Question de M. TESTON Michel (Ardèche - SOC) publiée le 23/08/2007

M. Michel Teston appelle l'attention de M. le ministre de l'éducation nationale sur la question relative à l'accueil des enfants de deux ans, particulièrement dans les écoles situées en zone de montagne.

Selon l'article L. 113-1 du code de l'éducation (loi n° 2005-380 du 23 avril 2005), « les classes enfantines ou les écoles maternelles sont ouvertes, en milieu rural comme en milieu urbain, aux enfants qui n'ont pas atteint l'âge de la scolarité obligatoire. Tout enfant doit pouvoir être accueilli, à l'âge de trois ans, dans une école maternelle ou une classe enfantine le plus près possible de son domicile, si sa famille en fait la demande. L'accueil des enfants de deux ans est étendu en priorité dans les écoles situées dans un environnement social défavorisé, que ce soit dans les zones urbaines, rurales, ou de montagne et dans les régions d'outre-mer ».

En application de ces dispositions, les écoles situées en zone d'éducation prioritaire, en secteur rural fragile et notamment en zone de montagne, peuvent accueillir tous les enfants de deux ans.

Or, tel n'est pas le cas pour au moins deux raisons principales. D'une part, l'article D. 113-1 du code de l'éducation est plus restrictif que l'article L. 113-1 puisqu'il stipule que « les enfants qui ont atteint l'âge de deux ans au jour de la rentrée scolaire peuvent être admis dans les écoles et les classes maternelles dans la limite des places disponibles ». Ainsi, les dispositions de nature réglementaire ne sont pas conformes aux dispositions de nature législative.

En outre, de nombreuses écoles, situées notamment en zone de montagne, ne peuvent accueillir les enfants de deux ans faute de moyens suffisants affectés par l'État. Cette situation crée des disparités de traitement entre les communes concernées.

Aussi, il souhaite connaître les mesures qu'il compte prendre pour une stricte et juste application des dispositions de l'article L. 113-1 du code de l'éducation.








- page 1437


Réponse du Ministère de l'éducation nationale publiée le 07/11/2007

Réponse apportée en séance publique le 06/11/2007

Mme la présidente. La parole est à M. Michel Teston, auteur de la question n° 25, adressée à M. le ministre de l'éducation nationale.

M. Michel Teston. Monsieur le ministre, ma question porte sur l'accueil des enfants de deux ans, particulièrement dans les écoles situées en zone de montagne.

Permettez-moi de vous donner lecture de l'article L. 113-1 du code de l'éducation, qui a été introduit par la loi du 23 avril 2005 d'orientation et de programme pour l'avenir de l'école : « Les classes enfantines ou les écoles maternelles sont ouvertes, en milieu rural comme en milieu urbain, aux enfants qui n'ont pas atteint l'âge de la scolarité obligatoire.

« Tout enfant doit pouvoir être accueilli, à l'âge de trois ans, dans une école maternelle ou une classe enfantine le plus près possible de son domicile, si sa famille en fait la demande.

« L'accueil des enfants de deux ans est étendu en priorité dans les écoles situées dans un environnement social défavorisé, que ce soit dans les zones urbaines, rurales ou de montagne et dans les régions d'outre-mer. »

En application de ces dispositions, les écoles situées en zone d'éducation prioritaire en secteur rural fragile, notamment en zone de montagne, peuvent accueillir tous les enfants de deux ans.

Or tel n'est pas le cas en réalité, notamment du fait de l'insuffisance du nombre de personnels enseignants affectés par l'État. Cette situation crée des disparités de traitement entre les communes concernées.

Aussi, je souhaite connaître les mesures que le Gouvernement compte prendre pour permettre une stricte et juste application des dispositions de l'article L. 113-1 du code de l'éducation.

Mme la présidente. La parole est à M. le ministre.

M. Xavier Darcos, ministre de l'éducation nationale. Monsieur le sénateur, nous connaissons bien ce sujet vous et moi et ma réponse ne vous surprendra guère.

D'abord, je rappellerai que la loi d'orientation et de programme pour l'avenir de l'école du 23 avril 2005 a simplement complété, sans le modifier, l'article L. 113-1 du code de l'éducation, introduit par la loi du 11 juillet 1975, puis modifié par la loi du 10 juillet 1989, l'accueil des enfants âgés de deux ans ayant été étendu aux régions d'outre-mer, ce que les précédentes versions de l'article ne prévoyaient pas.

