Question de M. SIDO Bruno (Haute-Marne - UMP) publiée le 02/11/2006

M. Bruno Sido appelle l'attention de M. le ministre de l'agriculture et de la pêche sur l'évolution de l'épidémie de fièvre catarrhale et l'impact économique des restrictions engendrées par cette nouvelle crise sanitaire. La profession s'inquiète des proportions préoccupantes pour un certain nombre d'éleveurs qui ne peuvent plus vendre les animaux vivants en dehors de la zone réglementée. Conscient de la nécessité de maîtriser cette nouvelle épidémie, il lui demande d'accroître et d'assouplir les dérogations pour les mouvements d'animaux et de lui préciser les mesures financières envisagées par le Gouvernement pour prendre en compte les pertes des éleveurs se trouvant dans cette zone réglementée.

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Réponse du Ministère délégué à l'aménagement du territoire publiée le 20/12/2006

Réponse apportée en séance publique le 19/12/2006

M. le président. La parole est à M. Rémy Pointereau, en remplacement de M. Bruno Sido, auteur de la question n° 1162, adressée à M. le ministre de l'agriculture et de la pêche.

M. Rémy Pointereau, en remplacement de M. Bruno Sido. Monsieur le ministre, M. Sido, retenu dans son département, vous prie de bien vouloir l'excuser et m'a chargé de vous transmettre les éléments suivants.

L'épidémie de fièvre catarrhale ovine et bovine touche dix-sept départements du nord-est de la France, dont le département de la Haute-Marne. Avec cette nouvelle crise sanitaire, les éleveurs de ces départements ont fait office de « boucliers sanitaires » afin de protéger l'ensemble de l'élevage français, conformément aux directives européennes.

Pour répondre au plus vite aux inquiétudes de la profession, le Gouvernement, dès le 2 octobre, a mis en oeuvre un premier dispositif d'aide au maintien des veaux et des broutards dans le périmètre de protection en dégageant une enveloppe exceptionnelle de 1,5 million d'euros.

Toutefois, la complexité de ce dispositif, l'exclusion de certains animaux, dont les bovins reproducteurs, les ovins et les caprins ont limité l'impact de cette mesure chez les éleveurs touchés par cette crise. J'en veux pour preuve que, sur les 1 000 éleveurs haut-marnais situés dans la zone réglementée, 55 dossiers ont été déposés à ce jour !

Le 10 novembre, de nouvelles mesures ont été annoncées par le Gouvernement à destination des agriculteurs en difficulté. Un fonds d'allégement de charges de 1 million d'euros a été mis en place. Néanmoins, cette aide exige un taux de spécialisation de 50 %, taux bien trop élevé et mal adapté à l'agriculture haut-marnaise située en « zone intermédiaire », porteuse des spécificités de polyculture-élevage que vous connaissez bien.

Enfin, le 7 décembre, à Sarreguemines, M. le ministre de l'agriculture et de la pêche a annoncé un plan d'indemnisation des éleveurs avec l'octroi d'une nouvelle enveloppe de 7,5 millions d'euros, ces mesures venant en complément des mesures précédemment annoncées. Une nouvelle fois, certains animaux, comme les bovins reproducteurs et les ovins, semblent être exclus de cette mesure. Cette filière ovine et ses coopératives spécialisées sont depuis longtemps marginalisées dans cette crise, et M. Sido avait appelé l'attention de M. le ministre de l'agriculture et de la pêche sur ce point dès le 13 novembre.

Si les mesures annoncées depuis le début de la crise sont certes importantes, ce que la profession reconnaît très aisément, elles sont malheureusement ternies par leurs circulaires d'application qui compliquent ces différents dispositifs et les rendent trop sélectifs.

M. le ministre de l'agriculture et de la pêche s'est, à de nombreuses reprises, engagé avec force et détermination en faveur de la simplification administrative. Sur le terrain, toutes les mesures annoncées ne sont pas comprises du fait de leur complexité.

À toute cette confusion administrative s'ajoute la difficulté liée à l'application du plafond de minimis de 3 000 euros par exploitation, qui risque en réalité de ruiner tout espoir d'indemnisation pour la quasi-totalité des élevages du département de la Haute-Marne, lourdement touché par la sécheresse de 2003.

Il faut souligner, de surcroît, la non-application de la transparence dans les groupements d'exploitation en commun, les GAEC, telle qu'elle a été inscrite dans la dernière loi d'orientation agricole et reconnue récemment par Bruxelles.

Aussi, et malgré cette série de mesures, de nombreuses inquiétudes subsistent pour l'avenir. La profession souhaite une méthode de compensation simple, rapide et équitable, fondée sur une aide forfaitaire pour les animaux dont la commercialisation a été pénalisée par rapport à la situation normale du reste du territoire. Les éleveurs touchés par cette crise veulent non pas une aumône, mais une indemnisation correcte et un plan d'action avec des échéances pour s'organiser et se projeter dans l'avenir.

Monsieur le ministre, cette situation sanitaire et épidémiologique française semble aujourd'hui maîtrisée. Face à toutes ces incertitudes et ces inquiétudes, la profession, qui espère retrouver au plus vite une situation normale, souhaiterait enfin connaître les prévisions et les règles sur le statut saisonnièrement indemne afin d'ouvrir une fenêtre de commercialisation avant l'été 2007.

Pouvez-vous, sur toutes ces questions, nous préciser les mesures administratives et financières envisagées par le Gouvernement pour prendre en compte les pertes des éleveurs se trouvant dans cette zone réglementée ?

