Question de M. SUEUR Jean-Pierre (Loiret - SOC) publiée le 19/10/2006

M. Jean-Pierre Sueur attire l'attention de M. le garde des sceaux, ministre de la justice, sur les inquiétudes suscitées au sein des organisations syndicales de salariés par un projet de décret d'application de l'article 29 du projet de loi pour le développement de la participation et de l'actionnariat salarié, prévoyant une forfaitisation du temps dont peuvent bénéficier les conseils prud'homaux salariés pour exercer leur activité juridictionnelle. Les représentants de ces organisations syndicales craignent que, si elle était mise en oeuvre, une telle disposition empêche les conseillers prud'homaux d'exercer la mission qui est la leur dans de bonnes conditions et porte atteinte au bon fonctionnement des juridictions prud'homales. Il lui demande en conséquence de bien vouloir lui confirmer que le Gouvernement n'entend pas mettre en oeuvre une telle forfaitisation.

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Réponse du Ministère de la justice publiée le 01/03/2007

Le garde des sceaux, ministre de la justice, fait connaître à l'honorable parlementaire que le régime juridique de l'indemnisation des conseillers prud'hommes reposait sur des textes anciens dont l'interprétation a conduit à des pratiques hétérogènes sur l'ensemble du territoire et à une évolution des dépenses difficilement maîtrisable. Dans le même temps, la réforme budgétaire issue de la loi organique du 1er août 2001, dite LOLF, oblige à définir le montant de la dépense annuelle de façon limitative et non plus évaluative. Plusieurs missions ont abordé les difficultés soulevées par le régime actuellement applicable à l'indemnisation des conseillers prud'hommes. Ainsi le procureur général honoraire Henri Desclaux dans un rapport du 5 octobre 2005 a mis en exergue des durées moyennes résultant de rencontres et d'échanges avec toutes les parties prenantes à l'activité des conseils de prud'hommes. Dans le prolongement de ce rapport, qui a été bien accueilli par les organisations syndicales, les dispositions législatives correspondantes, qui avaient été insérées dans la loi relative au développement de la participation et de l'actionnariat salarié, ont été promulguées le 31 décembre dernier après la reconnaissance de leur validité par le conseil constitutionnel. Il appartient maintenant au Gouvernement de prendre les modalités d'applications de ces dispositions. Deux projets de décrets, l'un en conseil d'Etat et l'autre simple, ont été rédigés et soumis à la concertation. Ils prévoient un système d'indemnisation reposant sur l'activité réelle des conseillers en matière de temps de rédaction des décisions. Le projet de décret qui s'est appuyé sur le rapport précité pour déterminer les durées moyennes de rédaction des décisions rendues par les conseillers prud'hommes (trente minutes pour un procès-verbal, une heure pour une ordonnance et trois heures pour un jugement) précise néanmoins qu'un dépassement de ces durées est possible lorsque la complexité du dossier, le nombre de parties à l'audience et la multiplicité des chefs de demande le justifient. Ainsi, il a été tenu compte des observations formulées par les partenaires sociaux à l'occasion du Conseil supérieur de la prud'homie du 5 mai 2006, et le caractère « exceptionnel » des dépassements a été supprimé. Sauf à ne pas résoudre les difficultés mises en évidence par le rapport Desclaux, le projet de décret privilégie la seule solution juridiquement incontestable qui est de confier à la formation de jugement la détermination du temps de rédaction lorsque les temps communément nécessaires sont insuffisants. Dès lors, deux modes d'indemnisation se superposent selon le temps de rédaction nécessaire : un mode déclaratif reposant sur le seul conseiller rédacteur jusqu'à un certain seuil ; un mode délibératif reposant sur la formation de jugement au-delà de ce seuil. Par ailleurs, outre la question des durées de rédaction, les projets de textes réglementaires permettent l'indemnisation d'un plus grand nombre d'activités, autorisent la rédaction des décisions à l'extérieur des conseils de prud'hommes, augmentent de 15 % le taux de vacation et améliorent la prise en charge des frais de déplacements. Cependant, malgré la concertation qui a eu lieu et les importantes modifications qui en ont résulté, ces textes d'application suscitent encore des réactions d'incompréhension et de doute, en particulier sur la capacité des formations de jugement à s'entendre pour autoriser les dépassements justifiés par la complexité de certaines affaires. Aussi, les deux ministres concernés se sont accordés pour demander au directeur général du travail et au directeur des services judiciaires de poursuivre la réflexion avec le Conseil supérieur de la prud'homie et proposer des solutions pour que la réforme soit effective rapidement.

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