Question de M. CAMBON Christian (Val-de-Marne - UMP) publiée le 04/10/2007

M. Christian Cambon attire l'attention de Mme la garde des sceaux, ministre de la justice sur les pratiques des officiers du ministère public (OMP) en matière de traitement des contestations relatives aux infractions au code de la route. Dans son rapport annuel d'activité de 2006, le Médiateur de la République a dénoncé « la pratique illégale suivie par les officiers du ministère public, qui consiste à statuer directement sur le bien-fondé des réclamations qui leur sont adressées, sans les soumettre à la juridiction compétente. ». Le Médiateur rappelle que l'OMP est un fonctionnaire de police et non pas un magistrat du siège. Il n'a donc pas qualité pour prononcer une sanction pénale, au risque de priver le contrevenant présumé du « droit au juge » garanti par l'article 6 de la Convention européenne des droits de l'homme. Interpellé par des parlementaires, le ministère de la justice a confirmé que l'OMP n'a pas le droit d' « apprécier lui-même la pertinence des motifs invoqués par le contrevenant dans sa réclamation pour la rejeter ». Il a par ailleurs reconnu que « certains officiers du ministère public s'arrogent le pouvoir d'apprécier la pertinence des motifs de contestation invoqués par le contrevenant pour rejeter cette contestation ». Une circulaire du ministère de la justice du 7 avril 2006 a clairement rappelé le droit en vigueur : « L'OMP ne dispose pas du pouvoir d'apprécier le caractère bien fondé ou non de la réclamation ou de la requête en exonération, son pouvoir d'appréciation se limitant à l'examen de la recevabilité formelle de la contestation. Lorsque les conditions de recevabilité sont remplies, la contestation doit être obligatoirement portée devant la juridiction de jugement à moins que l'OMP ne décide de renoncer aux poursuites ». La Cour de cassation a ainsi cassé un jugement ayant déclaré irrecevable une requête présentée sur le fondement de l'article 530-2 du code de procédure pénale (CPP) « alors que la réclamation n'avait pas été déclarée irrecevable en raison de l'absence de motivation ou du défaut d'accompagnement de l'avis correspondant à l'amende considérée et que, dès lors, l'officier du ministère public devait, en application de l'article R. 49-8 du CPP, informer le comptable du Trésor de l'annulation du titre exécutoire ». Cette même circulaire rappelle que la France a été condamnée à plusieurs reprises par la Cour européenne des droits de l'homme pour violation de la procédure par les OMP. En dépit de tous ces avertissements, il semble que de nombreux officiers de police continuent à réclamer au contrevenant la somme de l'amende après une contestation pourtant formellement recevable. Ils s'exposent ainsi eux-mêmes à des sanctions pénales, une telle attitude pouvant être qualifiée par les juridictions répressives d'abus d'autorité ou de délit de concussion, punis dans les deux cas de cinq ans d'emprisonnement et de 75 000 euros d'amende. De plus, ils ternissent l'image de la France qui pourrait être condamnée à nouveau par la Cour européenne des droits de l'homme. Il lui demande en conséquence quelles mesures elle entend prendre pour mettre un terme à ces pratiques illégales.

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Réponse du Ministère de la Justice publiée le 03/01/2008

La garde des sceaux, ministre de la justice, indique à l'honorable parlementaire les éléments de réponse suivants. Le rapport annuel d'activité du médiateur de la République de l'année 2006 dénonce des pratiques attribuées aux officiers du ministère public saisis de recours formés par des personnes faisant l'objet de la procédure de l'amende forfaitaire consistant à statuer directement sur le bien-fondé des réclamations qui leur sont adressées dans le cadre des infractions au code de la route sans les soumettre à la juridiction compétente. L'article 530-1 du code de procédure pénale fixe l'étendue des prérogatives des officiers du ministère public dans le traitement des contestations relatives aux contraventions au code de la route. Aux termes de cet article, l'officier du ministère public près le tribunal de proximité doit, lorsqu'il est saisi d'une requête en exonération ou d'une réclamation, soit renoncer à l'exercice des poursuites, soit saisir la juridiction de jugement, soit informer l'intéressé de l'irrecevabilité de sa réclamation non motivée ou non accompagnée de l'avis de contravention. Il découle de ces dispositions que l'officier du ministère public n'a pas le pouvoir d'apprécier lui même la pertinence des motifs invoqués par le contrevenant dans sa réclamation, sauf pour décider de classer sans suite la procédure. Le garde des sceaux souhaite informer l'honorable parlementaire que la circulaire relative à la politique pénale en matière de contrôle automatisé de la vitesse adressée aux procureurs généraux et aux procureurs de la République le 7 avril 2006 (CRIM 06-8/E1 - 07-04-2006 - NOR : JUS D 06-30049 C) proscrit cette pratique en rappelant l'étendue exacte des pouvoirs des officiers du ministère public et donne pour instruction aux procureurs de la République de veiller au strict respect des dispositions de l'article 530-1 du code de procédure pénale.

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