Loin d'être en contradiction avec la loi de 2005, le décret vient préciser son cadre d'application : la scolarisation des enfants âgés de deux ans est subordonnée non seulement aux capacités d'accueil des classes de maternelle - vous l'avez mentionné, monsieur le sénateur -, mais aussi à certaines priorités, je pense en particulier aux quartiers sensibles. Ainsi, les enfants âgés de deux ans le jour de la rentrée scolaire peuvent être admis à l'école maternelle dans la limite des places disponibles, les enfants de trois ans étant scolarisés en priorité - ils le sont tous, d'ailleurs.

Toutefois, les solutions d'accueil pour les enfants de moins de trois ans ne peuvent consister uniquement en une scolarisation dans les formes traditionnelles. Répondre favorablement à votre demande, c'est-à-dire décider d'accueillir tous les enfants de deux ans et partout sur le territoire, obligerait d'ailleurs à revoir la loi elle-même, monsieur le sénateur.

À dire vrai, mon sentiment sur ce sujet a évolué au cours de ma carrière et s'est fixé petit à petit. Je partage les conclusions du rapport remis en 2003 par la Défenseure des enfants, intitulé L'École, outil de la liberté : elles ne démontrent pas que la scolarisation précoce constitue, dans toutes les situations, un avantage notable par rapport à d'autres modes d'accueil. De même, dans l'enquête Information et vie quotidienne publiée par l'INSEE au mois de septembre 2007, on peut lire que 56 % des adultes de la région Nord - Pas-de-Calais sont entrés à l'école avant trois ans, contre 47 % pour la moyenne nationale. Or c'est dans cette région que les difficultés de maîtrise de l'écrit à l'âge adulte sont les plus importantes.

De même, si une évaluation à l'entrée au cours préparatoire a mis en évidence des effets très légèrement positifs de la fréquentation de l'école avant l'âge de trois ans, ceux-ci concernent non pas les élèves de zone rurale - ceux auxquels vous pensez en tant que sénateur de l'Ardèche - mais seulement ceux qui sont scolarisés en zone d'éducation prioritaire.

Au reste, tous les enfants de deux ans ne sont pas prêts à profiter d'une scolarisation précoce : ils ne savent pas leur nom, ils ne sont pas propres. Je n'insiste pas, car vous connaissez bien ces difficultés, monsieur le sénateur. En outre, les écoles ne sont pas toutes à même de recevoir ces enfants dans les conditions qui permettent de répondre à leurs besoins, qu'il s'agisse de la qualité des locaux et du matériel ou de la présence dans les écoles maternelles d'agents territoriaux spécialisés en nombre suffisant.

Pour toutes ces raisons, on ne saurait considérer la scolarisation des enfants âgés de deux ans comme une obligation pour le système éducatif. Ni la loi ni le décret ne posent cette scolarisation comme un droit, ils l'envisagent seulement comme une possibilité.

S'agissant plus spécifiquement des milieux ruraux, il appartient aux autorités académiques de procéder à des mesures d'aménagement du réseau des écoles à partir de critères objectifs soumis à l'avis des instances de concertation. Les seuils d'ouverture et de fermeture de classes, qui découlent de cette procédure, permettent de déterminer avec précision les ajustements requis tout en intégrant la nécessité de préserver le réseau public d'éducation en milieu rural, comme vous l'avez très justement signalé, monsieur le sénateur.

Mme la présidente. La parole est à M. Michel Teston.

M. Michel Teston. Monsieur le ministre, vous considérez que la scolarisation précoce des enfants ne constitue pas « un avantage notable par rapport à d'autres modes d'accueil ».

Cette prise de position appelle de ma part la remarque suivante. Notre nation n'a pas instauré un service public de la petite enfance, laissant ainsi aux communes et aux associations qui le peuvent le soin de créer des crèches et des garderies. Dans l'attente de la mise en place d'un tel service public, il me semble que la scolarisation précoce est, malgré tout, la moins mauvaise des solutions.

Le contexte général, notamment budgétaire - et non pas directement votre réponse, monsieur le ministre - m'inspire une autre réflexion. En raison du nombre insuffisant d'enseignants affectés par l'éducation nationale, les dispositions de l'article L. 113-1 du code de l'éducation nationale ne peuvent être mises en application de manière stricte et juste. La situation ne pourra que s'aggraver avec la suppression annoncée de 10 000 postes d'enseignant en 2008.

M. Xavier Darcos, ministre. Pas dans le primaire !

- page 4285

Page mise à jour le