M. le président. La parole est à M. le ministre délégué.

M. Christian Estrosi, ministre délégué à l'aménagement du territoire. Monsieur le sénateur, la confirmation des foyers français de fièvre catarrhale ovine, ou FCO, a conduit le Gouvernement à mettre en place des zones réglementées et des mesures sanitaires pour les cheptels infectés. Des zones de protection et de surveillance ont également été mises en place. La situation sanitaire relative à la fièvre catarrhale ovine est stable en France, avec six foyers. La période hivernale, notamment la baisse des températures, permet de réduire les risques de transmission de la maladie.

L'action du Gouvernement a toujours consisté à faciliter l'activité économique locale tout en maintenant un haut niveau de protection pour éviter la diffusion de la maladie à de nouvelles régions d'élevage.

Compte tenu des avis scientifiques et du droit communautaire, le ministre de l'agriculture et de la pêche a décidé de permettre plus largement l'abattage d'animaux hors des zones réglementées, et élargi progressivement le champ des dérogations aux interdictions de mouvements des animaux. Sont ainsi possibles, sous certaines conditions, la sortie des périmètres interdits vers la zone de protection ainsi que les passages de la zone de protection vers la zone de surveillance, avec des protocoles variant suivant les types d'animaux et leur utilisation.

L'adaptation des mesures sanitaires se poursuit. L'inactivité vectorielle constatée ces derniers jours sur le terrain par des piégeages d'insectes permet désormais de fusionner les zones de protection et de surveillance en une zone réglementée unique, redéfinie sur la base des cantons au lieu des arrondissements. Cela permet de libérer de toute contrainte environ quatre-vingt-quinze cantons.

Il est possible aussi, pour plus de lisibilité dans les mesures sanitaires, d'indiquer dès à présent que la sortie des animaux vers le reste du territoire national pourra se faire sous conditions dès le 15 janvier 2007, après un dépistage favorable, et, dès le 15 février 2007, sans test préalable.

Les protocoles de dérogation aux mouvements des animaux seront bien sûr simplifiés pendant la période hivernale du fait de l'absence des insectes vecteurs de la maladie. Les mesures sanitaires seront réexaminées au printemps en fonction de la reprise de l'activité de ces insectes et de la situation épidémiologique au regard de cette maladie.

Sur le plan économique, les difficultés de commercialisation des viandes bovines et ovines provenant des zones réglementées créent une baisse de prix des animaux maigres, en particulier du broutard, par rapport aux autres régions.

Comme l'a rappelé M. le Premier ministre le 10 novembre dernier en Haute-Saône, le Gouvernement sera aux côtés des éleveurs dans cette crise sanitaire. Les éleveurs, tout particulièrement les éleveurs naisseurs des périmètres interdits - dans les Ardennes, l'Aisne, la Meuse et le Nord -, ont subi des pertes en raison de la baisse des cours de veaux de huit jours et de broutards. Les commerçants en bestiaux ont une activité réduite.

Les organisations de producteurs, les abattoirs et les entreprises de sélection en génétique subissent aussi des perturbations importantes. Un premier dispositif d'aide au maintien des veaux et des broutards dans le périmètre de protection a été mis en oeuvre dès le 2 octobre, dans le cadre d'une enveloppe de 1,5 million d'euros.

Ce premier dispositif constitue une indemnisation des pertes pour les éleveurs ayant conservé leurs animaux sur l'exploitation. Les éleveurs peuvent déposer une demande d'aide dans le cadre de ce premier dispositif jusqu'au 31 décembre prochain. Le Gouvernement a décidé de compléter ce dispositif par des mesures immédiates de soutien en trésorerie.

Des reports et des prises en charge tant des cotisations de la Mutualité sociale agricole que des intérêts bancaires sont mis en place pour les éleveurs en difficulté dans les dix-sept départements réglementés.

Les coûts d'analyses, de visites vétérinaires et de tests pour les mouvements des animaux provenant des périmètres interdits, prévus dans le cadre des dérogations, seront pris en charge. Ils concernent notamment les béliers reproducteurs. Les coûts de chômage partiel seront pris en compte à 80 % pour les entreprises du secteur.

Enfin, M. le ministre de l'agriculture et de la pêche a annoncé le 7 décembre dernier, lors d'un déplacement à Sarreguemines, en Moselle, que les éleveurs des zones réglementées pourront prétendre à une indemnisation des pertes de chiffre d'affaires constatées entre le ler septembre et le 30 novembre 2006 pour les veaux de huit jours, les broutards, les broutardes et les animaux de race allaitante.

Ce soutien spécifique aux éleveurs sera plafonné à 3 000 euros dans le cadre du régime de minimis. Il tiendra compte du nombre d'animaux vendus par l'exploitant au cours de cette période passée. Une enveloppe de 7,5 millions d'euros sera réservée à cette action. Conscient que le plafond du régime de minimis n'offre pas de solutions satisfaisantes pour permettre l'indemnisation directe des pertes des éleveurs, le ministre de l'agriculture et de la pêche a adressé un mémorandum à la Commission européenne pour permettre la mise en place de mesures exceptionnelles.

Ces dispositions témoignent de la ferme volonté du Gouvernement d'accompagner les différents maillons des filières bovines et ovines dans leurs difficultés actuelles.

M. le président. Monsieur Pointereau, le sénateur issu du bitume que je suis tressaille de joie en apprenant ces nouvelles, qui doivent vous satisfaire... (Sourires.)

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