Question de M. DUSSAUT Bernard (Gironde - SOC) publiée le 01/11/2007

M. Bernard Dussaut appelle l'attention de M. le ministre d'État, ministre de l'écologie, du développement et de l'aménagement durables sur les conditions de résorption de la décharge illégale de pneumatiques usagés située sur le domaine de Saint-Cricq à Cérons en Gironde. Cette décharge illégale présente un potentiel de dangerosité extrêmement important tant pour la sécurité des personnes et des biens que pour la protection de l'environnement naturel ou cultivé. Depuis l'incendie d'une partie du site dans la nuit du 19 au 20 octobre 2002, les gouvernements successifs et les services de l'État ont été à maintes reprises sollicités et se sont engagés à une évacuation de la décharge et à une dépollution du site. Or, si le suivi administratif effectué par la préfecture a abouti à considérer cette décharge comme « orpheline », aucune avancée n'est à noter à ce jour concernant son évacuation. C'est pourquoi il lui demande de bien vouloir lui préciser s'il entend donner rapidement les instructions indispensables à l'évacuation totale du site de Saint-Cricq à Cérons.

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Réponse du Secrétariat d'État aux transports publiée le 21/11/2007

Réponse apportée en séance publique le 20/11/2007

M. le président. La parole est à M. Bernard Dussaut, auteur de la question n° 86, adressée à M. le ministre d'État, ministre de l'écologie, du développement et de l'aménagement durables.

M. Bernard Dussaut. Monsieur le président, monsieur le secrétaire d'État, mes chers collègues, voilà un an presque jour pour jour, j'interrogeai Mme la ministre de l'écologie et du développement durable, Nelly Olin, sur les conditions de résorption des sites de stocks de pneumatiques en Aquitaine, et plus précisément en Gironde. La préoccupation majeure concernait alors le site d'Espiet, mais également la décharge illégale de pneumatiques usagés située sur le domaine de Saint-Cricq, à Cérons.

Si l'évacuation du site d'Espiet a été réalisée dans les temps, aucune avancée n'est à noter sur le site de Cérons, malgré les engagements pris par Mme Nelly Olin. Pourtant, le suivi administratif effectué par la préfecture de la Gironde a abouti à considérer cette décharge orpheline. Or, malgré les démarches réitérées du maire de la commune, l'évacuation du site n'a toujours pas commencé.

Je me permets de faire un petit rappel historique. À partir de janvier 1995, le site de Saint-Cricq, à Cérons, a servi de lieu de stockage à près de 50 000 mètres cube de pneus usagés. Une plainte du maire et un arrêté préfectoral d'interdiction dans le cadre des installations classées non déclarées, daté du 1er juin 1995, n'ont eu aucune incidence.

Cinq ans plus tard, la société propriétaire des terrains d'emprise de ce dépôt illicite a été mise en demeure, par un arrêté préfectoral daté du 14 décembre 2000, de présenter un plan d'élimination. Cette demande est restée sans suite. Le site est, alors, partiellement ravagé par un incendie dans la nuit du 19 au 20 octobre 2002.

Les seuls travaux réalisés en 2004 ont consisté en la création d'allées pare-feu, qui ne permettraient toutefois probablement pas le passage de véhicules de pompiers en cas de nouvel incendie, et l'analyse du site par l'Agence de l'environnement et de la maîtrise de l'énergie, l'ADEME, a donné lieu à une conclusion sans ambiguïté : « seule une évacuation totale de ce dépôt garantirait que les évènements de l'automne 2002 ne se reproduisent pas ».

Cette décharge illégale est située dans un périmètre proche de plusieurs communes regroupant plusieurs milliers de personnes, en plein coeur des vignobles de Bordeaux, Graves, Cérons et Sauternes. Elle présente donc toujours un potentiel de dangerosité extrêmement important, tant pour la sécurité des personnes et des biens que pour la protection de l'environnement naturel ou cultivé.

Dans la circulaire du 8 novembre 2005 relative au traitement des stocks abandonnés de pneumatiques usagés, précisant le décret du 24 décembre 2002 portant sur l'élimination des pneumatiques usagés, l'objectif défini par Mme la ministre Nelly Olin était très clair : la résorption de l'ensemble des dépôts de pneumatiques à responsable défaillant pour la fin de l'année 2007.

Monsieur le secrétaire d'État, ma question est donc très simple : le Gouvernement va-t-il se donner les moyens de tenir l'objectif fixé, et pouvez-vous nous préciser les délais envisagés pour l'évacuation du site de Saint-Cricq à Cérons et sa dépollution complète ?

M. le président. La parole est à M. le secrétaire d'État.

M. Dominique Bussereau, secrétaire d'État chargé des transports. Monsieur le sénateur, vous abordez un vrai sujet, qui ne concerne d'ailleurs pas la seule Gironde, département que je connais bien.

Depuis le lancement de la filière d'élimination des pneumatiques usagés au début de l'année 2004, la résorption des dépôts constitués par le passé est devenue - vous l'avez rappelé en citant Mme Olin - une priorité.

