sont accordés des moyens en hommes considérables pour « encadrer » des « rassemblements festifs », rassemblements rendus possibles grâce à des réquisitions pour le moins inopportunes au détriment d'activités habituelles pratiquées sur ces terrains (exemple aérodrome). Alors que, dans le même temps, d'authentiques manifestations sportives fédérant coureurs, participants et supporters spectateurs autour d'une émulation de bon aloi ne peuvent avoir lieu faute des autorisations ad hoc et en dépit d'une ancienneté et d'une rigueur avérées. Il lui demande si les pouvoirs publics sont conscients de l'état d'esprit que cette différence de traitement peut engendrer dans le public.

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Réponse du Ministère de l'écologie et du développement durable publiée le 22/11/2006

Réponse apportée en séance publique le 21/11/2006

M. le président. La parole est à M. Louis Souvet, auteur de la question n° 1148, adressée à M. le ministre d'État, ministre de l'intérieur et de l'aménagement du territoire.

M. Louis Souvet. Monsieur le président, madame la ministre, mes chers collègues, permettez-moi tout d'abord de saluer l'action des forces de l'ordre, qui, tous les jours, sont confrontées dans les cités ou les quartiers dits « sensibles » aux situations les plus dangereuses, à des traquenards prémédités aux conséquences dramatiques que l'on connaît.

L'excuse de minorité permet encore aux incendiaires de voir leurs peines divisées par deux ; hélas, elle ne réduira pas de moitié les brûlures de la victime marseillaise du bus n° 32 du 28 octobre - monsieur le président, je vous rappelle là un bien mauvais souvenir dans votre fonction de maire !

Quant à la soixantaine de personnes interpellées après des dégradations de véhicules, puis relâchées, je sais gré au ministre de l'intérieur d'avoir demandé un rapport circonstancié, renforçant par là même la crédibilité de sa détermination.

Tous les citoyens qui se reconnaissent dans les valeurs de la République française - j'en fais partie - soutiennent son action. Mon propos n'est donc pas de mettre en doute sa détermination : celle-ci est nécessaire pour un retour de l'état de droit partout et en tout lieu. Mais je me dois de relayer l'étonnement des responsables d'associations, notamment sportives, quant à l'encadrement et à la sécurisation, par exemple, des courses cyclistes, qu'on semble leur refuser de plus en plus fréquemment.

Ces responsables bénévoles sont bien conscients que les missions que j'ai évoquées au début de mon propos doivent être prioritaires quant aux moyens et aux effectifs à opposer à quelques groupuscules en mal de reconnaissance, groupuscules, faut-il le rappeler, utiles à d'autres trafiquants de grande envergure...

Mais là où les responsables associatifs s'interrogent - tout comme moi, d'ailleurs -, c'est quand on leur refuse assistance pour une compétition organisée régulièrement depuis des années. De telles compétitions mettent en valeur l'effort d'une belle jeunesse sportive et la disponibilité des bénévoles qui les encadrent ; ce sont des manifestations qui suscitent un engouement populaire de bon aloi, une adhésion fédératrice.

Dans le même temps, la puissance publique va procéder, par exemple, à la réquisition de plates-formes aéroportuaires pour permettre le déroulement de rassemblements d'un nouveau genre, rassemblements qui nécessiteront une surveillance médicale constante, se solderont au mieux par des malaises et des hospitalisations pour les causes que l'on sait, et au pire par des décès par overdose : osons appeler un chat un chat !

Je ne m'étendrai pas sur les moyens que les communes concernées, qui, comme beaucoup en milieu rural, sont généralement de taille modeste, doivent mettre en oeuvre pour dépolluer ensuite les sites en question et pouvoir les rendre à leurs usagers habituels sans risque de piqûres qui ne seraient pas dues, hélas ! à la flore ou à la faune sauvage.

Le citoyen de base s'interroge quant à l'ambiguïté de tels comportements, bien éloignés d'un quelconque concept d'effort, de fête ou de convivialité. En clair, on réprime fort logiquement le tapage nocturne, mais on tolère ce phénomène à la puissance mille, ou plus, qui s'accompagne de bien d'autres nuisances, puisque, généralement, la police ou la gendarmerie encadrent ces rassemblements et que, bien souvent, le représentant de l'État négocie avec leurs « organisateurs ».

Mes interlocuteurs, réels organisateurs dévoués de manifestations sportives coutumières - j'insiste sur ce caractère coutumier - se demandent, et je les rejoins sur ce point, si n'est pas en train de se vérifier la théorie de l'évolution développée par Platon : « Lorsque, finalement, les jeunes méprisent les lois parce qu'ils ne reconnaissent plus au-dessus d'eux l'autorité de rien et de personne, alors, c'est le début de la tyrannie. »

Par conséquent, madame la ministre, j'ai l'honneur de vous demander quelles sont les raisons dont procède cette différence de traitement. La France, c'est une majorité de citoyens qui aspirent au calme et à la tranquillité : ils comptent sur vous, ne les décevez pas ! Le sujet est terre à terre, sans aucun doute. Mais, croyez-en mon bon sens jurassien, pour ne pas dire paysan : nos concitoyens n'ont que faire de discussions et autres surenchères à propos du sexe des anges.

