Question de M. DESESSARD Jean (Paris - SOC-R) publiée le 11/01/2008

Question posée en séance publique le 10/01/2008

M. Jean Desessard. Ma question s'adresse à M. le ministre de l'immigration, de l'intégration, de l'identité nationale et du codéveloppement.

Monsieur le ministre, alerté par le syndicat CGT de l'aéroport Roissy - Charles-de-Gaulle et l'association Réseau éducation sans frontières de la transformation de la salle B33 en zone d'attente pour passagers en instance, j'ai usé, vendredi 4 janvier, de mon droit de visite parlementaire afin de constater par moi-même les conditions d'accueil.

Ce jour-là, soixante-huit hommes et femmes de toutes nationalités, notamment tchétchène et somalienne, y attendaient le traitement de leur dossier de demande d'asile, certains depuis plus de quatre jours.

Monsieur le ministre, les conditions d'accueil de cette salle sont épouvantables et ne correspondent absolument pas à un accueil prolongé : pas de lit, pas de douche, pas de table, pas de téléphone pour les contacts extérieurs et le suivi des dossiers, peu de place pour circuler ; bref, une promiscuité scandaleuse pour des personnes qui séjournent en moyenne trois ou quatre jours dans ce hall d'embarquement inadapté à l'hébergement.

Quelques instants plus tard, alerté de nouveau par les associations de soutien aux demandeurs d'asile, j'ai visité deux salles de maintien au poste de police de la zone A et j'ai été scandalisé par le manque d'hygiène de ces locaux qui accueillent des familles avec enfants. Les WC et la douche étaient dans un état de saleté indescriptible. Je vous conseille de faire cette visite, monsieur le ministre, et, si possible, de la faire à l'improviste.

J'en viens à ma question : est-ce l'illustration de cette nouvelle « politique de civilisation » défendue par le Président de la République que d'accueillir des étrangers en demande d'asile politique dans de telles conditions ?

Monsieur le ministre, l'ensemble de vos déclarations montre votre souci permanent de la comptabilité des sorties du territoire : 22 000, 23 000, 24 000, 25 000... Peut-on espérer que vous anticipiez aussi les entrées afin de prévoir des conditions d'accueil dignes pour les entrants, qui n'ont d'autre tort que d'espérer une vie décente ou de vouloir échapper à la torture ou à la mort dans leur pays ? (Applaudissements sur les travées du groupe socialiste et du groupe CRC.)

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Réponse du Ministère de l'immigration, de l'intégration, de l'identité nationale et du codéveloppement publiée le 11/01/2008

Réponse apportée en séance publique le 10/01/2008

M. Brice Hortefeux, ministre de l'immigration, de l'intégration, de l'identité nationale et du codéveloppement. Monsieur le sénateur, vous m'interrogez sur les conditions d'accueil dans la zone d'attente de Roissy.

Comme vous le savez, cette zone permet d'accueillir des ressortissants étrangers qui, à leur arrivée sur le territoire français, soit ne disposent pas de visa, soit ne remplissent pas les conditions pour séjourner légalement en France.

Ils peuvent y être accueillis, vous l'avez évoqué, pour des durées variables, qui peuvent aller jusqu'à vingt jours, naturellement sous le contrôle des juges et selon une procédure qui a été définie par la loi ; au terme de la période d'attente, il est possible de déterminer si l'étranger doit être refoulé ou si, au contraire, il peut être admis.

Cela dit, vous avez raison, monsieur le sénateur, et je ne le conteste absolument pas, il y a eu une évolution, due à un phénomène constaté depuis, grosso modo, le 15 ou le 20 décembre : il s'est produit une augmentation du nombre de ressortissants étrangers, majoritairement soit russes, c'est-à-dire d'origine tchétchène, ayant souvent transité par l'Ukraine - et il faudrait sans doute mener une réflexion à propos d'une agence de voyage ayant organisé ces déplacements -, soit somaliens, provenant donc de la corne de l'Afrique.

Quelle était, ce matin-même, la situation dans la zone d'attente ? Il y avait 267 étrangers, ce qui est au-delà de la capacité d'accueil puisque celle-ci est de 164 personnes.

Naturellement, ce n'est pas la situation que vous avez sans doute connue en 2000 - je ne doute en effet pas une seule seconde que, alerté aussi à l'époque par la CGT et par RESF, vous vous soyez rendu sur place à l'époque - alors qu'il y avait, régulièrement, de 400 à 500 personnes dans la zone d'attente. Nous n'en sommes pas aujourd'hui à ce stade, mais il est vrai qu'il y a une centaine de personnes surnuméraires.

Cependant, ne croyez pas que nous sommes restés les bras ballants : nous avons tenté d'agir le plus rapidement et le plus efficacement possible, mais, vous le savez, ce n'est pas simple.

D'abord, sur le plan pratique, j'ai fait réquisitionner des locaux qui appartiennent à Aéroports de Paris et, avec le concours de la sécurité civile et celui de la Croix-Rouge, nous avons essayé d'aménager au mieux les lits et les équipements sanitaires, mais aussi d'installer des cabines téléphoniques pour que les communications puissent être établies.

Ensuite, sur le plan juridique, l'OFPRA, l'office français de protection des réfugiés et des apatrides, dont relèvent ces dossiers étant engorgés, j'ai renforcé ses moyens pour qu'il puisse exercer une permanence accrue et pour que les dossiers soient examinés le plus rapidement possible.

Je rappelle, mais vous le savez, que je n'ai pas d'influence sur l'OFPRA, qui ne dépend pas de moi et se prononce en toute indépendance. (Exclamations sur les travées du groupe CRC.)

Très concrètement, il y a effectivement une situation particulière, et nous faisons le maximum pour la résoudre ; nous le faisons avec le souci de respecter les droits et les libertés individuels, mais aussi les règles d'un État de droit. (Applaudissements sur les travées de l'UMP et de l'UC-UDF.)

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