De tels dépôts entraînent, en effet, des nuisances certaines pour les riverains et présentent des risques importants, notamment en cas d'incendie.

En 2003, un recensement, effectué conjointement par l'ADEME, l'Agence de l'environnement et de la maîtrise de l'énergie, les manufacturiers et des acteurs du monde associatif, a permis de recenser sur notre territoire - tenez-vous bien ! -114 dépôts de pneumatiques abandonnés représentant la bagatelle de 242 170 tonnes !

Afin de résorber ces stocks, le ministère en charge de l'écologie, sous l'égide de Mme Bachelot-Narquin, puis de Mme Olin, a engagé des actions en vue de rechercher, d'abord, la responsabilité des sociétés qui exploitaient précédemment ces dépôts, ensuite, si ces sociétés se révélaient être défaillantes ou s'étaient organisées pour l'être, la responsabilité de leurs anciens clients qui ne s'étaient pas assurés de l'élimination effective des pneumatiques usagés qu'ils leur avaient confiés.

Le Conseil d'État a confirmé le bien-fondé de cette démarche dans son arrêt du 13 juillet 2006 en précisant que le seul fait de passer un contrat en vue de l'élimination de déchets n'exonérait pas le producteur desdits déchets de sa responsabilité, jurisprudence à l'évidence très importante.

Fin octobre 2007, les démarches mises en oeuvre par les services de l'État ainsi que l'engagement de la société Aliapur de reprendre volontairement 30 000 tonnes de pneumatiques usagés en provenance des dépôts abandonnés avaient permis d'évacuer près de la moitié des stocks pour un total de plus de 100 000 tonnes de pneumatiques usagés valorisés, dont l'élimination est donc en cours.

Toutefois, il reste des difficultés, les démarches entamées par l'administration ne permettant pas d'identifier systématiquement des responsables solvables. Par ailleurs, la société Aliapur a déjà atteint le quota de 30 000 tonnes qu'elle s'était engagée à prendre en charge.

Vous attirez donc avec raison, monsieur Dussaut, l'attention du Gouvernement sur la nécessité d'apporter maintenant une réponse spécifique au cas de ces dépôts sans responsable solvable identifiable, parmi lesquels figure celui qui est situé sur le domaine de Saint-Cricq, dans la commune de Cérons.

En vue de l'évacuation de ces derniers dépôts, les professionnels du secteur, notamment les distributeurs et les manufacturiers, ont travaillé, avec le ministère en charge de l'écologie, à la conclusion d'un accord volontaire par lequel ils s'engageraient à organiser et à financer l'élimination des stocks restants.

Jean-Louis Borloo et Nathalie Kosciusko-Morizet estiment qu'un tel accord devrait pouvoir être signé dans les prochaines semaines, c'est-à-dire, nous l'espérons, avant la fin de l'année, sous l'égide du ministère de l'écologie, du développement et de l'aménagement durables.

Toutefois, pour des raisons d'ordre technique liées au risque de saturation des débouchés existants pour la valorisation de ces déchets, l'évacuation des stocks restants devra intervenir progressivement, et je souhaite comme vous, monsieur le sénateur, que « progressivement » ne signifie pas sur une longue durée.

Concernant les sites présentant des risques sanitaires et environnementaux majeurs et qui ne pourront être immédiatement évacués pour les raisons techniques ou économiques que je viens d'évoquer, le ministère de l'écologie s'engage à ce que leur mise en sécurité provisoire soit l'une des dispositions inscrites dans l'accord volontaire, dont nous attendons beaucoup. Je puis vous assurer, monsieur Dussaut, que nous serons très attentifs au cas de la commune de Cérons.

M. le président. La parole est à M. Bernard Dussaut.

M. Bernard Dussaut. Je vous remercie, monsieur le secrétaire d'État, de votre réponse. Cependant, vous ne me donnez pas beaucoup de précisions sur les délais et vous comprendrez que je reste un peu sceptique.

J'ai en mains la circulaire du 8 novembre 2005 adressée par Mme la ministre Nelly Olin aux préfets de région et de département : « La question des dépôts de pneumatiques usagés constitués par le passé devient maintenant primordiale. De tels dépôts entraînent une prolifération d'insectes et de reptiles et peuvent présenter un risque important en cas d'incendie », comme on l'a, hélas ! déjà constaté à Cérons.

Mme la ministre poursuivait : « L'objectif que je fixe est que, fin 2007, l'ensemble de ces dépôts soient résorbés. Je compte sur votre engagement pour tenir cet objectif. »

Monsieur le secrétaire d'État, la fin de l'année 2007 n'est pas loin et je ne vois pas beaucoup de progrès. Au regard de la gravité des risques, je demande donc, puisqu'un accord semble devoir être passé, que dans le cadre de celui-ci l'évacuation des pneumatiques usagés du site de Cérons soit véritablement une priorité.

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