Les organisateurs de manifestations sportives ou culturelles sont des bénévoles. Le bénévolat constitue le squelette de la société dans laquelle nous vivons et nous épanouissons en dehors de nos activités professionnelles. Ces bénévoles ont besoin de nous, ont besoin de vous, madame la ministre.

Les maires ne leur comptent ni leur soutien ni leurs aides, car les bénévoles, les associations, les clubs animent leurs collectivités, grandes ou petites. Mais les maires ne disposent pas toujours de l'autorité légale, des droits et des moyens permettant de réguler, par exemple, la circulation sur des dizaines de communes traversées, voire sur plusieurs départements.

Par ma voix, ils vous lancent un appel. Sachez les écouter, sachez les entendre ! La voix des maires, unie à celle des volontaires, des bénévoles, représente la France des responsables, la France de ceux qui bougent, de ceux qui animent, de ceux qui forment et qui gagnent. Ils rendent notre pays plus vivant, plus attractif, plus touristique. Ils occupent bénévolement notre jeunesse. Ils comptent sur vous, ils attendent votre réponse.

M. le président. La parole est à Mme la ministre.

Mme Nelly Olin, ministre de l'écologie et du développement durable. Monsieur le sénateur, vous interrogez le Gouvernement sur les modalités d'utilisation des forces de l'ordre suivant l'objet des événements à encadrer.

Vous faites allusion à des « rassemblements festifs », en fait des rave parties, qui bénéficieraient d'un encadrement renforcé, avec « des moyens en hommes considérables », au détriment de manifestations plus traditionnelles et plus classiques.

Le ministre d'État, ministre de l'intérieur, tient tout d'abord à souligner qu'aucune manifestation de ce type n'a eu lieu dans la circonscription de Montbéliard ni même dans le département du Doubs.

L'histoire récente a démontré le bien-fondé de l'important investissement des pouvoirs publics dans la préparation des services d'ordre mis en place à l'occasion des rave parties.

Il ne s'agit d'ailleurs pas pour l'État d'encadrer un rassemblement autorisé, encore moins de l'organiser, mais de prendre les dispositions de sauvegarde nécessaires pour limiter, autant que faire se peut, les risques aux personnes et aux biens et les troubles à l'ordre public.

En effet, l'accompagnement par les services de l'État de plusieurs « teknivals » démontre qu'il est préférable d'être associé le plus en amont possible à ces rassemblements, afin de prendre les mesures qui s'imposent pour réduire grandement les troubles à l'ordre public, renforcer la sécurité des participants et rassurer totalement les riverains. Cette présence permet aussi, chacun s'accorde à le reconnaître, de mener une lutte énergique contre les trafics et usages de produits stupéfiants.

Pour autant, monsieur le sénateur, les manifestations sportives traditionnelles et de grande ampleur qui se déroulent sur votre circonscription ne sont pas négligées. Elles font toujours l'objet de la plus grande attention de la part des services de police et de gendarmerie, qui mettent en place des services d'ordre à la hauteur de ces événements.

C'est le cas des rencontres du Football club de Sochaux-Montbéliard, qui bénéficie à chacun de ses matchs de la présence d'une unité de force mobile - escadron de gendarmerie mobile ou compagnie républicaine de sécurité -, des courses cyclistes ou du semi-marathon du Lion, par exemple.

Afin de vous répondre avec la plus grande précision, le ministre de l'intérieur tient à mentionner le refus d'autorisation administrative d'une épreuve cycliste organisée par le Vélo club de Montbéliard. Cette épreuve, certes appréciée, mais de dimension locale, a effectivement reçu un avis défavorable de la gendarmerie, car elle coupait plusieurs voies à grande circulation, notamment la RN 83 et la RN 463.

Les organisateurs ayant refusé d'en modifier l'itinéraire, comme le leur demandait la préfecture du Doubs, l'autorisation n'a donc pas été accordée.

Il s'agit plutôt là, monsieur le sénateur, d'un problème administratif, qui n'est sans doute pas unique, mais qui ne relève d'aucune différence de traitement entre les événements nécessitant un service de sécurité et les autres.

M. le président. La parole est à M. Louis Souvet.

M. Louis Souvet. Madame la ministre, je vous remercie de la réponse que vous m'avez apportée.

Elle appelle cependant de ma part, puisque je me fais ici le porte-parole des organisateurs de ces manifestations sportives, quelques commentaires.

D'abord, vous avez dit qu'aucune manifestation de ce type n'avait eu lieu à Montbéliard. Je n'ai pas spécialement plaidé la cause de Montbéliard. La France est une et indivisible, du moins, je l'espère. Il reste que, à Montbéliard, des moyens de gendarmerie ont été refusés, ce qui nous a obligés à annuler plusieurs courses cyclistes très appréciées et auxquelles le Vélo club de Montbéliard était très attaché.

Vous avez également souligné qu'il n'y avait pas eu à Montbéliard de manifestations s'accompagnant d'usage de stupéfiants et autres « teknivals ». C'est vrai, mais il y en a eu non loin de Montbéliard.

On ne peut valablement prétendre que, parce qu'on a mis une fois les moyens, on les a mis à chaque fois. Cela n'a pas été le cas. Je peux vous assurer que les responsables d'associations ont été extrêmement peinés de devoir mettre fin à des manifestations très anciennes, et l'on se demande si elles pourront être organisées l'an prochain.

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