Question de Mme DINI Muguette (Rhône - UC-UDF) publiée le 15/12/2006

Question posée en séance publique le 14/12/2006

Mme Muguette Dini. Ma question s'adresse à M. le ministre des affaires étrangères.

Monsieur le président, monsieur le ministre, mes chers collègues, le président iranien Mahmoud Ahmadinejad vient d'organiser à Téhéran une conférence pseudo scientifique sur l'Holocauste, visant à contester la réalité historique de la Shoah.

Depuis son arrivée au pouvoir en Iran, le président a été un vecteur de la résurgence de thèses négationnistes, qui sont inacceptables.

Je suis chargée depuis dix ans, par le président du conseil général du Rhône, d'organiser et d'accompagner chaque année un voyage à Auschwitz pour 150 collégiens, auquel participent sept rescapés de ce camp, tous déportés à l'adolescence.

La négation de la Shoah est absolument intolérable...

M. le président. C'est scandaleux !

Mme Muguette Dini. ...et nous condamnons ces thèses nauséabondes avec la plus grande fermeté.

Le président iranien lie directement la légitimité d'Israël à l'existence de la Shoah. En d'autres termes, prouver que la Shoah est un mensonge collectif reviendrait à remettre en cause les droits incontestables et incontestés de l'existence de l'État d'Israël que le président iranien souhaite voir « rayé de la carte ».

Comment discuter avec un chef d'État capable de prononcer et de répandre des thèses aussi haineuses et dangereuses pour la paix dans le monde ?

Dans ces conditions, comment pouvons-nous encore transiger sur la question du nucléaire avec un tel régime ? Nous ne pouvons plus nous contenter de déclarations d'intentions et d'incantations. Les marges de manoeuvre sont faibles, nous le savons. En effet, entre un programme nucléaire civil, autorisé par le traité de non-prolifération, et son utilisation à des fins militaires, il n'y a qu'un pas.

Dans ce contexte, ma question sera double.

D'une part, comment le Gouvernement envisage-t-il de réagir face à l'organisation du colloque de Téhéran et aux thèses qui y ont été soutenues, notamment par M. Faurisson ?

D'autre part, quelle sera l'attitude de la France et de ses partenaires à l'égard de l'Iran, concernant les risques de prolifération nucléaire dans la région qui mettent en péril les espoirs d'un rétablissement prochain de la paix au Moyen-Orient ? (Applaudissements sur les travées de l'UC-UDF et de l'UMP, ainsi que sur certaines travées du RDSE et du groupe socialiste.)

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Réponse du Ministère délégué aux relations avec le Parlement publiée le 15/12/2006

Réponse apportée en séance publique le 14/12/2006

M. Henri Cuq, ministre délégué aux relations avec le Parlement. Madame la sénatrice, au nom du Gouvernement, je tiens à dire une nouvelle fois que cette conférence sur l'Holocauste n'est pas acceptable et qu'elle doit être condamnée. Elle est d'autant plus intolérable qu'elle exprime le refus du génocide du peuple juif. Au-delà de cette attitude blâmable, nous avons également entendu le président iranien contester l'existence même et la légitimité de l'État d'Israël, créé en 1948 sous l'égide des Nations unies et dont il est un membre plein et entier.

Mesdames, messieurs les sénateurs, cette conférence est inacceptable sur les plans historique, moral et politique.

Aucun individu, aucun pays ne saurait nier ou simplement relativiser le génocide subi par le peuple juif, l'Iran pas plus qu'un autre.

Mme Nicole Borvo Cohen-Seat. Et un universitaire français ?

M. Henri Cuq, ministre délégué. L'an dernier, l'assemblée générale des Nations unies a adopté à l'unanimité une résolution rejetant « tout déni de l'historicité de l'Holocauste, total ou partiel ». La tenue d'une telle conférence est donc contraire aux décisions de cet organisme.

Dans ce contexte chargé, la France, plus que jamais, condamne l'Iran, qui n'aurait jamais dû organiser une telle conférence !

Pour avoir proféré des thèses négationnistes, M. Faurisson a été poursuivi par la justice française et radié de l'université. Nous étudions toutes les voies de droit qui nous permettraient de le poursuivre pour les propos qu'il tiendrait ou aurait tenus à l'étranger sur l'Holocauste.

M. le président. Il y a intérêt !

M. Henri Cuq, ministre délégué. S'agissant du dossier nucléaire iranien, notre objectif est d'amener l'Iran à se conformer à ses engagements, dans le cadre du traité de non- prolifération, ainsi qu'aux demandes du Conseil de sécurité, à savoir la suspension de l'enrichissement d'uranium.

Nous avons, avec les Britanniques et les Allemands, préparé une nouvelle version de notre projet de résolution devant le Conseil de sécurité ; il est, actuellement, en discussion à New York.

Ce texte prévoit des sanctions contre les activités nucléaires les plus sensibles de l'Iran et son programme de missiles - qui nous préoccupent -, car nous voulons qu'ils ne puissent pas bénéficier de soutiens extérieurs. Il envisage également de renforcer l'autorité de l'Agence internationale de l'énergie atomique, l'AIEA, dans son travail de vérification.

Nous souhaitons parvenir au plus large accord possible au sein du Conseil de sécurité. L'efficacité des sanctions dépend de la capacité de la communauté internationale à faire preuve d'unité. Ce soutien confirmera à l'Iran son isolement.

Les sanctions seront proportionnelles et réversibles. Le dialogue pourra reprendre si l'Iran se conforme aux demandes qui lui sont adressées.

Madame la sénatrice, la discussion du projet de résolution est en cours à New York, comme je vous l'ai dit. Il s'agit d'un bon texte qui, je l'espère, recueillera l'accord de tous. (Applaudissements sur les travées de l'UMP et de l'UC-UDF, ainsi que sur certaines travées du RDSE et du groupe socialiste.)

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