Question de M. SUTOUR Simon (Gard - SOC) publiée le 18/01/2007

M. Simon Sutour attire l'attention de M. le ministre de l'économie, des finances et de l'industrie sur la volonté du Gouvernement de libéraliser le régime d'assurance des catastrophes naturelles.

Le but du projet est « d'accentuer la concurrence entre opérateurs privés » et que le texte « permette d'accélérer le remboursement en cas de catastrophe naturelle et de revoir les zones géographiques ». Ces intentions sont louables, mais la libéralisation du régime d'assurance des catastrophes naturelles sera bénéfique, si et seulement si, in fine, le montant des indemnisations est à la hauteur pour compenser la détresse que rencontre les particuliers et les collectivités. Dans le cas contraire, il n'y aurait qu'un seul bénéficiaire : les compagnies d'assurances. Tel n'est certainement pas le sens de la proposition.

Par ailleurs, si l'État continuait d'accorder sa garantie financière avec le réassureur public, la Caisse centrale de réassurance, serait alors proposée « la possibilité de moduler le taux de prime additionnelle de la garantie catastrophe naturelle en fonction de l'exposition des biens assurés aux périls naturels au lieu d'être fixé à 12% uniformément ». Encore une fois, la proposition peut paraître intéressante, mais ne serait-ce pas remettre en cause le principe de solidarité ? De plus, il ne faudrait pas que le principe de modulation permette d'aller au-delà du plafond de 12 % actuel.

Enfin, le Journal officiel ne serait plus chargé de diffuser les arrêtés de catastrophe naturelle. Ce serait aux compagnies d'assurance de constater les catastrophes naturelles « sur la base de données scientifiques fournies par des organismes publics ». Dans ce cas-là, les compagnies auraient-elles intérêt à déclarer « l'état de catastrophe naturelle » ? On peut en douter ?

C'est pourquoi, il lui demande de bien vouloir l'informer des avancées de sa réflexion afin de lever les interrogations qui se posent.

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Réponse du Ministère délégué au commerce extérieur publiée le 31/01/2007

Réponse apportée en séance publique le 30/01/2007

M. le président. La parole est à M. Simon Sutour, auteur de la question n° 1222, adressée à M. le ministre de l'économie, des finances et de l'industrie.

M. Simon Sutour. Monsieur le ministre, comme vous le savez, le Gard fait partie des départements soumis à plusieurs risques majeurs dont les risques technologiques, le risque nucléaire en particulier, et la sécheresse.

Toutefois, le plus marquant d'entre eux, qui a malheureusement et tristement ému tous les esprits, est bien le risque d'inondation sous toutes ses formes.

Vous envisagez « d'accentuer la concurrence entre opérateurs privés » et de « permettre d'accélérer le remboursement en cas de catastrophe naturelle et de revoir les zones géographiques » ; la presse s'est d'ailleurs fait l'écho de vos déclarations à ce sujet.

Si ces intentions sont louables, il reste que la libéralisation du régime d'assurance des catastrophes naturelles ne sera bénéfique que si, in fine, le montant des indemnisations est à la hauteur pour compenser la détresse dans laquelle se trouvent les particuliers et les collectivités. Dans le cas contraire, il n'y aurait qu'un seul bénéficiaire : les compagnies d'assurance. Or tel n'est pas, j'en suis sûr, le sens de votre proposition.

Par ailleurs, si l'État continuait d'accorder sa garantie financière, avec le réassureur public, c'est-à-dire la Caisse centrale de réassurance, vous proposeriez « la possibilité de moduler le taux de prime additionnelle de la garantie catastrophe naturelle en fonction de l'exposition des biens assurés aux périls naturels au lieu d'être fixé à 12 % uniformément ». Encore une fois, cette proposition peut paraître intéressante, mais ne remettrait-elle pas en cause le principe de solidarité ? De plus, il ne faudrait pas que la modulation permette d'aller au-delà du plafond de 12 % actuel.

Enfin, le Journal officiel ne serait plus chargé de diffuser les arrêtés de catastrophe naturelle. Il reviendrait aux compagnies d'assurance de constater ces événements « sur la base de données scientifiques fournies par des organismes publics ». Toutefois, dans ce cas, les compagnies auraient-elles intérêt à déclarer « l'état de catastrophe naturelle » ? Nous pouvons en douter.

Vous le voyez, madame le ministre, bien des questions se posent quant à la mise en oeuvre de la libéralisation que vous souhaitez. Pouvez-vous nous informer de l'avancée de votre réflexion et des échéances que vous souhaitez respecter à cet égard ?

