Question de M. NOGRIX Philippe (Ille-et-Vilaine - UC-UDF) publiée le 26/01/2007

Question posée en séance publique le 25/01/2007

M. Philippe Nogrix. Ma question s'adresse à M. le ministre délégué à l'emploi, au travail et à l'insertion professionnelle des jeunes.

Monsieur le ministre délégué, les aides publiques aux entreprises ont fait, au cours de ces derniers mois, l'objet d'une littérature aussi abondante qu'inspirée.

Ainsi, l'an passé, le rapport du Conseil d'orientation pour l'emploi constatait déjà l'absence de gouvernance d'ensemble et confirmait par ses chiffres et ses analyses ce que les destinataires des dispositifs pouvaient déjà constater par eux-mêmes : faiblesse des évaluations, opacité, technicité, poids de la procédure...

À titre d'exemple, je mentionnerai toute la difficulté pour une entreprise, aujourd'hui, de prouver qu'elle remplit bien les critères d'éligibilité à un statut comme celui de « jeune entreprise innovante ».

La presse d'hier a rendu compte de l'étude réalisée à la demande du Premier ministre. Les diagnostics chiffrés sont à l'avenant : les aides publiques aux entreprises, toutes origines cumulées - État, collectivités locales, Union européenne - ont représenté, en 2005, 65 milliards d'euros.

M. Roland Muzeau. Ils n'ont en jamais assez !

M. Philippe Nogrix. L'État y consacre, entre dépenses budgétaires, coups de pouce fiscaux et allégements de charges, pas moins de 57 milliards d'euros.

Ce n'est pas le montant qui nous pose problème. Les aides aux entreprises constituent autant de leviers qui relaient les priorités publiques en matière d'emploi, d'innovation, d'exportation, d'aménagement du territoire. Ce qui pose problème et suscite nos interrogations, c'est la cohérence, la lisibilité, l'efficacité et l'effectivité de ces aides.

L'étude en question ne recense pas moins de 6 000 dispositifs, sans gouvernance globale ni concertation, éparpillés, éclatés, selon les ministères ou les territoires.

Les « redondances » ou même les « contradictions » pointées par le rapport, de ce point de vue, n'étonneront personne. Sont, par exemple, recensés 120 dispositifs d'aide à la création d'entreprise.

Dans les faits, les auteurs soulignent que 10 % seulement de celles qui se créent en bénéficient. Il ne faut pas s'étonner, alors, que 80 % du montant total des aides soient de fait affectés aux grandes entreprises. Or, s'il est bien un objet à assigner à l'aide publique en ce domaine, c'est d'encourager et de promouvoir l'essor des PME, qui donnent au capitalisme son meilleur visage : création d'emplois, irrigation du territoire, responsabilité sociale...

Après les structures, les rapports, les études, il faut à présent agir. L'occasion vous en sera donnée, dès la prochaine conférence nationale des finances publiques, en créant, au sein du conseil d'orientation des finances publiques, un comité permanent pour la régulation et l'évaluation des aides aux entreprises, comme le préconise cette étude.

Au-delà, bien au-delà, comment comptez-vous faire, monsieur le ministre délégué, pour rationaliser le système actuel et le rendre plus lisible pour ses destinataires ? Quelle doit être l'articulation des rôles et des tâches entre une politique nationale et l'ensemble des niveaux de décision existants ? (Applaudissements sur les travées de l'UC-UDF.)

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Réponse du Ministère délégué à l'emploi, au travail et à l'insertion professionnelle des jeunes publiée le 26/01/2007

Réponse apportée en séance publique le 25/01/2007

M. Gérard Larcher, ministre délégué à l'emploi, au travail et à l'insertion professionnelle des jeunes. Monsieur Nogrix, le Premier ministre a souhaité, il y a quelques mois, savoir quel était le montant exact de l'aide publique apportée à l'emploi, à la recherche et à l'innovation ainsi qu'aux actions visant à renforcer l'attractivité du territoire.

M. Roland Muzeau. Et surtout la spéculation !

M. Gérard Larcher, ministre délégué. Sa préoccupation était notamment de connaître l'effet de ces aides publiques sur l'emploi mais également sur les petites et moyennes entreprises. Le Gouvernement a en effet le sentiment que, aujourd'hui, les petites et moyennes entreprises, qui créent l'essentiel de l'emploi dans notre pays, ne sont pas toujours les bénéficiaires de la dynamique suscitée par l'aide publique.

S'agissant de l'emploi, le Conseil d'orientation pour l'emploi a souligné, dans son rapport, que beaucoup d'exonérations sur les bas salaires sont les conséquences de la loi sur les 35 heures et qu'elles ont pour objet de préserver la compétitivité de nos entreprises, qu'elles résultent également de la convergence des SMIC, qui eux-mêmes sont la conséquence des 35 heures. Le Conseil d'orientation pour l'emploi conclut que, si ces aides venaient à disparaître, 800 000 emplois seraient alors menacés.

S'agissant du deuxième sujet majeur, celui de la compétitivité, de l'investissement dans la recherche et dans l'innovation, afin de relever le défi de la globalisation, ont été mis en place des pôles de compétitivité, l'Agence de l'innovation industrielle, le crédit d'impôt recherche, autant de dispositifs qui répondent à des nécessités et qui sont à la croisée de financements publics et de financements privés.

Le troisième sujet est l'attractivité du territoire, rural mais aussi urbain, dont tient compte la politique des zones franches urbaines, qui a notamment été évaluée dans le rapport de votre collègue sénateur Pierre André.

Telles sont les orientations qui guident notre politique.

Nous avons la volonté d'y voir clair, afin que, lors de la conférence des finances publiques qui se tiendra à la mi-février et qui sera ciblée naturellement sur l'emploi et sur l'innovation, l'accent puisse être mis sur l'aide aux petites et moyennes entreprises de ce pays. Voilà les objectifs du Gouvernement. (Très bien ! et applaudissements sur les travées de l'UMP et de l'UC-UDF, ainsi que sur certaines travées du RDSE.)

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