M. le président. La parole est à Mme la ministre déléguée.

Mme Christine Lagarde, ministre déléguée au commerce extérieur. Monsieur Sutour, vous interrogez Thierry Breton sur le projet de réforme du régime de couverture des catastrophes naturelles. Vous me permettrez de me substituer à lui et de vous présenter ses excuses, puisqu'il n'a pu venir ce matin au Sénat pour vous répondre.

Le régime des catastrophes naturelles assure depuis plus de vingt ans la protection des biens contre les dégâts causés par les phénomènes exceptionnels, et je sais, pour m'y rendre occasionnellement en été, que le département du Gard n'est, hélas ! pas à l'abri de ce genre d'événements, et en particulier des inondations.

Or le retour d'expérience du fonctionnement de ce régime a conduit le Gouvernement à envisager certains aménagements du dispositif. En effet, une mission d'inspection interministérielle, mandatée par le Gouvernement, a mis en évidence un certain nombre d'insuffisances ou de dysfonctionnements ; j'en évoquerai cinq.

Premièrement, il s'agit d'un système qui manque de transparence, les assurés comme les élus s'interrogeant sur les modalités d'éligibilité de tel ou tel sinistre au régime des catastrophes naturelles.

Deuxièmement, les décisions d'accorder ou non une indemnisation, en particulier lorsque deux communes contiguës ne reçoivent pas le même traitement, sont parfois perçues comme inéquitables par les assurés et les élus.

Troisièmement, ce système reste assez complexe dans son organisation et induit bien souvent de longs délais d'indemnisation, qui ne sont pas favorables aux assurés victimes de sinistres.

Quatrièmement, lorsque les conditions de reconnaissance ne sont pas réunies, s'agissant, par exemple, de sinistres de faible ampleur, les victimes ne disposent d'aucune autre solution pour se couvrir.

Enfin, cinquièmement, ce système entraîne parfois une déresponsabilisation face à la nécessaire prévention des risques naturels.

Le projet de réforme envisagé par le Gouvernement vise à pallier ces inconvénients en améliorant le dispositif.

Parmi ces améliorations, notre objectif principal est clairement de faire en sorte que les assurés puissent bénéficier de l'indemnisation la plus rapide, dès lors que le sinistre est avéré.

Ainsi, dans ce qui n'est aujourd'hui qu'un projet, les victimes pourraient, postérieurement à un dommage, connaître les modalités de leur indemnisation sans attendre la réunion d'une commission interministérielle et la parution d'un arrêté, lequel peut d'ailleurs, pour des raisons inhérentes au fonctionnement de l'administration, prendre souvent plus d'un mois. Ils pourraient s'adresser directement à leur assureur afin d'être indemnisés.

Bien entendu, toutes ces mesures s'inscriraient dans le cadre du principe de la solidarité nationale, j'y insiste, et l'État continuerait en toute hypothèse à accorder sa garantie financière au régime, via la Caisse centrale de réassurance. Il n'est pas question que l'État soit absent du processus d'indemnisation des catastrophes naturelles : bien au contraire, il interviendra par la voie d'une garantie financière.

Conjointement avec Nicolas Sarkozy, ministre d'État, ministre de l'intérieur et de l'aménagement du territoire, nous avons engagé une consultation sur ce projet. Nous l'avons confiée à M. Emmanuel Constans, président du comité consultatif du secteur financier, qui recevra l'appui des services du ministre de l'économie et des finances et du ministère de l'intérieur.

Le Gouvernement a bien noté que de nombreuses parties prenantes, dont les associations d'élus, souhaitaient que des consultations approfondies soient organisées sur certains aspects ; il veillera à ce que ce soit le cas.

Il proposera donc prochainement une méthode pour prolonger la concertation, afin qu'au cours de la prochaine législature - car il n'est pas possible de modifier le régime dès à présent - le Parlement puisse se saisir des dispositions législatives nécessaires afin d'améliorer le système.

M. le président. La parole est à M. Simon Sutour.

M. Simon Sutour. Madame la ministre, je vous remercie de votre réponse.

Je crois que nous pouvons tous nous accorder sur le constat : l'indemnisation des particuliers prend parfois beaucoup de temps.

S'agissant des solutions à apporter, il faut réfléchir aux propositions qui seront formulées. Je note d'ailleurs que, par rapport aux propos de M. le ministre, évoqués notamment dans la presse économique, votre réponse est plus prudente, madame la ministre. Je m'en réjouis, car nous sommes encore dans une phase de consultation. Nous disposerons bientôt d'une méthode nous permettant de résoudre les problèmes qui, à l'évidence, se posent en ce domaine et, lors de la prochaine législature, le Parlement aura à se prononcer.

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